
Les États-Unis ne «soutiennent pas les appels à un cessez-le-feu immédiat», a déclaré l'ambassadeur américain adjoint à l'ONU, Robert Wood, vendredi dernier, estimant que cela «planterait les graines d'une future guerre», le Hamas n'ayant «aucun désir d'une paix durable».
Les ministres des Affaires étrangères de plusieurs pays arabes ont, eux, appelé vendredi à une fin "immédiate" de la guerre dans la bande de Ghaza, appelant à ce que le Conseil de sécurité de l'ONU approuve une résolution sur un cessez-le-feu humanitaire à Ghaza. Avec ce blocage, les États-Unis donnent encore une fois une mauvaise illustration du fonctionnement des organismes internationaux et de la nature des objectifs du maintien d'un ordre mondial unipolaire. Pour Médecin sans frontières (MSF), "l'inaction du Conseil de sécurité des Nations Unies et les vetos des Etats membres, notamment des Etats-Unis, les rendent complices du massacre en cours". Le Pr. Sid Ahmed Kébir de l'Ecole nationale supérieure des sciences politiques (ENSSP) déclare que le veto américain au CSNU est un "couperet sur la nuque des Palestiniens" et voit dans la politique des USA que "l'ordre international est toujours constitué par les grandes puissances" et les petits Etats "adoptent des attitudes de suivisme". C'est pourquoi, indique-t-il, "les institutions et les mécanismes régissant l'ordre mondial actuel ne sont plus adaptés et nécessitent des réformes profondes pour traduire les nouvelles réalités nationales et la répartition du pouvoir au niveau mondial".
Le spécialiste estime que "ce décalage est l'une des causes de nombreuses crises mondiales". À sa création, l'ONU, par exemple, dit-il était constitué de 51 Etats, et on l'a gardée telle qu'elle était, alors que le nombre d'Etats dépasse 190 aujourd'hui". Voilà la raison pour laquelle "l'Algérie est fermement convaincue que l’Afrique, qui revendique depuis longtemps une réforme du Conseil de Sécurité de l’ONU pour mettre fin à l’injustice historique qui lui est infligée depuis près de huit décennies maintenant, a le droit de plaider constamment sa cause".
En effet, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a déclaré, fin novembre dernier que "la succession effrénée des crises et des conflits, leur accumulation inédite et leur pullulement, à la lumière de l'inertie de la communauté internationale qui peine à les endiguer, impose à cette dernière, aujourd'hui plus que jamais, de traiter le dossier de la réforme du Conseil de sécurité avec la plus grande diligence et beaucoup de rigueur", précisant que ce dossier "se pose aujourd'hui avec insistance".
Pour le politologue, cela pose également le besoin urgent d’un multilatéralisme inclusif et équilibré pour "relever les défis mondiaux de la sécurité, de l'élargissement du spectre de la menace terroriste, et la recrudescence des phénomènes liés aux trafics d'arme, à l'immigration clandestine, et ce de manière effective et efficiente".
Par ailleurs le chercheur rappelle que l'élection de l'Algérie à un siège non permanent au Conseil de sécurité de l'ONU "intervient dans des circonstances régionales et internationales particulières, dont la plus importante est la montée en puissance du rôle diplomatique de l'Algérie et la réalisation d'importants avancées au niveau international, en défense de ses intérêts stratégiques". Il ajoutera que "l'objectif de l'Algérie est également de se rapprocher des centres de décision internationaux à travers le portail du Conseil de sécurité afin d'acquérir une meilleure compréhension des équations internationales et de la manière de traiter les questions régionales et internationales, notamment la cause palestinienne, et de composer ainsi avec les différents acteurs, aux stratégies divergentes". Il ajoute que sur le plan continental "l’Algérie poursuivra son rôle de force agissante pour la préservation de la paix et la stabilité en Afrique, et au-delà en apportant son plein appui à la mise en œuvre des solutions africaines aux problèmes du continent, et des propositions et initiatives internationales allant dans l'objectif d'atténuer les effets de la polarisation politique au niveau global".
Trouver un juste équilibre entre les différents blocs et puissances géopolitiques est un exercice très difficile. Il s'agit, pour l'Algérie, d'affirmer son attachement à ses principes dont dépend la crédibilité de sa diplomatie, et de souligner la solidité de ses relations avec les différents pays. Le monde assiste actuellement, à la mise en place, à un rythme accéléré, d'un nouveau système international, et l'Algérie doit gérer au mieux la période pendant laquelle elle sera présente au Conseil de sécurité, et approfondir ses relations avec les membres permanents de l'organe onusien pour servir ses intérêts et exiger des réformes structurelles des organismes internationaux". Au regard de génocide orchestré par les sionistes à Ghaza, le Pr. Kébir souligne que le système de sécurité internationale d’aujourd’hui "ne fonctionne pas correctement" parce que les principales institutions responsables du maintien de la paix et de la sécurité "ne correspondent pas, ou sont à côté, aux réalités du monde moderne".
L’occasion pour le Pr. Kébir, politologue, de rappeler que l’ONU a été créée après la Seconde Guerre mondiale et, depuis, "l’équilibre mondial des forces a complètement changé". Pour l'universitaire, l'équité et la justice ne s'établissent que "par la réforme structurelle du l'ONU, du CNSU et la fin de l’unipolarité".
Tahar Kaidi