Riposte aux nouvelles formes de cybercriminalité : L’ANP mobilisée face aux nouvelles menaces

Les réseaux sociaux sont devenus un «fief» de la criminalité. Le phénomène de la cybercriminalité a pris de l’ampleur, selon les statistiques des services de sécurité. La spécificité de cette croissance se caractérise par la dominance des affaires d’atteinte à la stabilité nationale.

En effet, de fausses pages sont apparues sur les réseaux sociaux, avec pour cibles... l'Algérie et ses institutions, en diffusant de fausses informations. Le chef d’état-major de l’ANP, le général de corps d’armée Saïd Chanegriha, a évoqué récemment, lors d’un séminaire sur la cybercriminalité, de «nombreuses cyber-attaques ayant ciblé des sites étatiques et d’autres appartenant à des institutions économiques vitales et stratégiques». Pour le chef d’état-major de l’ANP, de telles attaques sont bien réelles et prennent différentes formes; allant de la diffusion de fausses informations à la promotion d’idées subversives. Face à cette nouvelle menace, la lutte contre la cybercriminalité est devenue une bataille quotidienne du commandement de l’ANP et de la DGSN.

La cyber-guerre, une réalité et une menace sérieuses

Les chiffres démontrent cette croissance. La cybercriminalité a enregistré un pic durant l’année 2020, passant de 18 affaires en 2008 à 102 en 2013 et 1.652 en 2019, pour atteindre plus de 7.000 affaires traitées par la police et la gendarmerie nationale en 2020. En outre, des affaires qualitatives liées essentiellement à l’instigation via des applications et les réseaux sociaux, à travers la diffusion d’intox à même de «porter atteinte à l’intérêt national, inciter au rassemblement ou porter atteinte à l’ordre et à la sécurité publics» ont été traitées par les cyber-policiers durant les deux derniers mois de l’année en cours.
Le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Ammar Belhimer, a assuré que les menaces cybernétiques s’accentuaient à l’approche de «chaque étape cruciale dans le processus de l’Algérie nouvelle», à savoir la tenue des élections législatives, le 12 juin prochain. Le ministre a déclaré aussi que «l’Algérie est la cible d’une guerre électronique», «à travers la manipulation, le lavage de cerveaux et l’incitation des jeunes à la violence et à la division des Algériens».
De son côté, l’ancien ambassadeur Noureddine Djoudi a averti : «L'Algérie est sérieusement menacée par la guerre dite de 4e génération, conçue sous deux axes : les nouvelles technologies et les conspirations visant le front interne.» Intervenant dans une émission diffusée par la télévision nationale, le politologue Abdelkader Soufi a mis en garde : «Nous sommes en guerre. C’est le prolongement de la 4e génération en Irak.»
En effet, il ne s’agit plus des affaires «classiques» de cybercriminalité, à l’instar de l’escroquerie en ligne ou de la diffamation et du chantage, mais des infractions visant la sécurité et la stabilité du pays qui ont connu une évolution croissante ces deux dernières années. Les unités spécialisées de la GN ont traité 1.326 affaires en 2020, soit une hausse de 62% par rapport à l’année 2019 qui a enregistré 843 affaires. Parmi les affaires traitées, 189 sont liées aux atteintes à la sécurité publique et 49 autres atteintes aux règles de l’ordre général. Les enquêtes se sont soldées par l’identification et l’arrestation de 1.028 personnes; en hausse de 59% par rapport à l’année 2019.
Du côté de la police, 5.163 crimes et délits ont été enregistrés l’année dernière par les cyber-policiers, dont des attaques visant les systèmes informatiques, arnaques, propagande subversive et le cyber-terrorisme, mais aussi des programmes d’espionnage.

L’Algérie victime aussi du cyber-espionnage

Un rapport du service central de lutte contre les crimes liés aux technologies de l'information et de la communication de la DGSN relève que «l'Algérie a été parmi les premiers pays ciblés, à travers des programmes malicieux et des messages électroniques fictifs ou des programmes ou sites web piégeurs». Selon une étude de ce service, le taux de diffusion de fake-news a augmenté de 14% depuis l'apparition du Coronavirus (Covid-19) en Algérie.
Pour y faire face, la lutte contre ce fléau a été accentuée et intensifiée ces derniers mois en vue de sévir contre les cybercriminels et ce, par souci de protéger la sécurité et la stabilité. La coordination sécuritaire est de mise. «Elle a été consolidée. Il y a une prise de conscience des nouveaux défis, notamment de cette nouvelle menace», assure-t-on.
Les services de sécurité ont opté pour le renforcement des systèmes de protection, le travail de renseignement et la sensibilisation sur la nécessité d'être vigilant vis-à-vis des pages suspectes. Les patrouilles ont été également multipliées pour traquer les criminels dans l’espace virtuel. «Toutefois, toutes ces mesures ne pourraient être pleinement efficaces si elles n’étaient pas soutenues par une solidarité réelle et effective de l’ensemble des forces vives de notre peuple», soutient l’ancien ambassadeur Noureddine Djoudi.
Pour rappel, en mois de février 2020, le décret présidentiel portant mise en place d'un dispositif national de la sécurité des Systèmes d'information a été publié récemment dans le journal officiel. Il prévoit, notamment, l'élaboration d'une stratégie nationale en la matière, incluant des investigations numériques en cas d'attaques cybernétiques ciblant les institutions nationales.
D’ailleurs, une agence de la sécurité des systèmes d’information a été créée pour, notamment, «opérer des investigations numériques en cas d’attaques cybernétiques ciblant les institutions nationales».
L'Agence est, également, chargée de «préparer et de soumettre» au conseil les éléments de la stratégie nationale en matière de sécurité des Systèmes d'information, de «coordonner» la mise en œuvre de cette stratégie, d'«opérer des investigations numériques» en cas d'attaques cybernétiques ciblant les institutions nationales, de même que de «veiller à la collecte, à l'analyse et à l'évaluation des données liées au domaine de la sécurité des Systèmes d'information».
La menace est réelle, voire sérieuse, chose qui nécessite une prise de conscience citoyenne.
N. Benrahal

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