Malgré une répression féroce et des centaines d'arrestations, notamment lors des événements d'octobre dernier ciblant le collectif «GenZ 212», le régime du Makhzen se trouve confronté à un retour massif et coordonné de la contestation touchant les secteurs de l’Éducation et de la Santé, mais aussi la société civile.
Alors que des manifestations ont été organisées par le secteur de l'Éducation, durant la journée de lundi, suivies hier par celles du secteur de la Santé, la protestation devra culminer, aujourd’hui, mercredi 10 décembre, avec l'appel du Mouvement de la Jeunesse à des manifestations massives, coïncidant symboliquement avec la Journée internationale des droits de l'homme.
Dans le secteur de l'Éducation, des centaines de professeurs se sont rassemblés, lundi à Rabat, pour dénoncer l’«exploitation et l'absence de stabilité», et réclamer leur intégration dans la Fonction publique, une augmentation de leurs salaires et la garantie d'une vie professionnelle et sociale préservant leur dignité. Ils ont également exigé la fin de la délégation de l'enseignement préscolaire à des associations jugées sans lien avec l'éducation. La Coordination syndicale nationale, qui regroupe la Confédération démocratique du travail, le Syndicat de la tendance démocratique et l'Union marocaine du travail, ainsi que des coordinations régionales, avait appelé à ce rassemblement, pour protester contre la persistance de la précarité qui touche des milliers de travailleurs au sein des institutions publiques sans contrats légaux, salaires décents ou protection sociale, annonçant un ensemble de revendications, dont «l'intégration immédiate et inconditionnelle dans la Fonction publique».
Les centaines de professeurs, qui se sont rassemblés devant le siège du ministère de l'Éducation, ont, selon des comptes-rendus de presse, scandé des slogans exigeant le départ du ministre du secteur et du chef du gouvernement, Aziz Akhannouch. Par ailleurs, le secteur de la Santé n’est pas en reste, puisque, hier, la Coordination syndicale nationale de la santé a lancé une série de sit-in nationaux, en réaction au «déni continu du gouvernement à respecter les engagements pris dans l'accord sectoriel, signé le 23 juillet 2024». Les syndicats dénoncent le retard persistant dans la publication des décrets d'application promis, ainsi qu'«une mauvaise gestion et des prises de décisions unilatérales au sein du secteur». La coordination avait appelé, la veille, à une participation massive, pour «contraindre les autorités à concrétiser, dans les plus brefs délais, les réformes convenues».
Enfin, le Mouvement de la Jeunesse, connu sous le nom de «GenZ 212», a annoncé, dimanche dernier, la reprise de ses marches de rue, pour aujourd’hui 10 décembre. Dans son appel, le Mouvement dénonce non seulement l'absence de réformes sociales, mais surtout la répression féroce qui a conduit à l'emprisonnement de 1.473 personnes, dont 330 mineurs. Ces jeunes sont détenus, pour avoir simplement réclamé «un hôpital qui les soigne dignement, une école qui garantisse leur avenir et une justice qui sanctionne les corrompus».
Le Mouvement de la Jeunesse critique «l'hypocrisie du Makhzen, qui s'apprête à célébrer la Journée des droits de l'homme, alors même que de lourdes condamnations, allant jusqu'à 15 ans de prison ferme, sont prononcées contre ses manifestants».
Cette convergence des luttes sectorielles et civiles souligne un niveau de colère et d'agitation sociale élevé, qui, si elle persiste et se maintient, pourrait sérieusement ébranler le Makhzen.
Y. Y.