Lors du Festival international du film d’Alger, Mehdi Dilmi, directeur des relations internationales de l’Office national des droits d’auteur et droits voisins (ONDA), a apporté un éclairage sur les données qui transforment aujourd’hui les droits d’auteur et la propriété intellectuelle.
Selon Mehdi Dilmi, le droit d’auteur est souvent perçu comme un ensemble de règles juridiques, à savoir contrats, obligations, formalités. Cependant, le droit d’auteur s’inscrit dans un cadre beaucoup plus large, celui de la valorisation des actifs de propriété intellectuelle. «Écrire un scénario, par exemple, implique non seulement un droit moral, garantissant la paternité de l’œuvre, mais aussi un droit patrimonial, permettant d’en tirer des revenus. Les expertises autour du droit d’auteur deviennent alors autant juridiques qu’économiques et stratégiques».
L’intervenant souligne qu’à l’ONDA le débat est élargi à la géopolitique du droit d’auteur et de souveraineté culturelle.
Pour illustrer ces enjeux, il évoque une conférence récente consacrée au piratage de logiciels dans le secteur de l’architecture. De nombreux professionnels se plaignent que la concurrence soit faussée par l’utilisation de logiciels piratés. «Un architecte qui paie légalement un abonnement de 2 000 dollars par an répercute ce coût dans ses factures. Celui qui utilise une version piratée crée un déséquilibre économique et technique, et compromet parfois la qualité même du projet», explique-t-il.
L’intervenant rappelle que l’Algérie est classée dans une zone sensible en matière de droits d’auteur, notamment parce que le piratage y est largement toléré.
Il pointe du doigt les chaînes de télévision privées qui diffusent régulièrement des films sans disposer des licences nécessaires. «Les chaînes privées diffusent des films sans licences et ne se rendent pas compte que le monde les voit.»
Mehdi Dilmi évoque également une étude nationale inédite sur la valeur économique du cinéma en Algérie. Première du genre en Afrique et dans le monde arabe, elle établit des liens précis entre droits d’auteur et et la valeur économique du cinéma.
«Le droit d’auteur et la propriété intellectuelle s’intègrent pleinement dans cette réflexion. En intégrant la dimension économique dans le cheminement du cinéma, nous pouvons structurer toute la chaîne de valeur», affirme-t-il.
Dans le cadre de cette même étude, les experts ont tenté de recenser la musique algerienne disponible sur les plateformes numériques comme YouTube et Spotify.
Selon les données collectées, cette présence en ligne génère à elle seule 26 millions de dollars par an. Certains artistes algériens atteignent même jusqu’à un million de dollars de revenus annuels.
Mais la question des droits d’auteur devient plus complexe encore lorsque les artistes sont décédés : leurs héritiers ne perçoivent en moyenne que 20 000 dollars par an, malgré le poids économique considérable de leurs œuvres.
Le débat autour des droits d’auteur et de la propriété intellectuelle au cœur du Festival international du film d’Alger révèle l’urgence d’une prise de conscience nationale. Les pratiques de piratage freinent la professionnalisation des secteurs culturels et affaiblissent leur valeur économique réelle.