Entretien réalisé par S. D.
El Moudjahid : Les compléments alimentaires sont commercialisés sous forme de gélules, comprimés, tisanes et préparations analogues, dans les officines, les herboristeries, les salles de musculation et sur les sites internet. Quel est vôtre commentaire sur ce phénomène qui prend de l'ampleur ?
Mohamed Aïssaoui : C'est devenu un véritable phénomène de société. On assiste, ces dernières années, à la surconsommation des compléments alimentaires, avec un rythme de croissance qui s’accélère avec la Covid-19. Les consommateurs se tournent, de plus en plus vers des solutions plus naturelles, soit pour améliorer leur bien-être et leur santé, soit pour pallier à une alimentation déséquilibrée, selon les professionnels de la santé notamment qui ne cessent, aujourd'hui, de tirer la sonnette d'alarme, en l'absence d'études sérieuses sur cette option qui attire la famille algérienne. Lancer, désormais, des recherches et des études dans ce domaine devient une urgence pour éviter d'éventuels risques sur la santé des consommateurs d'une part et identifier les effets indésirables, liés à la consommation de ces derniers, de l'autre.
Avez-vous des données sur la valeur de ce marché, de plus en plus, attractif pour les industriels et les producteurs qui sont nombreux à investir dans ce créneau ?
Le marché des compléments alimentaires explose, chez nous, ces dernières années et plus particulièrement avec la crise sanitaire qui a fait grimper la demande de manière extraordinaire, d'où l'urgence d'un encadrement réglementaire pour éviter les ventes anarchiques, ici et là, qui risquent de nuire à la santé du consommateur. Il faut savoir que le chiffre d'affaires mondial de ce secteur se situe autour de 8 milliards de dollars, selon certaines sources. Ces dernier, en fait, ne reflètent pas la réalité, notamment dans certains pays où les ventes se font sur le net, sans ordonnance ou sont carrément introduits au pays à travers des ‘‘commerçants de valises’’ qui ne sont pas forcément de fins connaisseurs de ce genre de produits.
Les chaînes de télévision nationales font la promotion des compléments alimentaires. Il aurait fallu l'intervention de l'autorité de Régulation de l'audiovisuel, en 2020, pour interrompre les campagnes publicitaires. Comment a accueilli «Himayatec» cette disposition ?
De manière plus spécifique, la communication qui touche à la nutrition et à la santé est soumise aux dispositions d'une réglementation stricte et il faut instaurer un principe d'autorisation préalable pour ces spots de la part de l'autorité de Régulation de l'audiovisuel qui doit jouer son rôle pour protéger le consommateur. Himayatec en tout cas ne peut que saluer la décision de l'autorité de Régulation de l'audiovisuel s'inscrivant dans le cadre des lois édictées qui ont pour principale finalité de préserver la santé du citoyen.
Le ministère du Commerce, a procédé, en 2020, au retrait de compléments alimentaires, vendus, sous les marques «Bio.Herbs Miel» et «Mesk El Ayman» suite à la découverte de principes actifs qui ont des effets nocifs. Comment a réagi votre association face à cette tromperie dangereuse ?
Le ministère du Commerce, a procédé, en 2020, au retrait du marché et l'interdiction d'admission sur le territoire national de compléments alimentaires, vendus, sous les marques «Bio.Herbs Miel» et «Mesk El Ayman», utilisés pour l'impuissance masculine, suite à la découverte, dans la composition de ces derniers, de principes actifs, à savoir le Sildenofil et le Tadafil qui ont des effets indésirables, nocifs allant de l'hypotension, à la vasodilatation, à d'autres troubles urinaires.
Comment a réagi votre association face à cette tromperie dangereuse ?
Ceci est en violation des dispositions de la loi n°09-03 du 25 février 2009 relative à la protection du consommateur et à la répression des fraudes, et du décret exécutif n°12-203 du 6 mai 2012 portant règles appliquées en matière de sécurité des produits. Ces produits se présentent généralement sous forme de miel, de boisson, de pâte et de chocolat, présentés dans plusieurs emballages tels que des sachets, des canettes et des bouteilles.
Aujourd'hui, les associations de protection du consommateur sont, de plus en plus, sollicitées pour faire barrière.
Quelles sont les actions entreprises ou à entreprendre pour sensibiliser le consommateur ?
A l'heure des compléments alimentaires qui ont tendance, malheureusement à se substituer aux médicaments, il est impératif de lancer une large campagne de sensibilisation pour inciter les consommateurs à modérer leur consommation des compléments alimentaires, à travers les mêmes supports publicitaires et surtout à travers les réseaux sociaux arrivés, de nos jours, à faire de l'ombre aux médias qualifiés, même s’ils sont qualifiés de lourds, jusque-là.
Ces derniers très proches du citoyen et de toutes les couches doivent être utilisés à bon escient pour éviter le pire.
S. D.
