Le Niger, pays enclavé, fait partie de ce qu’on appelle le Sahel, qui englobe le Sénégal, le Mali, le Tchad, le Burkina Faso et la Mauritanie. D’autres analystes incluent, également, à cette zone, le Cameroun, la Gambie, la Guinée et le Nigeria. Ce pays fait partie du G5 Sahel, une construction politico-militaire chargée de la lutte antiterroriste dans une vaste zone soumise à des tensions sécuritaires et à des crises écologiques. Le Mali a claqué la porte de ce G5. Il reste la Mauritanie, rattachée au Maghreb, et le Burkina Faso et le Niger, à la CÉDÉAO. Malgré cette crise multidimensionnelle, les six pays du Sahel connaissent un boom démographique. 17 millions d’habitants en 1950, 81 millions en 2012, 100 millions actuellement. Les prévisions s’attendent à ce que le seuil des 200 millions d’habitants soit franchi dans moins d’une génération. Une population de plus en plus jeune, des ressources minières très importantes : or, phosphate, sel gemme, pétrole, calcaire, bauxite, fer, manganèse, gypse, uranium, marbre… des sources d’eau douce encore inexploitées et un accès à la mer par la Mauritanie et le Sénégal. Voilà l’espace dans lequel se trouve inséré le Niger, ancienne colonie française, qui partage avec nous une frontière d’un peu plus de 1.000 kilomètres. Mais la trentaine de millions d’âmes du Niger est confrontée aux attaques de groupes terroristes affiliés à Al-Qaïda et à Boko Haram. La France est présente militairement au Sahel, d’abord avec l’opération Serval, ensuite Barkhane, même si celle-ci a été éjectée du Mali et du Burkina Faso. Les acteurs étrangers rendent complexe la compréhension du Sahel, au sein duquel, par exemple, le Niger, pays pauvre, est l’un des principaux producteurs mondiaux d'uranium exploité depuis un demi-siècle par le groupe nucléaire français Orano (ex-Areva). C’est ce Niger qui a été le théâtre d’une «tentative de coup d'État» par des membres de la garde présidentielle qui ont retenu le Président Mohamed Bazoum. L’Algérie a réagi, en réaffirmant «son attachement aux principes cardinaux qui guident l’action collective des États africains au sein de l’Union africaine, dont notamment le rejet catégorique des changements anticonstitutionnels de gouvernement». Alger demande «instamment, par ailleurs, que soit mis fin à cette atteinte inacceptable à l’ordre constitutionnel et à cette violation grave des exigences de l’État de droit», et souligne «l’impératif pour tous d’œuvrer à la préservation de la stabilité politique et institutionnelle de la République du Niger, gage d’une paix et d’une stabilité durables dans ce pays frère et voisin qui fait face à des défis considérables dans une région, déjà confrontée à des crises multidimensionnelles d’une acuité sans précédent». L’Afrique doit résoudre ses problèmes systémiques sur la base de ses propres structures et méthodes financières et politiques adaptées aux spécificités des sociétés et des cultures du continent africain, écrit, dans une contribution, Oleg Nesterenko, président du Centre d’industrie et de commerce européen, à l’occasion du Sommet Russie-Afrique, prévu à partir d’aujourd’hui à Saint-Pétersbourg. Le continent africain, avec des richesses minières, énergétiques, une population jeune, un marché en forte extension, une croissance, pour certains pays, très forte, reste, paradoxalement, très fragile. Au moment même où le Sommet sur le capital humain en Afrique se déroulait à Dar es-Salam, une partition supposée faire partie de pratiques révolues avait lieu à Niamey. En Tanzanie, des dirigeants échangent sur «les défis que le continent doit relever dans le domaine du développement du capital humain, afin d'en faire un affluent majeur du développement économique, ce qui permettra de faire face aux menaces liées à la pauvreté, à l'éducation et à l'emploi, conformément à l'Agenda de l'Union africaine 2063». Au Soudan, les combats entre l'armée et les Forces de soutien rapide ont fait plus de 3,5 millions de déplacés et de réfugiés. En Somalie, les Shebab redoublent de férocité. Au Maroc, des velléités coloniales ont passé un pacte contre nature avec l’économie de la drogue et le sionisme. Dans la Corne de l’Afrique, l’Éthiopie, le Kenya, Djibouti, des millions de personnes sont victimes de la traite des êtres humains. L’Afrique mérite mieux.
Mohamed Koursi