Mustapha Bourekhis, membre de la commission nationale d’homologation des manuels, à El Moudjahid : «Inscrire le manuel dans une cohérence scientifique»

Membre de la commission nationale d'homologation des manuels au niveau de l'Institut national de recherche en éducation (INRE), également maître de conférences «A» en didactique du français à l'université Sétif-2 et chef de projet de recherche (PRFU) portant sur le référentiel des compétences professionnelles de l'enseignant universitaire, Mustapha Bourekhis estime que la démocratisation de l’école doit porter sur une gestion qui répond aux normes qualitatives. Aux yeux du chercheur en didactique, l'école est le lieu de l’apprentissage et de la formation à la citoyenneté.

Entretien réalisé par Tahar Kaidi

El Moudjahid : Par quelles normes pédagogiques et scientifiques peut-on évaluer la qualité des manuels scolaires ?
Mustapha Bourekhis : Le manuel scolaire est un outil pédagogique important, accompagnant l’apprenant tout au long du processus de l’enseignement-apprentissage.
Il doit s’ancrer, non seulement dans le paradigme des pratiques de classe et de transmission de savoirs, de savoir-faire et de savoir-être, mais, surtout, dans le processus sociocognitif de l’apprenant, quitte à le rendre un citoyen actif au sein de sa communauté.
Partant de là, le manuel scolaire est appelé à répondre aux besoins des apprenants et aux attentes des enseignants. Cela dit, plusieurs paramètres scientifiques et pédagogiques entrent en jeu, lors de la conception du produit.
Il s’agit, pour le premier critère, d’inscrire le manuel dans une cohérence scientifique de manière à ce qu’il traduise les grandes lignes du programme auquel il est censé se conformer, en veillant à ce qu’il soit exempt de toute erreur, quelle que soit sa nature. Le volet pédagogique, quant à lui, a trait à la présentation d’une progression claire dont l’objectif est de montrer réellement que l’apprenant progresse. Cela ne saurait se réaliser que si les leçons sont complètes et se complètent entre elles, dans un esprit de cohérence et de structuration. Au chevet de toute l’opération de conception des manuels scolaires, parascolaires, annaux et autres, veillent deux commissions rattachées directement à l’Institut national de recherche en éducation. La commission de validation des manuels scolaires et la commission de son homologation. À l’heure où l’on est, ces commissions, créées en février 2021(JORADP du 3 février 2021.N° 08), se penchent, dans une première phase, à élaborer et à parapher des cahiers des charges relatifs à tout le matériel pédagogique.

Quel est, selon vous, l’impact de l’environnement social sur la qualité de l’enseignement ?
Selon la loi d’orientation de 1974, puis celle de 2008, l’accès à l’école est obligatoire et gratuit pour tout enfant âgé, au plus, de six ans. La question de la démocratisation de l’école doit porter sur la gestion de cette infrastructure, de manière à ce que l’école réponde aux normes qualitatives. Depuis l’an 2000, l’école est guidée par l’environnement social qui lui est immédiat. Cet environnement impose, désormais, ses lois, ses rituels et ses règles sur la composante humaine écolière et crée un nouvel esprit de dominance dans lequel l’élève ne joue plus aucun rôle. C’est cet état d’esprit qui a amplifié le taux de l’échec et de la déperdition scolaires. Cela va de soi de dire que le système éducatif algérien tâtonne et peine à trouver la panacée vers l’éducation, l’apprentissage et la formation à la citoyenneté et à la sociabilité de l’écolier.

D’aucuns affirment que la crise sanitaire a révélé l’immense écart entre les rythmes des évolutions numériques et le niveau de maîtrise des nouvelles TIC dans les pratiques pédagogiques…
La pandémie de la Covid-19 en contexte algérien a montré les limites de notre système éducatif qui a été négativement impacté. En réalité, nous avons assisté à une régression épouvantable au niveau des rythmes d’apprentissage et de l’installation des compétences visées, au niveau des trois paliers de l’enseignement et dont les ramifications ont atteint l’enseignement supérieur.
En tout cas, nous signalons le grand retard au niveau de l’acquisition de la compétence technico-pédagogique.
Les pratiques pédagogiques, quant à elles, ont été réduites presque à néant, vu les résultats des évaluations et le degré d’assimilation des contenus. La gestion pédagogique dans ce contexte particulier a fait que les contenus soient condensés, puis dispensés anarchiquement. T. K.

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