
Pour la Protection civile, l’aménagement et l’entretien des forêts doivent être menés périodiquement. L’institution que dirige le colonel Boualem Boughlaf plaide pour une «politique globale d’aménagement et d’entretien de l’espace forestier».
Sur le terrain, des moyens humains et matériels importants sont engagés dans la lutte contre les feux déclarés, mais l’absence de débroussaillage, notamment des abords des routes et des habitations entourées de champs agricoles, accroît le risque de dérapage et le développement de grands incendies. Au mont de Chenoua, à Tipasa, comme aux forêts d’El-Kala à El-Tarf, dont la forêt les Dunes et aussi les monts de Collo à Skikda, les sapeurs-pompiers, ainsi que les forestiers ont trouvé des difficultés dans l’accès aux foyers des feux, en raison notamment de l’absence des pistes et du manque des points d’eau, a-t-on constaté, lors de nos déplacements dans ces lieux. Les accès des massifs forestiers sont délaissés sans aucun entretien et parfois devenus impraticables, témoignent des sapeurs-pompiers rencontrés à Tipasa. Le recours aux interventions par les moyens aériens a limité les dégâts, notamment les pertes humaines dans les zones brûlées, avec la difficulté d’accès des camions anti-incendie. Les sapeurs-pompiers ont mené les opérations en équipes pédestres, munis de pelles et sceaux d’eau de 20 litres faisant plusieurs navettes, certains ayant été même encerclés par les flammes, comme c’était le cas à El- Kala. Malgré les recommandations de la Protection civile depuis l’année 2012, les mesures de prévention font défaut, essentiellement le désherbage et la présence des décharges. «Les herbes sèches ont l'effet d'essence. Les gens n'ont pas conscience qu'une étincelle suffit à ravager des hectares», déplore le chef du bureau de l'information à la Direction générale de la Protection civile, le capitaine Nassim Bernaoui.
Ouverture de nouvelles pistes
L’intervention dans certains massifs forestiers aux moyens roulants est quasiment impossible, d’où la remise en état de nouvelles pistes, ajoute-t-il. Il a également appelé à une prise de conscience de la population. «Les habitants à proximité des forêts ou à l’intérieur des massifs forestiers doivent disposer de citernes afin d’assurer les premières interventions en cas de départ du feu avant l’arrivée des secours de la Protection civile», relève-t-il. «La Protection civile assure prioritairement la protection des zones habitées», assure-t-il. L’aménagement et l’entretien des forêts doivent être réalisés périodiquement, surtout après une saison hivernale marquée par de fortes pluies. «Le désherbage des accotements des routes, des voies ferrées et les lignes qui traversent la forêt est une mesure préventive très importante, ainsi que l’enlèvement du sous-bois et le nettoyage des tranchées pare-feu. Ces actions permettent de maîtriser les incendies», affirme le directeur de la prévention à la DGPC, le colonel Saïd Lahiani. Il a également évoqué le changement climatique dans le monde comme facteur des grands feux, «mais la prévention est de mise». La PC a recommandé d’accroître la mise en place des dispositifs de proximité dans les zones forestières et la réactivation du système d’alerte par le relancement des postes de vigiles, soutient le capitaine Bernaoui. L’officier a évoqué également le problème du manque des points d’eau. «Fort heureusement que les sinistres à Tipasa, à Skikda et à El-Tarf étaient à proximité des plages, ce qui a facilité l’alimentation des hélicoptères en eau de mer pour réaliser des largages, sinon on a eu recours aux bassins des agriculteurs et les quantités ne sont pas suffisantes. Dans les interventions contre les feux, nous sommes soumis au temps pour une intervention rapide et efficace», dit-il, rappelant que les feux de forêts sont classés en Algérie comme risque majeur, en vertu de la loi 04/20. «Plusieurs actions ont été prises suite aux inondations et aux séismes. L’État a investi en matière de prévention de ces deux risques par des constructions dans le respect des règles et autres. Aujourd’hui, il faut revoir la stratégie de gestion de la forêt», insiste-t-il. Les forêts en Algérie sont constituées essentiellement de pins d’Alep, de chêne-liège et d’eucalyptus. Les caractères de cet écosystème donnent à la forêt une vulnérabilité et une fragilité accentuées par une exploitation qui dure depuis des millénaires.
Neila Benrahal