Victimes expiatoires

Peu importe leurs noms, leurs origines. Ils ne connaissent que le fracas des bombes, le staccato des mitraillettes, le froid des tentes insalubres et l’absence pesante d’un père ou d’une mère disparu dans la tourmente et le chaos. En temps de guerre, l’enfance devient une douloureuse tragédie. Le cas des enfants de Ghaza est un exemple qui renseigne — non sans amertume — sur toute l’ampleur de la furie sioniste. Durant notre lutte de Libération, de nombreux enfants n’ont pas échappé à la souffrance et à toutes sortes de maux. Ils ont été à la fois témoins, victimes et acteurs d’une héroïque lutte de Libération. Durant la colonisation, la situation des enfants algériens était marquée par une profonde inégalité, faite d’une discrimination flagrante : scolarisation limitée, pauvreté généralisée, manque d'accès aux soins, etc. Les enfants ont été exposés aux bombardements, aux arrestations arbitraires, aux déplacements forcés. Beaucoup ont perdu leurs parents, tués ou emprisonnés. Dans les campagnes, notamment dans les régions de Kabylie, des Aurès ou du Constantinois, les enfants ont souffert de la répression. Des villages entiers ont été rasés, des familles déplacées vers des camps de regroupement, où les conditions de vie étaient précaires : malnutrition, maladies… Des écoles ont été fermées ou détruites. Cependant, dans les maquis, des écoles ont vu le jour, où les enfants apprenaient non seulement à lire et à écrire, mais aussi à connaître leur culture. Après l’indépendance, ces enfants devenus adultes ont dû reconstruire leur vie dans une société marquée par la mémoire douloureuse de la colonisation. L’histoire se répète. Aujourd’hui, dans les zones de guerre, les enfants vivent un cauchemar : conflits armés, déplacements forcés, violences, perte de proches, bombardements, mines antipersonnel, tirs croisés… Nombreux sont ceux qui perdent la vie ou sont handicapés pour le restant de leur existence. La guerre bouleverse leur quotidien et met en péril leur avenir. Comble d’infortune, leur souffrance reste souvent en marge des débats internationaux. Ils grandissent trop vite ou pas du tout. Ils apprennent à courir avant d’apprendre à lire. Leur vécu est rythmé par les hurlements des sirènes, les cris de détresse. Fatalement, ils perdent leur innocence et leur réintégration dans la société reste un défi majeur. Des traités internationaux, comme la Convention relative aux droits de l’enfant ou les protocoles de Genève, garantissent des protections spéciales aux enfants en période de conflit. Toutefois, leur application reste inégale, et les violations sont rarement réprimées. Des ONG se battent, des traités sont signés. Mais, trop souvent, les promesses demeurent lettre morte. Les atteintes aux droits de l’enfant en période de conflit sont documentées, dénoncées… mais rarement sanctionnées.

M. B.

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