
Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a affirmé, samedi à Addis-Abeba, que les pays africains doivent redéfinir leurs priorités en matière de lutte contre les changements climatiques «en tant que continent au destin commun». Une vision partagée par le climatologue, le Pr Mohammed Meddi, qui rappelle que l’Afrique émet le moins de gaz à effet de serre dans le monde et, pourtant, c’est elle qui subit le plus l’impact du changement climatique. «L’Afrique n’émet que 4% des gaz à effet de serre de la planète, alors qu’elle est la région du monde la plus affectée par l’impact du changement climatique : inondations meurtrières, cyclones, sécheresses rudes et récurrentes», explique-t-il. Et d'ajouter : «Les sept des dix pays les plus vulnérables aux changements climatiques dans le monde sont situés en Afrique qui prend ce phénomène très au sérieux.» Il a rappelé qu'un Fonds africain pour le changement climatique a été mis en place pour financer des actions d’adaptation et de lutte contre ce phénomène. «Afin de permettre à ce fonds de jouer réellement son rôle, il doit avoir accès à plus de ressources.» La Banque africaine de développement (BAD) a consacré, en 2019, près de 3,6 milliards de dollars au climat, dont plus de la moitié est consacrée à l’adaptation des pays africains au changement climatique. Le plan d’action dédié au climat (2016-2020), mis en place par cette institution, après la COP 21 en 2015, a donné la priorité à la résilience climatique. Cela montre l’intérêt que les pays africains accordent à l’impact du changement climatique ainsi qu’aux mesures d’adaptation et de résilience. Ce budget, cela dit, n’est pas suffisant pour lutter efficacement contre les effets visibles de ce phénomène. Des financements sont à dégager pour adapter les infrastructures aux inondations notamment, avec l’introduction de techniques innovantes pour atténuer les effets de la sécheresse et pouvoir assurer la sécurité alimentaire. «Heureusement que le Bassin du Congo, deuxième plus grande étendue de forêt tropicale de la planète, qui renferme 10% de la biodiversité mondiale et stocke donc du carbone, contribue efficacement à atténuer les changements climatiques. La réduction de la déforestation constitue une stratégie d’atténuation par excellence pour favoriser le maintien du niveau des précipitations. M. Tebboune a rappelé également le manquement des partenaires du continent africain à leurs engagements financiers conformément à «l’accord de Paris», alors qu’il est exigé des pays africains de supporter plus que leur capacité. Sur ce point, l'expert estime que les pays africains ne sont pas de grands pourvoyeurs de gaz à effet de serre comparés aux autres régions du monde». De ce fait, souligne-t-il, les efforts les plus importants doivent être fournis surtout par les autres continents qui produisent les gaz à effet de serre d’une manière disproportionnée et dont les conséquences frappent de plein fouet le continent noir. «Les inondations et la sécheresse qui touchent l’Afrique du Nord et celle, de grande ampleur, qui affecte la Corne de l’Afrique sont des faits visibles et palpables», argue-t-il. Pour lutter efficacement contre le réchauffement climatique, l'expert affirme qu'il faut avoir plus de villes vertes, moins de déchets, d’émissions polluantes et la mise en place d’une stratégie plus efficiente en matière d’énergie renouvelable et de préservation des ressources en eau et en sol. Pour faire face aux inondations meurtrières ainsi qu’à la sécheresse récurrente et intense, des plans nationaux de climat doivent être mis en place par les différents pays d’Afrique. Pour ce qui est de l'Algérie, l’objectif est de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 7% à l’horizon 2030 en ne comptant que sur ses propres moyens. Ce pourcentage peut atteindre les 22% dans le cas d’un soutien financier, technique et technologique conséquent de la part des pays développés. Si nous arrivons à décrocher ces soutiens, l’Algérie franchira un cap important dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030.
Salima Ettouahria