
Tahar Kaidi
Le fonctionnement de la presse algérienne ne se conforme pas à l’austérité des pouvoirs, idéologies, ou groupes d’intérêt en place. Donner écho aux aspirations de la population est le mot d’ordre fédérateur qui alimente les médias.
La sphère médiatique algérienne est en mutation positive, à la faveur de la promulgation d’une nouvelle législation qui organise son fonctionnement, selon une vision d’ensemble, et lui confère sa cohérence et son efficience, dans le cadre d’une approche plus adaptée aux nouvelles réalités. La presse algérienne ne peut qu’évoluer positivement, pour peu que les journalistes puissent réunir, en celle-ci, les pratiques les plus démocratiques, mais aussi les plus saines en matière de professionnalisme. Les journalistes doivent s’unir, non pas dans l’uniformité mais dans la diversité de leurs opinions, pour pouvoir mieux défendre leur noble métier et s’organiser pour la reconquête des terrains perdus à cause de l’émergence des acteurs non professionnels, ayant dénaturé la pratique journalistique.
De la résistance à la reconquête
La réforme du secteur médiatique est illustrée d’abord par les nouveaux textes promulgués, qui s’appuient sur les avancées démocratiques de la révision constitutionnelle de 2020, consolidant les libertés, mais aussi par la mise à niveau technologique que recèle la réalisation du projet de la Cité médiatique «DzayerCity» et par le bond en avant du Data center national, tout en ayant à l’esprit que le facteur humain est celui primordial.
La presse algérienne a de tout temps été partenaire d’un peuple qui lutte pour son indépendance, symbole du dynamisme d’une société civile en émergence, et porte-parole d’un État qui veut rayonner dans le concert des géants. «L’émergence de la presse algérienne populaire et résistante est considérée comme le «baromètre» qui permet d’apprécier l’évolution des sphères politiques, sociales, économiques et culturelles de l’État algérien», explique, en substance, Mouloud Grine, historien et chercheur au centre universitaire de Tipaza. L’historien insiste sur le fait que «la presse algérienne sous la colonisation était le fer de lance d’un peuple résistant et ses journalistes étaient mus d’une croyance inébranlable en la noblesse de leur message». «On sait d’ores et déjà qu’une législation discriminatoire, visant à écraser les plumes hostiles aux manières de faire de l’administration coloniale, fut mise en place, et ce, dès le début de cette période, tandis que la presse française jouissait d’un traitement sans restriction, qui lui garantissait longévité et prospérité», rappelle le Pr Grine. Créé par l’architecte de la Révolution, Abane Ramdane, El Moudjahid, l’organe officiel du FLN, édité Off-shore durant la guerre de Libération, demeure le plus connu et le plus important, en matière de rayonnement intellectuel et de défense de la cause algérienne durant la guerre de Libération, mais également l’organe de défense des intérêts de l’Algérie indépendante post-1962.
L’histoire des médias est également l’histoire d’un processus de consolidation des institutions de l’État. La presse algérienne a donné et donne toujours une image éloquente de sacrifice pour la souveraineté et l’unité du pays. La presse peut jouer un rôle majeur dans l’évolution de notre pays et la défense de ses intérêts, au plan national et international, grâce aux compétences qu’elle recèle, aux expériences qu’elle a pu accumuler et qui remontent, ne l’oublions pas, à la lutte de Libération nationale et aux bonnes volontés qu’elle peut fédérer.
Les NTIC, espoir ou cauchemar ?
Le sociologue des médias, Lakhdar Yedroudj, explique néanmoins que «l’organisation théorique de la presse a été totalement disloquée par l’avènement des nouvelles technologies de l’information» dans la mesure où «la liberté est devenue le pilier de l’échange intercommunautaire et international entre les individus», dit-il. La seule entrave pour la doctrine totalitaire actuellement est celle relative à l’usage de la communication par les groupes sociaux comme moyen pour la résistance aux dépassements et aux atteintes aux libertés de l’homme. Pour l’expert, «la police de la pensée est dépassée par la vitesse de la dissémination des messages, mais elle reste efficace dans la répression et les atteintes à l’homme». Abondant dans le même ordre d’idée, le Pr Redouane Boudjema, de l’université d’Alger-3, précise que le journalisme «n’est pas la communication», mais sa raison d’être réside dans la «recherche» et le «traitement» de l’information.«Le journaliste professionnel fonde son travail sur un principe éprouvé, «contact avec le réel et recul analytique», précise-t-il encore, affirmant que le métier de journaliste «ne peut être confondu avec celui d’attaché de presse ou d’agent de communication ou d’influence».
T. K.