
De notre envoyé spécial Samy Kaidi
Distante de presque 1.300km d’Alger, la perle de la Saoura, Beni Abbès, bâtie en contrebas du grand erg occidental, ouvre ses bras pour accueillir les visiteurs qui ne peuvent rester indifférents devant une telle aquarelle. L’oasis, chef-lieu de la wilaya éponyme, regorge d’innombrables potentialités touristiques, fruit d’une histoire riche et passionnante. En sus, de paysage époustouflant et d’un patrimoine matériel et immatériel chargé d’art et d’histoire aux racines séculaires.
Rencontré sur place, Abdelkader Telmani, guide passionné et agronome de son état, a, d’emblée, fait savoir qu’un des atouts centrales de la ville est sa palmeraie. Cette dernière s’étend sur, selon lui, une superficie de plus de 40 hectares, possède 28 000 pieds de palmiers-dattiers et 36 cultivars qui ont chacune leur fonction économique propre. «Les cultivars ne sont autres que les différentes variétés de dattes car nous croyons fermement en l’importance de la diversification des espèces pour assurer une bonne récolte», a-t-il fait savoir avant d’ajouter qu’outre son aspect social, la palmeraie permet, poursuit-il, de maintenir la vie dans le Sahara par son action protectrice de la production agricole. «En effet, par l’étendue de ses palmes, le palmier contribue à la protection contre les rayons du soleil d’un certains nombres d’arbres fruitiers tels que les agrumes, les figuiers, les abricotiers et les grenadiers», a-t-il estimé avant de préciser que la région se distingue par un système d’irrigation propre et originale, le Tighira. «Il s’agit d’une bassine remplit d’eau accompagnée d’un verre en cuivre troué qui permet de rationaliser les opérations d’irrigations», a-t-il révélé. Mettant à profit cette opportunité, Telmani a, également, énuméré un certain nombre d’enjeu et autres défis qui s’imposent pour la préservation de la palmeraie contre les aléas. Le premier d’entre eux n’est autre que la ressource en eau. «Le cours d’eau qui alimente la palmeraie, la seguia Sidi Athman, se raréfie et l’importance de l’eau se pose», a-t-il noté avant d’aborder les questions d’héritages, un facteur à ne pas négliger. En sus, souligne-t-il, d’un certains nombres de maladies qui agressent la palmeraie à l’instar du ‘‘bayoud’’, une maladie fongique qui touche les palmiers-dattiers qui empêche la circulation de la sève. «La palmeraie de Béni Abbès a trouvé son salut, selon de nombreux experts, par la diversification des espèces de palmiers-dattiers», a-t-il, dans ce sillage, assuré. Visiblement très enthousiaste à faire découvrir l’ensemble des recoins de l’oasis blanche, Abdelkader Telmani, qui ne compte pas ses heures, a poursuivi sa marche explicative vers, un haut lieu de l’historicité des Beni Abbès, le ksar. Une fois sur place, ce dernier a d’emblée, indiqué que la construction de cet ensemble imposant remonte à la fin du XIVe siècle et au début du XVe siècle par Mohamed Ben-Abdeslam. De passage dans la région sur son chemin vers Adrar, poursuit-il, Benabdeslam, un érudit connu pour sa connaissance parfaite des textes religieux, a constaté que les deux ksour existant dans la zone sont incapables de protéger les Ababsa contre les attaques des nomades qui faisaient de nombreuses razzias pour prendre possessions des récoltes. Remonté par de tels agissements, Mohamed Ben Abdeslam leur proposa la construction d'un nouveau ksar unifié au sein de la palmeraie, chose que les Ababsa acceptèrent en laissant le choix de l'emplacement au sage. «La légende rapporte qu’avant son départ vers Adrar l’érudit aurait demandé aux habitants que l’animosité n’est plus sa place au sein de la communauté et que nul étranger ne passera plus jamais la nuit dehors», a-t-il précisé. Lors de ses explications complémentaires, le guide a, par ailleurs, fait savoir que le nouveau ksar était une citadelle imprenable eu égard de sa fortification hautement aboutie.
La palmeraie et la forteresse imprenable
En effet, la palmeraie constituait, selon lui, une défense naturelle, en sus, de tranchés de 4 mètres de largeur et 3 mètres de profondeurs creusées tout autour de la nouvelle cité. De plus, la construction du nouveau ksar se distinguait par l’ajout de murs et de tourelles de contrôle ainsi que par la mise en place d’un système de dédalle ingénieux rendant l’orientation à l’intérieur du ksar quasiment impossible pour tout intrus. «La cité était bâtie avec des dédales tels un labyrinthe», a-t-il avoué avant de revenir sur les matériaux de constructions du ksar qui ne sont autre qu’en symbiose avec la nature : le sable, l’argile, la chaux, la pierre et les troncs de palmiers. «Toutefois, il convient de signaler que les classes sociales défavorisées utilisées plutôt les tiges de palmiers», a-t-il précisé avant d’indiquer que par la suite les plafonds en bois de tamaris ont été privilégiés compte tenu de leurs effets anti-termite. Peu avant la prière du Maghreb et au niveau de la mosquée du ksar, Abdelkader Telmani a fait savoir que cet endroit constitue le cœur et le lieu central de la vie sociale au sein du ksar. «La première bâtisse construite fût la mosquée, c’est un passage obligatoire des rituels individuels, familiaux et/ou collectifs», a-t-il précisé avant d’assurer que cet espace servait, également, à accueillir les invités de la cité. «La mosquée a servi, pour chaque tribu, de point de repère dans la construction de « derb «. La mosquée servait également de lieu de rassemblement, ancestrale, pour célébrer le départ vers le Hadj d’un ou de plusieurs habitants», a-t-il insisté avant de rappeler, dans ce même ordre d’idées que la durée des festivités, que cela soit au départ vers les Lieux saints et/ou au retour de ces derniers, était de 7 jours. Tout au long des 150 km qui séparent l’oasis blanche, Beni Abbès à Taghit, l’enchanteresse, un décor digne d’une carte postale s’offre à nous. Des paysages à couper le souffle se succèdent tandis que des habitants vêtus d’habits truculents étaient, quelquefois, rencontrés sur le chemin. Puis apparaît Taghit, tel un mirage, la ville dont les deux localités principales sont Zaouia Fougania et Tahtania se situe dans la wilaya de Béchar, à environ 90 km au sud du chef-lieu. La cité compte environ 7.000 habitants, selon l’un des recensements les plus récents, et un haut lieu du tourisme dans la région de la Saoura. Rencontré sur place, Tayeb Mebarki, cadre local dans le secteur touristique, a voulu valoriser l’incroyable potentielle touristique de l’enchanteresse. Pour lui, la ville présente de nombreux atouts pour les visiteurs, entre autres, la région est connue pour les nombreuses gravures rupestres datant de la période néolithique soit remontant de 7.000 à 10.000 ans avant J-C. «Le ksar principal de Taghit a été bâtie il y a plus de 8 siècles et plus de 5 autres ksour sont présents dans la cité. La palmeraie de Taghit est l’une des plus imposantes dans le coin de par sa grandeur. En effet, elle compte de plus de 100.000 palmiers et 65 variétés de dattes», a-t-il fait savoir avant d’affirmer que la vie dans les ksour se caractérise par une communion et une solidarité entre l’ensemble des tribus. Tayeb Mebarki a, par ailleurs, estimé que le tourisme revient en force dans la région. Dans ce sillage, il citera les investissements dans le secteur qui ne cessent d’augmenter, à l’instar de l’hôtellerie qui vient répondre à une demande de plus en plus croissante après la pandémie de la Covid-19. «Taghit se caractérise par le tourisme chez l’habitant qui permet de bâtir des liens plus solides avec les locaux et favorise l’éco-tourisme», a-t-il souligné avant de révéler qu’il existe pas moins de 20 gîtes et autres maisons d’hôtes dans la commune. La cité est, assure-t-il, connue pour les nombreuses activités qu’elle propose à l’instar du paramoteur, du quad, du chameau... En venant à Taghit, vous pouvez faire également du kayak, du paddle et ou du kit surf, dans l’un des plans d’eau qui se situe non loin de la ville. «En l’occurrence à El Aouina et/ou au niveau du djebel Kerrouche», a-t-il précisé avant de préciser que les touristes nationaux et étrangers sont friands des sorties dans le désert agrémenté d’une nuitée à la belle étoile. Enfin, Mebarki a tenu à lancer un appel solennel à l’ensemble des visiteurs du grand erg occidental de l’impérieuse nécessité de respecter l’environnement. «Il ne faut pas être égoïste, ainsi, nous devons transmettre un écosystème sain pour les générations futures».
S. K.
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Saoura : Moringa, la plante médicinale par excellence
Brahim, herboriste en herbe, sur la grande place de Beni Abbès est le propriétaire d’une sympathique boutique au cœur de l’oasis. Ce dernier, un véritable amoureux des plantes, a tenu à nous parler de la moringa, la plante médicinale par excellence de la Saoura. «Cette plante contient un nombre important de vertus pour la santé. En effet, que cela soit en poudre ou en décoction, la moringa, est conseillée pour stimuler le système immunitaire, réduire la fatigue, abaisser la pression artérielle, améliorer la digestion et le transit», a révélé le vieux spécialiste avant d’ajouter que cette plante est utilisée, depuis des centaines d’années, par les habitants de l’oasis blanche pour soigner également de nombreuses affections à l’image de ceux agressant la peau, l’appareil dentaire, le diabète et permettrait de lutter contre les maladies respiratoires et les cancers.
S. K.
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Développement de l’écotourisme :
Ouarourout l’association qui s’engage
Activement engagée pour la promotion et la restauration du patrimoine local, Youssef, un des responsables de l’association locale Ouarourout qui promeut l’écotourisme et la restauration du patrimoine matériel et immatériel de la ville, a, vivement, tenu à nous faire découvrir les activités de l’association dont il est membre. « Cette dernière, créée en 2003, est activement engagée pour la promotion et la restauration du patrimoine local. Outre ses activités sociales et culturelles, l’association valorise, également, le patrimoine via la promotion de l’activité touristique. L’organisation a procédé, se réjouit-il, dans le cadre développement durable, à la restauration du ksar éponyme qui était dans un état de délabrement avant de connaître une seconde vie au grand bonheur des habitants et des visiteurs. Enfin, Youssef a, d’autre part, souligné le fait que l’association Ouarourout encourage les activités génératrices de revenus afin de sauvegarder le patrimoine.
S. K.