
Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Belkacem Zeghmati, a affirmé, mercredi , que l’Algérie a alloué, au cours des dernières décennies, d’énormes ressources financières pour la réalisation des projets de développement économique et social.
Le ministre a indiqué, dans une allocution à l’ouverture d’un séminaire sur la problématique de la maturité des projets et son impact sur les litiges en matière de marchés publics, organisé à l’École supérieure de la magistrature de Koléa, qu’en «dépit de tout ce qui a été réalisé en termes d’infrastructures et programmes, nul ne peut nier que d’énormes sommes d’argent ont été gaspillées et été épuisées au détriment des objectifs fixés».
Ce gaspillage n’a épargné aucune étape des marchés publics, à commencer par la conception et les études de faisabilité, la conclusion des marchés, jusqu’à la réception des projets si ces derniers sont effectivement achevés.
Le ministre a ajouté que les marchés publics sont l’une des principales lacunes à travers lesquelles la corruption et l’exploitation de la Fonction publique ont pris de l’ampleur, pour réaliser des intérêts personnels et illégitimes.
Zeghmati révèle que le phénomène n’aurait pas pris toute cette ampleur sans l’environnement favorable qui se manifeste par la faiblesse des institutions de suivi et de contrôle spécialisées, ainsi que la faiblesse de l’efficacité des mécanismes juridiques et institutionnels permettant de contenir et de traiter ce phénomène pour tarir ses sources. Les phases de maturité des projets étaient confiées à des bureaux d’études privés et des maîtres d’ouvrage d’organismes publics aux capacités techniques limitées et peu expérimentés, une faiblesse accentuée par la pression des organismes publics en charge de l’achèvement des projets.
Le ministre a affirmé, par ailleurs, que le système régissant les marchés publics a connu de nombreuses modifications, notamment au cours des deux dernières décennies, qui l’ont rendu instable.
«Malgré certaines améliorations, il est resté incapable de combler tous les points de faiblesse et de corruption, et de mettre fin au gaspillage de l’argent public, ce qui a encouragé certains pratiques négatives qui ont affecté le statut et la valeur du marché public», dit le ministre.
Il cite, à titre d’exemple, l’inégalité entre les concurrents, la dissimulation d’informations à ceux qui sont capables de réaliser les projets et le recours au caractère de l’urgence pour favoriser un entrepreneur par rapport à un autre, outre la violation du caractère confidentiel des plis, l’exagération dans les conditions d’éligibilité et les exceptions exclusives, ainsi que la publicité dans de petits journaux à lisibilité limitée.
Il est vital de veiller à la maturité des projets d’investissement, compte tenu de son impact sur le déroulement de la réalisation et sa qualité, avant de conclure des marchés publics, dont l’amélioration et le développement du système juridique et du cadre technique, conformément aux normes internationales en vigueur, sont devenus parmi les enjeux que les parties concernées doivent réaliser, d’autant plus que la nouvelle Constitution a distingué les marchés publics avec une attention particulière.
Le ministre ajoute : «Nous aspirons à renforcer le système juridique relatif à ce volet, à travers la mise en place de règles de transparence, de responsabilité juridique, de contrôle et d’application de la loi, ainsi que le développement des mécanismes, pour y contribuer, en attribuant les tâches d’études et de maturité du projet à ceux qui ont des compétences et des cadres honnêtes.»
Il est également nécessaire, selon M. Zeghmati, de procéder à la modernisation de toutes les étapes des marchés publics, en créant des portails électroniques qui assurent la transparence et l’égalité entre tous les concurrents et les producteurs. Pour sa part, la présidente du Conseil d’État, Farida Benyahia, a affirmé que le nombre d’affaires renvoyées au Conseil d’État et aux tribunaux administratifs a connu une augmentation significative qui reflète l’échec dans la réalisation des objectifs pour lesquels les marchés publics ont été créés, notamment le développement de l’économie nationale. «La moyenne annuelle des affaires renvoyées au Conseil d’État est de 52% du nombre total des affaires relatives aux publics».
Il s’avère donc nécessaire de faire le diagnostic des problèmes en toute objectivité et de proposer des solutions constructives à partir d’une réelle appréciation.
À cet égard, le Conseil d’État, qui a un rôle consultatif, peut proposer des solutions et des modifications à la législation.
Salima Ettouahria