«L’Algérie, qui développe et consolide ses traités d'amitié, de voisinage et de coopération, ainsi que ses partenariats stratégiques avec les pays du bassin méditerranéen, s’érige progressivement en tant que hub géoéconomique à triple leviers, énergétique, minier et agricole», a affirmé, à El Moudjahid, l’expert Arselan Chikhaoui, spécialiste des questions géopolitiques et géoéconomiques. «Le président de la République Abdelmadjid Tebboune a réaffirmé à maintes reprises l'appartenance de l'Algérie à son espace naturel qu'est la Méditerranée, avec sa profondeur stratégique africaine. Avec sa prochaine adhésion aux Brics, l’Algérie s’érigera incontestablement en interface stratégique en Méditerranée occidentale», a-t-il préconisé.
Selon notre interlocuteur, l'importance de la Méditerranée est illustrée par le fait qu’elle représente 30% du produit marin brut mondial, même si elle constitue moins de 1% de l'océan mondial. «Il est, ainsi, admis que les industries de l'économie bleue continueront de soutenir la croissance des autres secteurs d'activité économique de la région, à la fois en termes de valeur ajoutée et d'emploi. Cela fait partie d'une mégatendance mondiale qui est mise en relief par l'OCDE dans son récent rapport «The Ocean Economy in 2030», a-t-il expliqué. Les opportunités devant permettre à l’Algérie d’en tirer profit sont aussi multiples que variées. En la matière, le Dr Chikhaoui a cité, entre autres, les hydrocarbures extracôtiers (offshore), le tourisme maritime et côtier, le commerce maritime, les équipements maritimes et les ports, la pêche et l'aquaculture, autant de domaines d’activités qu’il a qualifié de «principaux moteurs de cette tendance». «Avec ses 46.000 km de côtes et ses ressources sous-marines uniques, la Méditerranée représente la cinquième économie de la région en termes de PIB», a-t-il poursuivi, mettant l’accent sur le fait que la croissance bleue constitue cette source inépuisable de richesses. «Les activités liées aux océans en Méditerranée génèreraient une valeur économique annuelle de plus de 500 milliards d'USD», a-t-il fait savoir, en se référant aux conclusions d’un rapport élaboré par le Boston Consulting Group (BCG).
Enjeux stratégiques
«Les bouleversements récurrents sociopolitiques que subit la région Méditerranée et MENA ont pour finalité d'avoir un contrôle sur les réserves naturelles énergétiques et hydriques, ainsi que les terres rares (minerai rare nécessaire au développement technologique), pour assurer, durant les prochaines cinq décennies, une stabilité et une sécurité des populations des pays du Nord, dont les exigences de consommation seront en croissance exponentielle et surtout maintenir leurs exigences de confort», a analysé en outre l’expert. Selon lui, la crainte des pays du Nord est que leur sécurité nationale soit menacée par des phénomènes de turbulences sociales.
Il considère en outre que «l’'intérêt stratégique des pays occidentaux (USA et les puissances de l'UE) est de ne pas laisser la Chine s'approprier toutes ces ressources». Mettant en exergue le fait que la Chine contribuera incontestablement au renouvellement et au développement des infrastructures dans la région de la Méditerranée, lesquelles seront en partie entraînées par des investissements massifs et la demande croissante en provenance des pays BRICS et du CCG (Conseil de coopération du Golf), il a estimé que dans cette perspective, «les entreprises d'Afrique du Nord, plus particulièrement celles de l’Algérie, seront au centre du développement de nouveaux liens régionaux». «Le concept du smart power, qui se définit par l'habileté et l'intelligence à faire résonner le partenariat au bon moment avec les bonnes informations et le bon réseau, est, présentement, de mise pour combler le déficit de capacités et de compétences entre les régions du Nord et du Sud, qui bordent cet espace d'échanges multiformes, en contribuant au développement d'une croissance bleue exponentielle et durable», a conclu notre interlocuteur.
Karim Aoudia