La fusion des deux quotidiens (le Peuple et Alger Républicain) est réalisée. El Moudjahid est né, son premier numéro paraîtra demain mardi 22 juin 1965 ». Ainsi annonçait le quotidien le Peuple dans sa dernière édition datée du 21 juin 1965. «Il s’appellera El Moudjahid», a décrété le défunt président Houari Boumediène, selon un témoignage de Rafik Bey-Bensaci, le premier directeur de la publication naissante El Moudjahid. Ainsi commença la nouvelle aventure médiatique. Le 22 juin 1965, paraîssait le premier numéro d’El Moudjahid en tant que quotidien national post-indépendance. Depuis, il n’a manqué aucun de ses rendez-vous matinaux avec les lecteurs. Journal de combats, journal de convictions, il a accompagné l’histoire de l’Algérie avec rigueur, passion et engagement. Né dans l’élan de la libération, il portait déjà en lui l’idéal d’une presse libre, au service d’une nation qui se relevait des cendres de la colonisation. Ce premier numéro, modestement imprimé mais riche d’espoir, marquait le début d’une aventure éditoriale unique, portée par des plumes courageuses qui voyaient dans chaque article un acte de résistance et de reconstruction. Des premières années de la construction nationale à la Révolution agraire, de la nationalisation des hydrocarbures à l’exploit des Verts en 1982, El Moudjahid a été le témoin actif d’une nation en mouvement. Il a consigné ses élans, ses ruptures et ses espoirs. Chaque édition reflétait les débats d’une société en quête d’identité, des réformes agraires aux grandes mobilisations ouvrières. Les archives du journal regorgent d’éditoriaux vibrants, signés par des plumes qui ont su traduire les aspirations d’un peuple. Mais le journal n’a pas seulement célébré les victoires : il a aussi traversé ses douleurs, payant un lourd tribut lors de la décennie noire. Malgré les attentats et la perte de collègues, El Moudjahid n’a jamais renoncé à sa mission d’informer, devenant, comme de nombreux journaux de l’époque, un symbole de résilience. Quand le peuple s’est levé un certain 22 février 2019, le journal était au rendez-vous, fidèle à sa vocation de relais des aspirations profondes de la société. Ses pages ont vibré au rythme des marches pacifiques, offrant une tribune aux revendications d’une jeunesse exigeante et d’une nation assoiffée de changement. Aujourd’hui, alors qu’il célèbre son jubilé de diamant, El Moudjahid prend le temps de se retourner sur ces soixante années d’histoire partagée, jalonnée de plumes engagées, de pages inoubliables et de voix qui ont façonné la mémoire collective. Des reporters de terrain aux éditorialistes visionnaires, chaque contributeur a laissé une empreinte, faisant du journal un miroir de l’âme algérienne. C’est aussi l’heure de se projeter. Car plus qu’un bilan, cet anniversaire marque une transition. Le journal se tourne résolument vers l’avenir avec la métamorphose de son site web et la naissance d’une plateforme multimédia, repensée pour répondre aux exigences du numérique et de ses lecteurs. Podcasts captivants, formats interactifs, débats comme «Face à la rédaction» : une nouvelle ère commence, où le journal s’adapte aux habitudes des nouvelles générations tout en préservant son ADN. D’autres défis attendent El Moudjahid, dans un paysage médiatique en profonde mutation. La concurrence des réseaux sociaux, l’infodémie et les attentes d’une audience connectée exigent une réinvention constante. Mais sa force est restée la même : une équipe soudée, une ligne claire, une mission essentielle. Informer avec exigence, accompagner les mutations du pays, et porter chaque matin, la voix d’une Algérie vivante, diverse et en devenir. À l’aube de ses 60 ans, El Moudjahid ne se contente pas de regarder en arrière : il trace un chemin, prêt à écrire les prochaines décennies d’une histoire qui lui ressemble, celle d’un peuple uni par ses luttes et ses rêves.
H. Y.
