
Le concept de zone d’ombre a été introduit, lors de la rencontre gouvernement-walis tenue en février 2020
Pour les chercheurs du Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (CREAD), Rym Saidoun et Siham Aït Hammou, il s’agit d’une «terminologie qui distingue des zones isolées où la population n’a pas accès aux commodités les plus élémentaires».
Selon les chercheuses, les ménages des petites agglomérations rurales, les populations les plus vulnérables économiquement et socialement «se trouvent souvent exclus de ces programmes de soutien».
Les deux chercheuses relèvent qu’en dépit des multiples programmes en matière de lutte contre la pauvreté, de création d’emploi, d’amélioration des revenus des agriculteurs et des conditions de vie des populations rurales, «le bilan reste mitigé». En outre, qualifier ces régions pauvres de «zones d’ombre» revient à justifier des décennies de mauvaise gestion, selon le directeur général de l’INSEG, Abdelaziz Medjahed.
Le grand intérêt accordé par M. Tebboune au développement des zones d’ombre répond, selon des experts, à plusieurs objectifs.
Le professeur Mehdi Kalla, du laboratoire Risques majeurs et aménagement du territoire de l'Institut des sciences de la terre et de l’univers à l’université de Batna, indique que ce chantier porte une volonté profonde de restaurer l’équité territoriale et sociale et rendre aux citoyens des zones d’ombre leur dignité.
Ainsi, le Président a posé les jalons d’une Algérie nouvelle qui doit s’orienter vers une consolidation de la confiance des citoyens en leurs dirigeants et susciter leur adhésion à cet ambitieux programme, affirme-t-il.
Eu égard à l’ampleur de ce projet, au nombre impressionnant de zones d’ombre, à son importance stratégique et aux enjeux sociétaux qui en découlent «s’imposent la nécessité et l’urgence de la mise en œuvre d’outils de gestion numérique puissants capables de contenir et de gérer la quantité énorme d’informations», précise le chercheur. Le Président Tebboune avait ordonné la réalisation d’un recensement global des zones d'ombre, partant de sa conviction qu’on «ne saurait parler de nouvelle Algérie sans le développement de ces régions».
Il a estimé que la situation prévalant dans certaines régions était «inacceptable au regard de tous les moyens dont nous disposons pour y remédier», exhortant les responsables locaux à prendre en charge les catégories vulnérables et à faire de leurs conditions de vie une priorité. «Dans cette conjoncture particulière, vous êtes tenus, en tant que responsables locaux, d'opérer le changement au niveau local en rompant définitivement avec les anciennes pratiques et en vous rapprochant des citoyens afin de briser le cloisonnement créé par le passé entre les citoyens et l'Etat et de restaurer la confiance perdue», a insisté le Président lors de son intervention devant les walis. Le Président ne vise pas seulement l’amélioration du cadre de vie des populations dans ces régions. Il veut, selon des experts, «réconcilier les citoyens de ces zones avec leur environnement pour rétablir leur confiance en leurs dirigeants et réparer une injustice socio-économique causée par une mauvaise gestion politique et administrative depuis des décennies».
N. B.
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Le professeur Ali Rebidj, politologue
«Les populations sont marginalisées»
Le professeur Ali Rebidj, enseignant à la Faculté des Sciences politiques d'Alger, soutient que le développement des zones d’ombre «représente une valeur ajoutée socio-économique». En effet, le développement de ces régions défavorisées permettra la préservation des activités, notamment l’agriculture et l’élevage, estime-t-il dans une déclaration à El Moudjahid. «Quelle que soit l’appellation ‘’régions enclavées ou défavorisées ou zones d’ombre’’, le diagnostic est le même, car il s’agit des mêmes critères, à savoir le chômage, le manque de gaz, d’électricité et d’eau. Le Président de la République a accordé une priorité majeure aux zones d’ombre. Il agit par sens de responsabilité, poursuit le politologue. «Il a occupé plusieurs postes administratifs, à l’instar de chef daïra et de wali. Ceci dit, il était très proche de la souffrance des populations des zones d’ombre dans l’Algérie profonde, et est le mieux placé pour connaître de près leurs besoins et leurs préoccupations», estime le Pr Rebidj. L’enseignant ajoute : «Ces régions ont été délaissées et abandonnées et les populations marginalisées, ce qui a engendré un sentiment d’injustice et d’exclusion. La population a décidé de rester dans ces zones en dépit des difficultés. La situation s’est aggravée dans les villes mais également dans les régions rurales». «Il est légitime que les populations dans les zones d’ombre bénéficient des commodités, notamment l’approvisionnement en eau potable, la réalisation de routes, le raccordement au réseau de gaz naturel, l’amélioration des conditions de scolarité ainsi que des prestations sanitaires. Cela permettra de résoudre plusieurs problèmes, de lutter contre des fléaux sociaux et de fixer des populations qui ne fuiront plus leur milieu à cause des insuffisances, et contribuera ainsi au développement économique. Ces régions ont besoin d’un suivi sur le terrain et d’une réelle volonté des responsables locaux pour la mise en œuvre des engagements du Président.
N. B.
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Sidi Moussa à Alger
Avec les oubliés du développement
Sidi Moussa, une commune située à environ 25 km au sud d'Alger. Les haouchs sont en manque flagrant de développement. La décision du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, relative au développement des zones d’ombre a redonné espoir à la population qui a souffert durant des décennies des affres du terrorisme et de la marginalisation. Plus de 630 familles habitant les haouchs Boudoumi, Si Djaâfar 1 et 2, Mansouri, Si Belaid dénoncent le manque flagrant des commodités, à savoir l’eau, la route, le réseau d’assainissement et l’éclairage public.
Les zones d’ombre ne sont pas uniquement localisées dans des régions éloignées de la capitale. Les chemins de haouch Chahid Si Djaâfar 1 sont boueux. L’accès est très difficile pour les piétons et les automobilistes. Les enfants trouvent des difficultés à rejoindre l’école, située à Houaoura, à plus de 2 km. La route qui mène vers l’école est impraticable. Aucune des pistes qu’empruntent ces écoliers n’est aménagée; aller ou revenir de l’école est un véritable calvaire que subissent les enfants et les habitants, notamment en hiver. Un père de famille a affirmé que «les enfants du quartier traversent les champs pour aller à l’école. En hiver, le chemin est difficile à cause de la boue. Les élèves ne sont pas à l’abri du froid».
Le vice P/APC précise que «deux bus pour le transport scolaire ont été mis à la disposition des élèves de bourgades depuis quelques mois». De son côté, le représentant de l’association locale, Saâd Boukhars, a relevé une volonté pour améliorer le cadre de vie de la population. «Nous venons de créer une association du haouch pour s’organiser et désigner des délégués, et nous avons déjà tenu des réunions avec les responsables locaux et nous sommes sur la bonne voie», confie-t-il. Le quartier nécessite un aménagement, insiste-t-il. Dans ce quartier, 200 familles vivent dans des maisons vétustes. «Nous avons insisté auprès des autorités pour la régularisation de leur situation. Nous avons souffert du terrorisme, mais nous n’avons pas quitté la région. Nous ne réclamons que notre droit», signale Saâd. Le vice P/APC a indiqué que l’aménagement de la voirie est en phase d’évaluation.
Au quartier Laâgab 1, la situation s’est dégradée ces dernières années. Vingt familles y vivent. Le visiteur est frappé à l’entrée par des odeurs nauséabondes en l'absence de raccordement au réseau d’assainissement. «Comme notre agglomération n’est pas reliée au réseau d’assainissement, des fosses septiques ont été aménagées, mais elles déversent continuellement en formant une immense mare», déplore un habitant. «En été, c’est insupportable. Nous restons cloîtrés dans nos maisons», insiste l’un des habitants.
«La route est dégradée. Nos enfants sont contraints de marcher près d’un kilomètre pour rejoindre l’école à Si Belaid. Ils doivent traverser la RN 1. C’est un danger permanent», dénonce le père de Chaïma, 8 ans. Son voisin ajoute : «Nous sommes les éternels sinistrés. Nous sommes livrés à nous-mêmes depuis l’indépendance. D’ailleurs, ce sont les habitants qui ont aménagé la route avec leurs propres moyens en apposant de l'asphalte. De même pour l’éclairage public. Nous avons installé les poteaux et les câbles avec les cotisations des habitants. Nous n’existons que sur les listes électorales», regrette-t-il. «Le président de la République a insisté sur l’amélioration des conditions de la scolarisation des élèves. Nous interpellons les autorités pour une intervention rapide afin d’améliorer le cadre de vie», réclament des citoyens de cette localité.
Au quartier Lakhdar-Chaouch, les habitants disent qu’ils sont abandonnés à un destin précaire dans des zones d'humiliation «del». Les familles dans cette bourgade vivent sans la moindre commodité. Elles n’ont jamais bénéficié des programmes AEP. Les habitants réclament leur relogement.
Le gaz de ville fait défaut, et cette situation pousse les citoyens à acquérir des bonbonnes de gaz butane.
A haouch Boualem-Hamidi, à Rounda, les habitants témoignent de leur pénible quotidien. livrés au chômage, certains tentent, tant bien que mal, de trouver un palliatif, mais d’autres, plus nombreux, vivent très mal leur situation de chômeurs.
Redouane est titulaire d’un master en droit pénal, mais il n’a pas pu décrocher un poste malgré les nombreux dossiers déposés au niveau de l’ANEM, à Bentalha. Il vit du commerce en vendant des produits agricoles, dont des oranges, pour subvenir aux besoins de sa famille. Youcef dénonce l’exclusion. «A cause du chômage, les jeunes se sont orientés vers la consommation des psychotropes. Notre message au président de la République est de prendre en charge la jeunesse dans les zones d’ombre. Nous avons besoin de postes d’emploi stables», insiste-t-il. Les habitants de haouch Hamidi disent qu'ils vivent dans des hangars et des maisons qui menacent ruine. Les zones d’ombre sont également privées d’espaces de détente, un manque signalé par des jeunes et des parents qui s'en plaignent.
La circonscription administrative de Baraki a alloué à la commune de Sidi Moussa une enveloppe de 5,8 milliards de centimes destinée à la réalisation de projets. Il s’agit, entre autres, des travaux de raccordement du haouch frères Mansouri et haouch Boudoumi au réseau de drainage des eaux usées pour un budget total de 3,5 millions de DA ainsi que des projets au profit des haouch Djaâfar 1 et Djaâfar 2 raccordés au réseau d’assainissement pour un montant total de 9,4 millions de dinars.
Le haouch Lakhdar-Chaouch inscrit au programme va enfin être relié au réseau d’assainissement. Dans le cadre du raccordement au réseau d’eau potable, des travaux au niveau de haouch Jaghboub-Mohamed et haouch Rahimi-Issa viennent également d’être lancés. Le coût total est estimé à 1,34 milliard. l’APC informe que les habitants seront reliés au réseau d’eau potable dans 4 mois. La commune de Sidi Moussa compte réaliser un stade à Si Belaïd en 3 mois grâce à une enveloppe de 1,19 milliard.
N. B.
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Village Tarhenanet à Tamanrasset
Des projets lancés dans trois mois
Des enveloppes colossales sont consenties pour l’amélioration du cadre de vie des populations du Sud, mais plusieurs localités demeurent en marge du développement. Les conditions de vie demeurent difficiles notamment dans les zones enclavées et frontalières. Plus de 107 zones d’ombre ont été recensées à Tamanrasset dont le village de Tarhenanet, situé à 70 km du chef-lieu du centre de la wilaya, que nous avons déjà visité. Moussa El Khah, représentant de la population et membre de l’association du centre rural, a déclaré : «Nous sommes en marge du développement.» Selon lui, les commodités manquent dans ce village qui compte 560 habitants, répartis sur trois localités. Il a cité l’urgence de la réalisation et l’aménagement de la route. «La dégradation du réseau routier est un souci majeur. Les pistes sont difficiles et n’ont pas été aménagées malgré nos multiples revendications», regrette-t-il. L'absence d'un réseau de routes pose problème, notamment pour les malades et les femmes enceintes. «Certaines parturientes ont accouché lors de leur évacuation à l’hôpital, mais d’autres ont péri en chemin. Nous avons recensé six nouveaux-nés décédés en route», déplore Moussa. Les quelques structures de santé ou salles de soins existantes sont dépassées et ne disposent pas d'équipements leur permettant de mener à bien leur mission. C’est le cas de Tarhenanet qui dispose d’une salle de soins pratiquement vide. «Elle fonctionne avec des moyens humains et matériels dérisoires. Un médecin généraliste vient une fois tous les 10 jours pour des consultations, mais en cas d’urgence, il faut se déplacer à 2 km du village pour pouvoir joindre la Protection civile, car le réseau téléphonique n'est pas performant. La région a bénéficié d’un projet de raccordement au réseau téléphonique, mais la couverture est très faible, dit-il. «Nous sommes obligés de transporter le malade jusqu’au village de Tagmat, à 30 km, pour attendre l’ambulance de la PC», indique Moussa, évoquant également les conditions de la scolarisation à l’école primaire. Les chaises sont vétustes et les chauffages sont insuffisants dans une région très froide en hiver. A cela s’ajoute l’absence du transport scolaire. L’antenne administrative est assurée par deux employées dans le cadre du filet social. Les habitants évoquent le problème de l’électrification des périmètres agricoles. Le représentant de la population a mis l’accent sur la nécessité d’inscrire des opérations portant réalisation des digues de protection de cette localité des crues des oueds de Tarhenat et Toukert. «C’est une grande menace», met-il en garde. Le wali Mustapha Koriche, lors d’une visite d’inspection à Tarhenanet, a fixé un délai de 3 mois pour le lancement des projets inscrits dans le cadre du développement des zones d’ombre. Il a également instruit le P/APC pour mettre un bus scolaire à la disposition des élèves, mais sa réception a été retardée à cause de la dégradation de la route. Le wali a également donné des directives au directeur des travaux publics pour inscrire un projet pour la réhabilitation de la route reliant le village de Tahenaret et la localité.
N. B.
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Allal Bouteldja, P/APC de Sidi Moussa
«Nous avançons dans la réalisation des projets»
Le P/APC de Sidi Moussa, Allal Bouteldja, souligne que son rôle dans le développement des zones d’ombre est l’accompagnement des projets.
Entretien réalisé par N. B.
El Moudjahid : La commune de Sidi Moussa compte 19 zones d’ombre. Quels sont les critères du classement ?
Allal Bouteldja : Le classement a été décidé selon les critères édictés par le ministère de l’Intérieur, des collectivités locales et de l’aménagement du territoire. Les zones d’ombre sont définies selon les besoins majeurs des populations, notamment les réseaux d’assainissement, l’eau potable, l’état des routes, la distance par rapport aux pôles urbains, aux établissements scolaires, la présence des cantines et du transport scolaires, la disponibilité du transport urbain et semi-urbain.
La distance par rapport aux structures de santé a été également prise en compte ainsi que les infrastructures administratives et sportives destinées. Aussitôt recensées, des réunions techniques ont été tenues au niveau de la wilaya déléguée de Baraki pour définir les priorités.
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Quelles sont les priorités ?
Elles sont pratiquement liées à l’amélioration de la vie des citoyens en réalisant les réseaux d’assainissement, pour lutter contre les maladies transmissibles, l’AEP, l’éclairage public, le gaz et l’électricité. Ce sont des priorités majeures, comme les cantines et le transport scolaires, les salles de sport. Au niveau de l’APC de Sidi Moussa, nous avons identifié les besoins et nous avons proposé l’ouverture d’une cantine scolaire et l'amélioration de la scolarisation des élèves.
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Qu’en est-il des projets d’assainissement ?
Nous avons entamé des projets dans 19 zones d’ombre dont certains ont été lancés en juillet dernier et d'autres sont achevés dans certains haouchs. Les travaux d’AEP sont avancés et d’autres projets seront lancés, et la procédure est bien avancée. Deux projets sont inscrits dans le cadre du plan du budget communal de Sidi Moussa. Le budget est très limité, mais nous envisageons l’implantation d’une cantine scolaire au village Chahid Si Belaid. L’appel d’offres a été lancé et l’entrepreneur retenu et les travaux seront lancés dans quelques semaines. Nous allons également lancer les travaux de la voirie à haouch Mansouri.
Quelles sont les difficultés qui entravent le développement local ?
Les APC assurent le rôle d’accompagnateur selon l’option retenue par la wilaya. 99% des projets ont été inscrits à l’indicatif de la circonscription administrative de Baraki qui assure le lancement des travaux et le suivi. La difficulté majeure est la lenteur de la procédure administrative. Le code des marchés publics impose des procédures lourdes pour passer de l’état de l’inscription au programme à la réalisation. Le lancement d’un grand programme nécessite des ressources humaines. En dépit de ces difficultés, nous avons pu avancer dans la mise en œuvre des projets en étroite collaboration avec la population. Nous avons accordé plusieurs agréments à des associations et comités de quartiers et des haouchs qui accompagnent les responsables locaux et les entreprises chargées de la réalisation des projets.
N. B.
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Hassan Kacimi, cadre supérieur au ministère de l’Intérieur
«Le Président Tebboune a consacré le concept de la justice sociale»
Hassan Kacimi, cadre supérieur au ministère de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’aménagement du territoire, expert des flux migratoires, de la sécurité dans le Sahel et de la gestion des crises, livre sa réflexion sur quelques axes principaux de la thématique des zones d’ombre. C’est le concept de justice sociale que le président de la République vient de consacrer, en réduisant les espaces des territoires de la République qui ont été marginalisés pendant des décennies, soutient-il.
Entretien réalisé par N. B.
El Moudjahid : Comment peut-on définir une zone d’ombre ? Est-ce qu’il s’agit de zones enclavées, défavorisées et isolées ?
Hassan Kacimi : Les zones d’ombre ont été définies par le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune. Ce sont celles qui répondent à trois critères, à savoir celles dépourvues du minimum vital : l’eau, l’électricité et la route.
Le transport, la santé, le gaz et l’éducation sont aussi des exigences auxquelles le Président accorde beaucoup d’importance.
Le Président de la République a exprimé son mécontentement vis-à-vis de l'action des walis.
Le retard est-il imputable uniquement aux walis ?
Derrière le retard dans la réalisation du programme du président de la république, il y a plusieurs raisons cumulées qui expliquent de tels dysfonctionnements. Durant la maladie du Président, nous avons assisté pendant deux mois à un relâchement de l’activité gouvernementale.
Le Président est intervenu durant sa convalescence pour rappeler à certains ministres la nécessité de mettre en œuvre sa feuille de route, notamment dans les zones d’ombre, le transport scolaire et les cantines scolaires qui doivent servir des repas chauds. Le secteur de l’intérieur ne s’est pas suffisamment impliqué dans la réalisation du programme du Président de la République.
Cela s’est traduit sur le terrain par le peu d’engouement manifesté par plusieurs walis qui n’ont pas réalisé la feuille de route du Président. On a relevé aussi une insuffisance dans l’animation et la coordination gouvernementale durant toute l’absence du Président de la République. Si des évaluations avaient été faites au moment opportun, de tels dysfonctionnements auraient pu être évités.
Il est impératif de doter le gouvernement d’une institution de planification, pour éviter que 8,5 millions d’Algériens, soit presque un quart de la population, soient tenus à l’écart du développement local, qui connaît des déséquilibres préoccupants, générant de forts ressentiments de la population à l’égard des pouvoirs publics. C’est pourquoi le président de la République tient à réparer au plus vite ces injustices.
Le développement des zones d’ombre va-t-il permettre de rétablir la confiance avec les pouvoirs publics et renforcer le front interne ?
Le dossier des zones d’ombre est un concept nouveau en matière de développement local.
Le Président de la République est un expert de la gestion des collectivités locales et c’est grâce à son expertise qu’il a pu mettre en évidence les déséquilibres criants constatés en matière de développement local. C’est la première fois depuis l’indépendance qu’un Président de la République parle de zone d’ombre et l’inscrit dans son programme d’action comme un dossier prioritaire et d’intérêt national. Le chargé de mission auprès du président de la République, Brahim Merad, est un ancien Wali chevronné qui s’implique directement sur le terrain pour réaliser la feuille de route du Président.
Cependant, il est malheureux de constater, sur le terrain, des réticences notables au changement, et cela nécessite des mesures urgentes pour corriger de tels dysfonctionnements. La mise à niveau, en matière de développement local, doit permettre à 8,5 millions d’Algériens de vivre dans la dignité.
C’est le concept de justice sociale que le Président de la République vient de consacrer, en réduisant les espaces des territoires de la République qui ont été marginalisés pendant des décennies. Le retour de l’Etat au niveau de tous les espaces des territoires de la République est une exigence, liée fondamentalement à notre sécurité nationale, dont le front intérieur se trouve ainsi renforcé et consolidé.
N. B.
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Brahim Merad, chargé de mission auprès de la présidence de la République du suivi des zones d’ombre pour le retour aux instruments
d’aménagement du territoire
Avec la mobilisation d’une enveloppe de 110 milliards de DA pour le développement des zones d'ombre dans le cadre de la loi de finances 2021, les contraintes financières qui bloquaient la réalisation de plusieurs projets sont levées. Le chargé de mission auprès la présidence de la République du suivi des zones d’ombre, Brahim Merad, assure que «l’année 2021 sera une année des zones d’ombre par excellence».
M. Merad a fait part de «la mobilisation d'une enveloppe financière consacrée au développement des zones d'ombre au niveau national dans le cadre de la loi de finances 2021, laquelle comprend 50 milliards DA au titre des plans communaux de développement, 20 milliards DA pour les projets d'amélioration urbaine et 40 milliards DA pour l'aménagement des routes dans le cadre du programme du ministère des Travaux publics».
Globalement, l’objectif principal a été atteint en dépit des difficultés financières l’année dernière. «Nous avons pu atténuer la mal vie des populations dans plusieurs localités suite à la réalisation de nombreux projets, ce qui a permis de rétablir la confiance de la population en ses administrateurs. Le citoyen a constaté sur le terrain la mise en œuvre des engagements du Président et qu’il ne s’agit pas de fausses promesses. Résultat : il adhère de plus en plus à ce programme», relève-t-il.
M. Merad a mis en exergue la décision du Président à mettre les responsables locaux, à savoir les walis, à l’épreuve, afin de trouver les ressources pour le financement des projets recensés, de réorienter les budgets des projets en souffrance de lancement, d’assainir la nomenclature, d’engager des reliquats et de puiser dans certains fonds pour la réalisation des opérations inscrites, le but étant de renforcer la capacité d’initiative des acteurs locaux à puiser dans les ressources de leur territoire pour satisfaire leurs besoins et leurs attentes, soutient-il. A travers cette décision, l’action de développement sera une responsabilité partagée entre les pouvoirs publics et les différents acteurs locaux. Le citoyen a participé avec les APC aux projets locaux de développement à travers la société civile. M. Merad a affirmé que la priorité a été accordée aux projets à caractère urgent. En ce sens, il a plaidé pour «le retour aux instruments d’aménagement du territoire déclinés dans le schéma national d’aménagement du territoire, le Plan aménagement wilaya et de planification urbaine (SRAT). Ces actions devraient impliquer tous les secteurs du territoire dans le cadre d’une vision globale qui rompt avec les approches sectorielles qui ont caractérisé par le passé les politiques de développement rural.
Pour un SMIG social national
Le responsable estime qu’il y a lieu de mettre en place un programme d’aménagement du territoire à travers l’accompagnement du développement économique des territoires et la réduction des inégalités spatiales en termes économiques ou sociaux. Un avis partagé par plusieurs chercheurs et experts. «Avec des spécificités au niveau géographique, économique et social, il est primordial de prendre en compte cette diversité et de l’associer aux préoccupations des populations locales dans la démarche de développement en suivant le modèle territorial qui consiste en la valorisation des ressources propres à chaque territoire et la participation des acteurs locaux dans les dynamiques de développement de leur territoire», assure Abdelkader Benyamina, expert foncier. Le schéma national d’aménagement du territoire est un enjeu national touchant tous les secteurs. Il a relevé que le SNAT a connu un gel retardant l’absorption des différents équilibres, lésant une certaine partie de la population, d’où l’émergence en force des zones d’ombre qui représentent 20% de la population actuelle et touchent 87% des communes.
L’expert a insisté sur le «déclenchement d’une machine économique viable, en donnant priorité aux zones d’ombre pour ainsi retenir un SMIG social national». Pour le chercheur Abdelkader Benhadjouja, l’Algérie a un grand besoin d’impulsion de la mise en œuvre de ses instruments d’aménagement du territoire développés par la loi portant SNAT, car elle est confrontée à une série de défis et d’enjeux qui vont s’amplifier au cours des prochaines décennies.
Ainsi, le pays va devoir affronter une situation exceptionnellement faite d’exigences différentes, mais convergentes dans le temps. Il a cité la persistance structurelle dans la concentration et la répartition territoriale de la population et des activités de 63% de la population dans le Nord et les grandes villes du littoral, 28% sur les Hauts Plateaux, 9% dans le Sud, accentuée par la vulnérabilité de nombreux territoires en marge du développement constitués par les zones d’ombre et le défi de la création de plus d’emplois pour les jeunes en rapport avec les perspectives démographiques. «Il s’agit d’adopter des approches multisectorielles qui intègrent différents secteurs d’activités» pour qui l’accent est à mettre sur des politiques de développement territorial, plaide-t-il. Des recommandations à prendre en considération pour réussir le programme et encourager la tendance d’exode vers le monde rural comme escompté par les pouvoirs publics, estime M. Merad.
N. B.
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Politiques de développement rural
2021, l’année des zones d’ombre par excellence
Des chiffres à retenir
32.700 projets arrêtés au profit des 15.044 zones d’ombre au niveau national, soit une population de 8 millions d’habitants
13.785 zones d’ombre recensées comme régions prioritaires
13.342 projets financés d’un montant de 193 milliards de DA
8.352 projets réceptionnés d’un montant de 93 milliards de DA
Les réalisations en chiffres
Selon un bilan chiffré présenté lors d'une journée d'étude en février par le chargé de mission auprès la présidence de la République, du suivi des zones d’ombre, Brahim Merad, il s’agit de la réalisation de 600 km de réseau d'éclairage public et de la réhabilitation de 253 km, un effort considérable, souligne-t-il, tout en félicitant l’engagement de Sonelgaz. En outre, il a été procédé à la réalisation de 20 55 km de réseau et du raccordement de plus de 56 000 foyers en gaz, au profit de près de 284 000 habitants. Outre le renforcement du réseau routier par la réalisation de 1323 km, il y a la réhabilitation de plus de 2800 km et l'ouverture de 884 km de voies dans des zones isolées. Dans le secteur de l’éducation, le bilan fait état de la réalisation de 375 classes et 84 cantines scolaires et la réhabilitation de 298 écoles et 51 restaurants, outre le renforcement du parc de transport scolaire par 471 nouveaux bus et 515 bus loués en sus de 225 espaces de loisirs réalisés, dont des stades de proximité. Le rapport souligne que le réseau de l'eau a été renforcé par la réalisation de 2700 km de réseaux, de la réhabilitation de 495 km et du raccordement au réseau d'eau de plus de 173 000 foyers au profit de près de 870 000 habitants. Un nouveau réseau d'assainissement de 1100 km a été réhabilité et plus de 79 000 foyers raccordés au profit de près de 398 000 habitants. Par ailleurs, un nouveau réseau électrique de 2180 km a été réalisé, et plus de 33 000 foyers raccordés au profit de près de 166 000 habitants, en sus de l'équipement de 2531 logements de 860 panneaux solaires fabriqués en Algérie, relève M. Merad. Dans le secteur de la santé, 32 salles de soins ont été réalisées, outre la réhabilitation de 175 autres salles. Dans ce cadre, le chargé de mission a proposé la formation des jeunes des zones enclavées dans le paramédical, pour assurer les premiers soins sur place.
N. B.
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ANP et Protection civile
Assistance médicale
Le Haut Commandement de l’ANP organise des caravanes médicales à travers plusieurs wilayas dans les zones d’ombre. «Les caravanes visent à satisfaire les besoins de la population des zones d'ombre en santé, et à désenclaver les zones isolées et montagneuses, tout en améliorant la prise en charge médicale», indique le MDN. Des consultations médicales généralistes et spécialisées ont été assurées aux habitants de ces localités par un staff de médecins militaires. «L’objectif de l’initiative lancée en application des instructions de l’état-major de l’ANP est de rapprocher l’Armée des citoyens et leur offrir des soins en ces temps d’hiver froids», précise le MDN. Selon la même source, l’initiative sera poursuivie le long de l’année. Les cas nécessitant un suivi par des spécialistes ont été recensés en vue d’une prise en charge par les caravanes spécialisées qui seront prochainement dépêchées dans ces régions, selon la même source. En outre, des campagnes de vaccination contre la grippe saisonnière et le dépistage du Coronavirus (Covid-19) ont été organisées par l’ANP au profit des habitants des zones enclavées dans différentes régions du pays. Ces actions qui se poursuivent ont été marquées par l’utilisation de tests rapides au profit des habitants des zones enclavées. Des équipes médicales, dont des médecins et infirmiers relevant des services de santé militaires, dotées de tous les moyens, sont mobilisées pour cette mission humanitaire, en plus de la sensibilisation des citoyens sur les dangers de ce virus mortel et des méthodes de prévention. Des détachements de l'ANP sont également mobilisés lors des intempéries pour rouvrir les routes bloquées et les zones touchées par les chutes de neige, désenclaver les zones touchées par ces intempéries et prêter assistance aux populations. En outre, la Direction générale de la Protection civile (DGPC) a organisé des caravanes médicales à destination des zones d’ombre et des régions frontalières «pour assurer des consultations médicales gratuites au profit des populations de ces régions», explique-t-on à la DGPC.
Ces caravanes sont inscrites au titre du programme de solidarité de la PC, prévoyant une contribution à la prise en charge médicale des populations des zones d’ombre et reculées. Elles visent à assurer des consultations médicales gratuites et à remettre des produits médicamenteux aux citoyens de ces zones, notamment aux enfants, aux personnes âgées et aux malades chroniques.
Neila B.