
Entretien réalisé par : Achour Ait Ali
Ancien attaquant de la JSK et du MCA, Mourad Air Tahar concilie parfaitement entre football et médecine, deux métiers qu'il exerce avec la même passion. Observateur éclairé, celui qui a occupé jusqu'à récemment successivement les postes de directeur sportif et entraîneur adjoint à la JSK analyse pour El Moudjahid, le choc de cet après-midi entre l'Algérie et le Burkina Faso. Décryptage.
El Moudjahid : L'EN affrontera demain le Burkina Faso pour le compte de la 2e journée des groupes de la CAN 2023, est-ce qu'il est exagéré de dire que c'est déjà un match décisif ?
Mourad Aït Tahar : Je pense que c'est un peu exagéré. Il est peut-être un peu décisif en ce sens qu'il ne faut pas qu'on perde. Et encore, même si on perd, ce n'est pas l'élimination assurée pour nous. Il restera un match. Si on gagne, on peut aisément passer avec quatre points. Ceci pour réfuter l'idée que l'Algérie est déjà dos au mur après un premier match nul. Il faut à mon avis rester serein et faire ce qu’il faut pour arracher la victoire. L'idéal serait bien sûr de gagner pour mieux entrer dans la compétition. Mais dans tous les cas, il ne faut pas perdre pour rester dans le coup...
Mais pour la confiance, une victoire aiderait à chasser le doute...
Naturellement, pour aborder le troisième match plus sereinement. Car attention, il n'y a plus de petites équipes. On l'a vu lors du match Burkina Faso-Mauritanie. Cette dernière a vraiment vendu sa peau très chère.
Comment voyez-vous les chances de l'Algérie face à un adversaire qui ne lui réussit pas forcément ces dernières années ?
C'est un adversaire avec lequel on a une histoire. Le Burkina nous a de tout temps posé des problèmes. On peut dire qu'ils jouent chez eux vu la proximité entre les deux pays. Leur victoire face à la Mauritanie les met dans de meilleures dispositions. Clairement, la pression est sur l'Algérie. Le doute doit commencer à s'installer après le nul face à l'Angola. Mais attention, tout peut changer une fois le coup d'envoi du match donné. Ceci sont des données d'avant match. Les choses vont aller très vite durant le match.
Selon vous, Djamel Belmadi va-t-il reconduire le même système et les mêmes joueurs ou, au contraire, vous attendez-vous à des changements ?
C'est l'interrogation du moment. Après un faux pas, on n'a plus forcément les mêmes certitudes. Va-t-il changer ? Moi, je dis que oui, parce qu’avec le temps qu'il fait, un turn-over s'impose avant ou pendant les matches. Le coach a besoin de faire reposer ses joueurs. Puis, il y a la question des cadres qui ne convainquent plus depuis un temps déjà. Faut-il les changer ou continuer à leur faire confiance ? C'est ce genre de questions qu'on se pose après un premier faux-pas et auxquelles le sélectionneur devra apporter les réponses justes.
Vous parlez de cadres qui ne convainquent plus. Faites-vous allusion à Mahrez ?
Il n'y a pas que Mahrez, même s'il est vrai qu'il ne pèse plus, lui non plus, sur le jeu de l'équipe. Notamment face à l'Angola, à sa décharge, je dirai que c'est son tempérament. C'est un joueur qui n'est pas forcément omniprésent mais qui peut sur une seule action faire basculer le match. Il a ce petit quelque chose que les autres n'ont pas.
Vous attendez-vous à des changements ?
Oui, mais je ne pense pas que Belmadi va tout chambouler. C’est quelqu'un qui tient à ses principes de jeu. Donc, non je ne m'attends pas une révolution dans le Onze...
Quelles seront selon vous, les clés du match ?
Je m'attends à deux scénarios : un, le Burkina Faso, qui compte une victoire, va opter pour une position attentiste et essayer de jouer sur les contres. De toute façon, le jeu direct est leur point fort. Dans ce cas, l'Algérie doit faire le jeu et essayer de marquer. Avec le temps qu'il fait, je ne m'attends pas un combat pendant 90 minutes. On verra des duels pendant 15-20 minutes. Après, ce sera plus la gestion de l'effort et la circulation du ballon. A mon avis, les individualités et les balles arrêtées peuvent être la clé.
Vous avez sans doute suivi le premier match de l'Algérie face à l'Angola. Comment peut-on expliquer la baisse drastique du rendement de l'équipe en deuxième mi-temps ?
Je pense qu'on a mal géré le match. On aurait dû aller chercher vite le deuxième but qui nous aurait mis à l'abri. Il y a eu une succession d'erreurs qui ont remis l'Angola sur orbite. Dès lors on a couru derrière le deuxième but, mais cette situation a mieux convenu à l'adversaire qui s'est contenté après coup, de gérer le score.
Les sélections dites favorites ont eu du mal à débuter lors de ce tournoi. On pense particulièrement à la Tunisie, l'Egypte... Est-ce un problème d'acclimatation ou bien c'est les autres sélections qui ont progressé ?
Ce qui est sûr aujourd'hui c'est qu'il n'y a plus de petites équipes. Certes, il y a des sélections qui ont une histoire, mais le niveau a considérablement évolué en Afrique. Et puis, il y a le facteur surprise qui pèse dans le football. Sur les premiers matches, il ne faut pas s'étonner si des équipes dites petites parviennent à créer la surprise. Néanmoins, est-ce qu'elles ont les moyens d'aller plus loin. Moi, je pense qu'on verra beaucoup plus les habituelles grosses cylindrées dans les tours avancés malgré un début difficile.
A. A. A.