Entretien exclusif avec Ismaël Nabé, ministre guinéen du Plan et de la Coopération internationale : «L’Algérie, un modèle de diversification économique pour la Guinée»

En marge de sa participation aux réunions annuelles de la Banque islamique de développement (BID) à Alger, le ministre guinéen du Plan et de la Coopération internationale, Ismaël Nabé, a accordé un entretien à El Moudjahid. Il y exprime la volonté de la Guinée de renforcer ses liens stratégiques avec l’Algérie, dans une dynamique de coopération Sud-Sud renouvelée et porteuse d’ambitions économiques et diplomatiques. Pour le ministre, le modèle algérien de diversification est une source d’inspiration précieuse pour son pays.

El Moudjahid : Quel sens donnez-vous à votre présence à Alger dans le cadre des réunions de la BID ?

Ismaël Nabé : C’est un honneur d’être ici à Alger, accueilli fraternellement par mon homologue algérien, le ministre de l’Économie et des Finances. L’Algérie et la Guinée partagent une histoire forte, marquée par la solidarité du Mouvement des Non-Alignés et les engagements de nos pères fondateurs. Aujourd’hui, notre mission est de redonner un souffle à cette relation, en la projetant dans une nouvelle ère. Nous voulons la transformer en un partenariat stratégique, au service du développement partagé et de l’intégration africaine.

Quels axes de coopération avez-vous abordés avec vos partenaires algériens ?

Nos échanges ont porté sur des secteurs prioritaires pour les deux pays : transport, infrastructures, éducation, nouvelles technologies, agriculture et pêche. Ces domaines sont essentiels à la transformation structurelle de nos économies.
Nous avons notamment évoqué la nécessité de réactiver la ligne aérienne Alger-Conakry. Ce n’est pas seulement une question de transport, mais un vecteur stratégique de rapprochement entre nos peuples et de dynamisation des échanges commerciaux. Nous travaillons également à renforcer la coopération entre nos ministères des Infrastructuresafin de tirer partie de l’expertise algérienne dans la modernisation urbaine.

La coopération Sud-Sud semble être un pilier de votre politique extérieure. Quelle est votre approche à ce sujet ?

La Guinée a toujours été un acteur engagé du partenariat Sud-Sud. Aujourd’hui, nous voulons aller plus loin en construisant une coopération circulaire, inclusive et durable. Dans cette perspective, nous œuvrons à la création d’un institut triangulaire Sud-Sud pour renforcer les synergies entre pays du Sud.
Des mécanismes comme l’AATB (Arab-Africa Trade Bridge), le Gilecap (Groupe d’initiative pour le leadership et la capacité africaine privée)ou encore la BID sont des instruments puissants. Ils permettent de connecter les économies, de stimuler les échanges commerciaux et de soutenir l’essor du secteur privé, qui est au cœur de notre stratégie de développement.

Comment percevez-vous l’expérience algérienne en matière de diversification économique ?

L’exemple algérien est extrêmement instructif. Diversifier son économie est un défi central pour nos États, et l’Algérie a démontré qu’il était possible de transformer ses ressources naturelles en leviers de croissance pour d’autres secteurs. C’est une approche que la Guinée entend suivre.
Notre pays dispose de ressources minières importantes et de perspectives pétrolières prometteuses. Mais notre ambition est d’utiliser ces richesses pour investir dans l’agriculture, les infrastructures, l’éducation et l’industrie. Cette vision de développement intégré, résilient et souverain est au cœur de notre convergence avec l’Algérie.

Quel avenir envisagez-vous pour les relations entre Conakry et Alger ?

Nous repartons d’Alger avec beaucoup d’optimisme. Les échanges ont été riches, concrets et porteurs d’espoir. Notre délégation comprenait des représentants du secteur privé guinéen, et nous avons pu établir un contact direct avec le patronat algérien. Les deux parties ont exprimé leur volonté de travailler ensemble pour concrétiser les opportunités identifiées.
Comme l’a souhaité le président de la République de Guinée, cette relance des relations avec l’Algérie s’inscrit dans une stratégie globale de repositionnement de notre pays sur les scènes africaine et internationale. Nous avançons main dans la main vers un partenariat durable, équilibréet mutuellement bénéfique.

Propos recueillis par Samia Boulahlib

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