1965 - 2025 : le quotidien El Moudjahid a 60 ans

Ph.:Nesrine.T
Ph.:Nesrine.T

Depuis le premier numéro clandestin en 1956 jusqu’à sa parution officielle du 22 juin 1965, sous l’impulsion du défunt président Houari Boumediène, El Moudjahid n’a jamais cessé de porter la voix de la nation.

Né dans le fracas de la guerre de Libération nationale, El Moudjahid souffle aujourd’hui ses soixante bougies. Plus qu’un simple journal, il incarne une mémoire vivante, témoin de toutes les batailles, de toutes les mutations et de toutes les résiliences de l’Algérie indépendante. Depuis le premier numéro clandestin en 1956 jusqu’à sa parution officielle du 22 juin 1965, sous l’impulsion du défunt président Houari Boumediene, El Moudjahid n’a jamais cessé de porter la voix de la nation. Durant la Révolution, El Moudjahid est la voix du Front de libération nationale, imprimé dans le maquis, avec un seul mot d’ordre : résister. L’objectif est clair : documenter la lutte, exposer les crimes coloniaux, et fédérer les Algériens autour de l’idéal d’indépendance. En ces années de feu, chaque numéro était un acte de foi, un tir nourri de mots dans la guerre des vérités. Après l’indépendance, le journal cesse de paraître quelque temps, laissant place à d’autres publications. Le 22 juin 1965 marque une date charnière : Houari Boumediene, arrivé au pouvoir, relance El Moudjahid en tant qu’instrument de la nouvelle vision politique. C’est le début de l’ère d’El Moudjahid en tant que quotidien d’informations générales. Le président, artisan de l’édification nationale, insuffle une dynamique de transformation profonde. Le journal suit pas à pas les chantiers phares de la jeune République : urgences éducatives, campagnes de scolarisation massive, désenclavement par la route, construction de barrages, électrification rurale… El Moudjahid devient alors le témoin privilégié des grandes réformes, notamment celle de l’industrie industrialisante, pierre angulaire de la souveraineté économique, et la nationalisation des hydrocarbures en 1971, moment de fierté nationale. C’est aussi l’époque de la Révolution agraire, que le journal accompagne pas à pas, en mettant en lumière les efforts de redistribution des terres, de mobilisation paysanne et de développement rural, dans une volonté affirmée de justice sociale. À la mort de Boumediene en 1978, une nouvelle ère s’ouvre. L’Algérie entre dans les années 1980 avec un autre tempo : restructuration des grandes entreprises publiques, réforme du système éducatif, promulgation du Code de la famille en 1984. El Moudjahid poursuit sa mission d’information et de pédagogie, en s’adaptant aux nouvelles orientations. Mais le véritable tournant survient en 1988, avec l’ouverture démocratique. Le paysage médiatique se libéralise, de nouveaux titres privés voient le jour. El Moudjahid, longtemps seul en scène, doit désormais affronter la concurrence, défendre sa place, repenser son rôle. Ce choc du pluralisme n’épargne pas les journaux publics. Beaucoup disparaîtront dans les années suivantes. Mais El Moudjahid, lui, résiste. Durant la décennie noire, il est là, en première ligne, aux côtés des institutions et des citoyens, pour témoigner de l’horreur terroriste, accompagner la lutte pour la survie de la République, porter la parole de la résistance nationale. Il en sort meurtri mais debout. Aujourd’hui encore, dans un écosystème médiatique bousculé par le numérique, les réseaux sociaux et les bouleversements économiques, El Moudjahid maintient le cap. Modernisé, numérisé, enrichi d’analyses et d’enquêtes, il continue d’informer sans céder aux effets de mode. Il incarne une constance, un repère, une voix pondérée dans un monde pressé. 60 ans après, El Moudjahid n’est plus le porte-voix d’un parti, ni un simple journal institutionnel. Il est l’héritier d’un combat, le gardien d’une mémoire, et le témoin lucide d’une Algérie en perpétuelle quête de renouveau. Là où tant d’autres ont disparu, El Moudjahid est toujours là.

El Moudjahid n’est plus le porte-voix d’un parti, ni un simple journal institutionnel. Il est l’héritier d’un combat, le gardien d’une mémoire, et le témoin lucide d’une Algérie en perpétuelle quête de renouveau.

S.B

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