
Alors que les relations entre l’Algérie et l’Union européenne traversent une phase de tension, amplifiée par la décision qualifiée de «hâtive» de la Commission européenne d’engager une procédure d’arbitrage contre Alger, l’Italie se distingue par sa constance, son sens du dialogue et sa volonté de bâtir des passerelles. Premier partenaire européen de l’Algérie, Rome refuse de s’aligner sur une logique de confrontation, et revendique, au contraire, un rôle de trait d’union entre Alger et Bruxelles. Le pays d’Enrico Mattei s’écarte nettement de l’approche adoptée par Bruxelles et s’affirme comme un relais de dialogue et de coopération. «L’Algérie est un partenaire stratégique, et nous œuvrons activement pour rendre ce partenariat toujours plus large, solide et diversifié», a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Antonio Tajani, lors de l’ouverture du forum économique. Dans ce contexte, l’Italie se positionne comme un partenaire lucide, respectueux et constructif. «L’Italie entend servir de pont entre Alger et Bruxelles», a déclaré le ministre italien des Affaires étrangères, soulignant une approche fondée sur la confiance mutuelle, l’harmonie des visions et l’intérêt partagé. Un message clair, qui dépasse le simple positionnement diplomatique, pour s’inscrire dans une fidélité de fond et une tradition de dialogue que Rome revendique. Cette position n’est pas conjoncturelle. Historiquement, l’Italie s’est démarquée par sa constance dans ses relations avec l’Algérie, notamment durant les années 1990, où elle avait refusé de s’aligner sur les politiques d’isolement adoptées par d’autres capitales européennes.
Cette mémoire partagée, doublée d’intérêts stratégiques convergents, conforte aujourd’hui un partenariat politique et économique profondément enraciné. Face à l'ouverture précipitée d'une procédure arbitrale par la direction générale du commerce de la Commission européenne, une démarche jugée prématurée et contraire à l’esprit de partenariat, l’Italie se distingue par une attitude constructive et équilibrée. Alors que le déséquilibre de l'Accord d'association Algérie-UE est désormais reconnu par de nombreuses voix, y compris européennes, Rome privilégie l'apaisement et la recherche de solutions durables, loin de la logique conflictuelle vers laquelle l'UE semble vouloir s’orienter dans ses rapports avec l'Algérie. Cette posture prend tout son sens dans le contexte plus large de l’Accord d’association signé en 2002, entré en vigueur en 2005. L’Algérie estime que cet accord, censé favoriser un partenariat économique équitable, a surtout profité aux exportateurs européens, sans générer de retombées suffisantes pour l’économie algérienne. L’Italie, attentive à ces déséquilibres structurels, défend une révision pragmatique du cadre existant, dans un esprit de concertation et de respect mutuel. Le ministre italien a souligné «l’excellente harmonie et la vision commune» partagées avec son homologue algérien, Ahmed Attaf. Il a réaffirmé, devant les chefs d’entreprise algériens et italiens réunis au Forum, que «deux systèmes politiques œuvrent de concert au renforcement d’un partenariat mutuellement bénéfique, en exploitant toutes les opportunités offertes par une amitié politique et historique». Cette approche contraste avec celle de Bruxelles, dont la décision inattendue a surpris la diplomatie algérienne. Dans une lettre adressée à Mme Kaja Kallas, Haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères, le ministre Ahmed Attaf a exprimé la surprise d'Alger, rappelant que seules deux réunions de consultation avaient eu lieu, et que six des huit points soulevés étaient déjà en voie de règlement. Pour les deux restants, des propositions concrètes avaient été soumises par la partie algérienne, sans réponse formelle. Dans ce climat susceptible de créer une tension durable entre les deux parties, l’attitude italienne prend toute sa portée.
S. B.