
L’Algérie veut reconquérir sa puissance diplomatique dans la région du Sahel, notamment, et tente de reprendre l’initiative au niveau diplomatique après une éclipse, ces dernières années. Les vice-présidents du Conseil présidentiel libyen ont entamé, mercredi matin, une visite officielle de deux jours en Algérie. «L’Algérie qui a renoué avec le lustre de sa diplomatie n’a jamais failli au droit international ni à l'application des décisions onusiennes», a affirmé le Président Abdelmadjid Tebboune, mardi à la chaîne Al Jazeera.
Le dossier libyen a signé le retour de la diplomatie algérienne sur la scène internationale, une diplomatie réputée pour sa neutralité, son efficacité et son engagement, selon des observateurs. La sous-région et la relation avec les pays voisins ont occupé une place importante dans cette interview.
Il faut dire que la diplomatie algérienne a marqué sa présence dans les efforts de règlement de nombreux conflits en Afrique, notamment dans le Sahel, en Libye, au Mali et au Sahara Occidental. Le président s’est engagé dans son discours d’investiture pour la promotion de la politique étrangère basée essentiellement sur le dialogue pour le règlement des conflits et crises régionales.
«L’Algérie est visée depuis longtemps parce qu’elle n’accepte pas les complots contre le monde arabe. L’Algérie est aux côtés des pays opprimés», tel est le message du Président notamment à ceux «qui veulent faire taire la voix de l’Algérie».
La diplomatie algérienne a enregistré des sauts qualificatifs, notamment lors de la dernière session de l'Union africaine, après l'adoption des recommandations de l'Algérie par l'organisation continentale en ce qui concerne la position récente du Conseil de paix et de sécurité de l'UA vis-à-vis du conflit au Sahara occidental.
Une position incontournable
Le Président Tebboune a largement évoqué dans l’interview à El Jazzera les questions régionales et internationales, en mettant en avant le rôle pivot de l’Algérie, présente actuellement sur plusieurs fronts diplomatiques à travers des sommets et rencontres, et qui entend occuper de nouveau sa position de pays incontournable sur le plan régional et international. Il a, en ce sens, rappelé la position de l’Algérie qui a refusé que Tripoli «tombe aux mains des mercenaires». Il a affirmé que l’Algérie était prête à intervenir d’une façon ou d’une autre pour empêcher sa chute. Le message est clair : L’Algérie ne restera pas à l’écart et «hors-jeu» diplomatique. Les frères libyens ont demandé à ce que la réconciliation libyenne se fasse en Algérie, ce qu'a confirmé le chef du gouvernement d'Union nationale en Libye lors de sa dernière visite en Algérie, a rappelé M. Tebboune.
La stabilité de la Libye est une préoccupation majeure de l’Algérie concernée directement par la situation dans ce pays voisin. «Il n’est pas question non plus pour l’Algérie que le règlement de la crise libyenne se fasse sans elle, ou pire, à ses dépens. L’Algérie est le premier pays concerné par la stabilité de la Libye, qu’on le veuille ou non, et nous n’accepterons jamais qu’elle soit écartée des solutions proposées au dossier libyen», avait déclaré M. Tebboune lors de son discours d’investiture.
La décision du Président d’accorder la priorité à ce dossier s’explique par le fait qu’il s’agit de menaces sur la stabilité et la sécurité de la région du Sahel mais particulièrement l’Algérie. Le président l’a souligné à Al Jazeera, précisant que des convois d’armes lourdes circulaient librement en direction du Sahel sans qu’ils soient interceptés.
«De tels actes avaient pour objectif de cerner l'Algérie pour faciliter son infiltration et c'est pourquoi nous œuvrons à renforcer davantage notre armée».
L’Algérie veut contribuer aujourd’hui à remettre sur les rails un plan de règlement politique et pacifique de la crise libyenne. En effet, la position de notre pays consiste en le soutien diplomatique du processus politique, la réconciliation, la réunification des institutions et les élections loin de toute ingérence.
L’ANP, une institution constitutionnelle
En outre, l’Algérie ambitionne de s'imposer comme partenaire économique en Libye. L’ouverture incessamment du poste frontalier de Deb-Deb pour promouvoir les échanges commerciaux entre les deux pays s’inscrit dans cette optique. Dans ce sens, le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, a plaidé pour une étroite coopération entre les opérateurs algériens et libyens pour le développement des énergies renouvelables basé sur le solaire. Le Premier ministre a souligné, dans ce contexte, l’importance de la superficie du désert dont disposent les deux pays pour développer des projets dans les énergies renouvelables. S’agissant de la Palestine, M. Tebboune a réitéré son soutien au peuple palestinien et à son droit à l'autodétermination. Lors d’une entrevue avec des médias nationaux en septembre 2020, le Président avait déclaré que l’Algérie ne participera pas à la «course» à la normalisation avec Israël qui n’a pas permis l’instauration de la paix et s’est avérée inutile. De même pour la question du Sahara occidental. «L’Algérie n’est pas hors la loi, elle réagit dans le respect des décisions de l’ONU. Depuis quatre décennies, le dossier est entre les mains de la commission onusienne de décolonisation». Dans son interview à Al Jazeera, le chef de l’Etat a rendu hommage à l’ANP, assurant que l’armée s’est retirée de la vie politique mais demeure une institution constitutionnelle.
Evoquant la corruption, il a affirmé que le président sortant ne gérait pas et que son état de santé ne lui permettait pas de parler. «L’Etat était sous l’emprise de l’Issaba».
Neila Benrahal