Les Réseaux sociaux en temps de covid-19 : Fake-news et solidarité

  • Les Réseaux sociaux en temps de pandémie
  • Solidarité, assistance, soutien et orientation : La face humanitaire
  • Justice : Les peines de l’intox
  • DR Othman Telba Cherif, psychiatre : De fausses informations fragilisent la lutte contre le coronavirus
  • Samir Ardjoun, maître de conférences à l’ENSJSI : La crise sanitaire est un véritable métronome médiatique
  • Les lobbys anti-vaccin Toutes griffes dehors
  • Pr Ahmed Triki, sociologue, doyen de la faculté des Sciences humaines et sociales de Bechar : «Les réseaux sociaux nuisent à la gestion de la crise sanitaire»

Les réseaux sociaux comportent des avantages. Ils permettent de communiquer avec sa famille, ses amis, des personnes qui habitent à distance, de s’informer. On peut aussi s’ouvrir sur le monde, sur d’autres cultures et diffuser rapidement des informations.

Mais il y a la médaille et le revers de la médaille. Les réseaux sociaux sont un «Janus bifrons», moderne. Ils comportent des dérapages : on peut se faire harceler, humilier ou intimider. On peut surtout y lire de fausses informations. La pandémie de la Covid-19 est un parfait exemple d’un colportage de fausses informations, où le charlatanisme thérapeutique, la propagation de «l’info-démie», polluent la toile et les ondes, où les théories du complot ont fait florès. Face à une quantité importante d’articles trompeurs, de publications erronées, à la nuisance de la désinformation, l’enjeu de la communication ne s’est jamais posé avec autant d’acuité et d’insistance. Des internautes, foncièrement malintentionnés se saisissent sans vergogne des nouvelles formes d’expression médiatique pour semer le doute et la suspicion dans les esprits. Usant de procédés éculés, ces fantassins de la communication au rabais diffusent une foultitude de messages erronés, de contenus incongrus, n’ayant pour but que de tenter de créer le buzz, de multiplier le nombre des «followers», selon le jargon en vigueur. Où ? Qui ? Quand ? Quoi ? Comment ? Ces questions, qui devraient structurer une information crédible, ne traversent jamais l’esprit de ceux qui se targuent d’informer de cette façon. L’Algérie n’a pas échappé à ce phénomène. Le président de la république, Abdelmadjid Tebboune, avait pris la décision de mettre en place un comité scientifique pour suivre l’épidémie, composé de médecins spécialistes sous la supervision du ministre de la Santé. La tâche confiée à ce comité est de suivre l’évolution de l’épidémie et d’informer l’opinion publique quotidiennement et régulièrement. La présentation dument chiffrée, effectuée par le porte-parole de ce comité, s’effectue via les communiqués des bilans quotidiens de décès, de personnes guéries ou contaminées. Une proposition parmi tant d’autres. Il serait utile, pour les besoins d’une information juste, que les médias classiques s’emparent des réseaux sociaux, augmentent leurs podcasts, créent des rubriques pour démonter systématiquement les fake-news. Cela dit, l’écrasante majorité de nos compatriotes doivent se garder de prêter flanc à tous ces tombereaux de fausses nouvelles et de veiller scrupuleusement au respect des gestes barrières. Honteuse spéculation Dans cette bataille contre le virus, des spéculateurs, dénués de tous scrupules, sautent sur l’occasion pour se remplir les poches. Dans ce champ interlope, où le moindre sentiment d’humanité est absent, ils n’éprouvent aucune pitié pour les malades. L’actualité nous renseigne sur leurs forfaitures. La marque de fabrique est toujours la même. Faire flamber, coûte que coûte, les prix des bouteilles d’oxygène en les stockant intentionnellement. Il est plus que temps d’éclater ce scandale qui met en danger la vie des patients, il est plus qu’urgent d’en finir avec ces pratiques. La vénalité de ces malfrats ne doit bénéficier d’aucun répit. Fort heureusement, face à la recrudescence du variant Delta, les réseaux sociaux jouent un rôle positif. C’est l’autre face de la médaille. Une chaîne de solidarité s’est mise en place pour l’acquisition de concentrateurs d’oxygène, indispensables pour les malades souffrant d’insuffisance respiratoire grave, l’achat de matériel d’oxygénothérapie… Dans un bel élan de fraternité et d’entraide, des initiatives citoyennes se multiplient sur tout le territoire national, où les associations, les entreprises, les bienfaiteurs et des bénévoles de tous horizons, des artistes, des sportifs, se portent au secours des malades en détresse, agissent dans la célérité en tant qu’alliés actifs des pouvoirs publics. La prise de conscience collective est une réalité et les valeurs d’entraide multiforme ont prévalu.

M. B.

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Les Réseaux sociaux en temps de pandémie
Plusieurs pages Facebook se sont transformées, depuis le début de la pandémie, en véritables associations humanitaires en ligne, où l’on propose des bouteilles d'oxygène, des médicaments mais aussi des actions de sensibilisation et de prévention. Des médecins spécialistes, des psychiatres et des psychologues ont également envahi la Toile pour l’assistance, l’orientation et l’information en ligne.

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Solidarité, assistance, soutien et orientation : La face humanitaire
Belaouni Hadj Ahmed, enseignant universitaire à l’Ecole normale supérieure de Kouba est un internaute très actif sur les réseaux sociaux. Membre actif dans plusieurs groupes de solidarité à l’instar de Help Gat Dz, Tadamoun Covid Dz, il est le fondateur du groupe Moul Etaj we yehtaj. Il souligne que l’occupation de l’espace virtuel aujourd’hui est nécessaire. «L’utilisation des réseaux sociaux est en hausse depuis l’apparition du Coronavirus et lors du confinement. Nous avons créé des pages dans le but de venir en aide au maximum aux personnes en cette période difficile. Les réseaux sociaux se sont révélés pendant la crise du COVID-19 un outil performant pour la transmission des demandes d’aides et de forte solidarité». L’enseignant affirme que la présence sur la Toile a permis de riposter aux fakenews «qui compliquent le travail du personnel médical et déstabilisent la population. Nous avons procédé à des actions de sensibilisation sur l’importance de la vaccination avec des preuves scientifiques». Les réseaux sociaux sont devenus également des plateformes d’échanges entre professionnels de la santé et internautes à l’instar du docteur Elias Bey Akhamouk, membre de comité scientifique de suivi de l’évolution de la pandémie de Coronavirus (Covid-19) en Algérie, qui répond quotidiennement aux questions liées à la prévention et la lutte contre la pandémie pour lutter contre les fausses nouvelles. Le Dr Othman Cherif psychiatre a créé la page «Mon psychiatre Algérie» pour une assistance en ligne et prend en charge les questions sur la santé mentale, la psychiatrie et la psychologie. Plusieurs sociétés ont elles aussi dû s’adapter.
Neila Benrahal

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Justice : Les peines de l’intox
Le Conseil des ministres a adopté en avril 2020 un avant-projet de loi modifiant et complétant l’ordonnance n° 66-156 du 8 juin 1966 portant Code pénal. «Les dispositions du texte proposent une adaptation de cette loi avec les mutations survenant dans le pays, afin de prendre en charge les nouvelles formes de criminalité qui en découlent et combler le vide du système juridique en matière de gestion des crises». Les dispositions adoptées proposent aussi «de criminaliser les actes qui se sont répandus ces dernières années au point de menacer la sécurité et la stabilité du pays, notamment la diffusion de fakenews pour porter atteinte à l’ordre et à la sécurité publics, l’atteinte à la sûreté de l’Etat et à l’unité nationale, la falsification en vue de l’obtention d’aides publiques financières, matérielles et en nature, ainsi que des exonérations fiscales. Il s’agit aussi d’actes portant atteinte à la probité des examens et concours, de mise en danger d’autrui ou à leur intégrité corporelle ». Ainsi, le nouveau code pénal prévoit une peine d’un à trois ans de prison et une amende pouvant aller jusqu’à 300.000 DA à l’encontre de «toute personne jugée coupable de propagation de fausses informations.» La peine est doublée en cas de récidive. Amina Chemami, enseignante chercheuse et avocate près la Cour suprême et le Conseil d'Etat souligne que l’adoption de ce texte dans le code pénal tarde. Ce texte stipule que les Fake news menacent l’ordre public et la sécurité , les peines prévues peuvent aller jusqu'à 5 ans d’emprisonnement selon la situation. Il n'y a pas de textes spécifiques à la situation actuelle. Toutefois, les textes pénaux généraux pénalisent la diffusion et incriminent les auteurs des fausses nouvelles. «Malgré les quelques textes de loi et le texte en attente, l'on peut affirmer que la protection juridique contre les Fake news est bien faible. De plus nous enregistrons un retard par rapport à d'autres Etats précurseurs en la matière».
Neila B.

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DR Othman Telba Cherif, psychiatre : De fausses informations fragilisent la lutte contre le coronavirus
Les fausses nouvelles, à savoir les fakenews, sur le Covid ont fait ravage sur les réseaux sociaux. Mais quelles sont les conséquences de ce phénomène sur les patients, le personnel médical et la population en général ? Le Dr Othman Telba Cherif, médecin psychiatre à l’hôpital psychiatrique de Biskra précise que nous sommes en train de combattre deux ennemis, une pandémie de coronavirus et une infodémie ou pandémies des fausses informations. «Ces informations fausses ou inexactes contre le coronavirus, mais surtout contre le vaccin et la vaccination, fragilisent les stratégies de combat contre la véritable pandémie et peuvent s'avérer dangereuses et contreproductives pour le système de santé et la population ». Le psychiatre cite, en ce sens, la rumeur des micropuces dans les vaccins ou leur inefficacité, d'où l'intérêt de s’informer exclusivement par le biais des sources officielles et d'éviter de lire et de relayer toutes les nouvelles alarmistes non vérifiées et farfelues qui circulent. «Les faknews sanctionnent tout le monde, l'Etat, le système de santé et son personnel et la population générale, un véritable fléau qu'il faut combattre avec la même énergie que le virus». Faut-il alors, comme pour la maladie, s’isoler totalement et boycotter Facebook ? Non, répond le praticien. «Cela n’est pas une bonne idée, ni possible d'ailleurs à l’ ère de l'hyperconnectivité. Il est plutôt conseillé de vérifier les informations et de s'informer auprès des sources fiables car n'importe qui peut partager n'importe quoi aujourd'hui ». Il appelle en ce sens les autorités à faire de la lutte contre les fakenews une priorité en mettant en place des stratégies pour les contrecarrer. « Par ailleurs, en Algérie, nous n’avons pas de leadership dans le domaine médical qui est suivi par l'opinion publique ,comme c'est le cas à l'étranger, les médecins algériens commencent tout juste à occuper l'espace médiatique». Les personnes qui déclenchent des fake news ont-elles des profils divers et des motivations ? Le Dr Tolba précise qu'il faut diviser les "Fakenewseurs" en quatre catégories : il y a ceux qui le font par ignorance et méconnaissance du sujet. «Ces personnes pensent avoir compris un sujet en lisant quelques lignes sur le vaccin ou sur le virus et se précipitent à partager des explications et des analyses. Elles sont malheureusement victimes d'un effet psychologique connu sous le nom d'effet Dunning-Kruger dans lequel les personnes les moins qualifiés dans un domaine ont un sentiment de surestimation de leur compétence». Une autre catégorie propage les fakenews par intérêt, financier, politique ou idéologique. Il y a aussi ceux qui font circulent des fausses informations pour manipuler l'opinion publique, ciblant des pages sur Facebook suivies par des millions d'abonnés. «La majorité des gens font circuler ces fausses informations par méconnaissance et par l'absence de la culture qui consiste à vérifier la source des informations, ainsi que par manque de confiance dans les sources officielles. Face à cette situation, le gouvernement doit mettre en place une stratégie de communication afin de rétablir la confiance entre le citoyen et les institutions de l'Etat.
Neila Benrahal

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Samir Ardjoun, maître de conférences à l’ENSJSI : La crise sanitaire est un véritable métronome médiatique

Entretien réalisé par : Neila Benrahal
Dans cet entretien, le docteur Samir Ardjoun, maître de conférences à l’Ecole nationale supérieure de journalisme et des sciences de l’information, membre du laboratoire MUSC/ENSJSI et membre du laboratoire SICLAB à l’université de Nice, affirme que le journalisme scientifique, très en vogue en ces moments de troubles sanitaires, est une option très adéquate pour faire valoir la scientificité des contenus médiatiques.  En Algérie, un vide sidéral est constaté dans cet aspect.

Quel est l’impact des fausses informations et celui des réseaux sociaux dans la lutte contre la pandémie ?
Il faut d’abord dire que ces contenus prétendus révélateurs et éclairants (fake-news) de bas de gamme et low cost, font partie intégrante de notre quotidien et deviennent un centre d’attention et de curiosité dans notre bulle informationnelle générale. Leurs terrains propices sont les réseaux sociaux numériques, qui procurent à ce phénomène mondial une résonance inégale et un écho multimodal, transversal et horizontal. De mon positionnement d’enseignant-chercheur, et en analysant de près ce délaçage virtuel chez nous en Algérie et ailleurs, j’estime que l’influence pessimiste et défavorable à la vaccination ani-Covid, vire véritablement au drame. Des communautés homogènes et solidaires ne sauraient imaginer que les réseaux sociaux numériques investissent énergiquement et avec détermination ces lieux très convoités et s’adonnent à la manipulation et au complotisme.

Comment doit-on traiter une information sanitaire en situation de crise ?
La course à l’audience et aux circuits d’engagements et de réactions (partages, likes, commentaires, emojis… ) est l’ADN de notre ère informationnelle malheureusement. A l’heure actuelle, et en temps de crise, nos biais cognitifs et de confirmation sont très sollicités, fragilisés et apprivoisés. Ils cèdent aisément à la consommation de ces informations calamiteuses. Le journalisme scientifique, très en vogue en ces moments de troubles sanitaires, est une option très adéquate pour faire valoir la scientificité des contenus médiatiques. Chez nous, en Algérie, un vide sidéral est constaté dans cet aspect.

Quelle évaluation faites-vous du traitement de la crise sanitaire par les médias ?
Il est très délicat pour la corporation journalistique de traiter une telle crise sanitaire aussi rapidement, le temps scientifique généralement prolongé et étendu est incompatible avec le temps médiatique qui exige l’instantanéité et la rapidité, notamment en version numérique. C’est une équation très complexe afin d’arriver à une analyse médiatique impartiale. Les médias algériens, très uniformisés et standardisés dans le traitement de cette crise sanitaire, cherchent encore une matrice, ils manquent de profondeur et concourent plus à des couvertures quantitatives et sommaires.

Des médias parlant de choses positives, de solutions esquissées amélioreraient-ils la relation de confiance entre public et médias ?
Le journalisme de solutions, le journalisme des initiatives, le journalisme de proximité, le journalisme constructif et productif, sont des genres journalistiques très appréciés par les auditoires. Ils contribuent à rallumer cette flamme et diminuer ce sentiment de défiance envers les médias. L’univers médiatique algérien est un dynamisme très complexe, son ancrage sur les publics est décisif, les solutions de rechange seront la mise en valeur, l’équité, et la responsabilité si nous voulons avoir cette adhésion médiatique tant souhaitée.

Des médias parlant de choses positives, de solutions esquissées amélioreraient-ils la relation de confiance entre public et médias ?
Le journalisme de solutions, le journalisme des initiatives, le journalisme de proximité, le journalisme constructif et productif, sont des genres journalistiques très appréciés par les auditoires. Ils contribuent à rallumer cette flamme et diminuer ce sentiment de défiance envers les médias. L’univers médiatique algérien est un dynamisme très complexe, son ancrage sur les publics est décisif, les solutions de rechange seront la mise en valeur, l’équité, et la responsabilité si nous voulons avoir cette adhésion médiatique tant souhaitée.

Comment lutter contre la désinformation ?
Il existe trois formes de manipulation de l’information : une première avec l’objectif de nuire : la désinformation ; une deuxième forme fallacieuse et de mise en scène et de malformation, et un troisième niveau qui concerne plus les choix judicieux de consommation des contenus médiatiques : la mal-information. Se mesurer à ces trois niveaux est très important afin de mettre en place une stratégie de correction de la trajectoire. Seule une alternative officielle, perceptible et lucide, pourra faire basculer cette réalité et à long terme, en l’absence ou avec la carence de la communication institutionnelle et officielle, les rumeurs et les fake-news s’accentuent et se renforcent davantage.

L'Autorité de régulation de l'audiovisuel (ARAV) a exhorté les médias à «éviter de se concentrer excessivement sur les nouvelles négatives» dans leur couverture de la crise sanitaire…
A quelques exceptions, j’estime que l’univers médiatique algérien illustre la réalité d’une corporation étriquée et déconcertée, malheureusement. Un panorama médiatique dominé largement par les couvertures et l’exploration des fils d’actualités des réseaux sociaux, est voué systématiquement à l’échec. Cette crise sanitaire est un véritable métronome médiatique, certaines entités journalistiques, même minoritaires, en tireront profil, pendant qu’une majorité écrasante risque d’en sortir avec des séquelles profondes et vitales.
N. B.

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Les lobbys anti-vaccin Toutes griffes dehors
Utiliser les réseaux sociaux, Facebook, Twitter, ou Instagram est devenu banal. Lors de cette 3e vague du Coronavirus que traverse le pays, les citoyens font appel aux réseaux sociaux pour avoir une réponse à leurs nombreuses interrogations mais cette démarche peut s'avérer dangereuse. Certains partagent leur expérience de la maladie "J’ai été contaminé et voici le traitement qui m'a été prescrit et Dieu merci je me suis rétabli au bout de quelques jours", note un internaute. Les spécialistes ripostent : «nous ne pouvons pas agir de la sorte. Chaque patient est un cas unique et ce qui est valable pour l'un ne l'est pas forcément pour l'autre. Cette inconscience pourrait être payée au prix de la vie. L'automédication peut s'avérer être fatale pour la personne contaminée. » Contacté, le président de la Société algérienne d'immunologie affirme qu’une grande partie des citoyens, notamment les jeunes sont branchés sur les réseaux sociaux avec leurs Smartphones et ne sont plus tellement attirés par la télévision ou la presse écrite, ce qui a permis au corps médical de se tourner vers ces plateformes de communication. «Dans la lutte contre la crise de la Covid-19, les réseaux sociaux sont importants pour informer et transmettre aux citoyens des messages crédibles fondés sur les études scientifiques du fait que notre activité est très sensible et on n’a pas droit à l’erreur», explique le Pr Kamel Djenouhat qui affirme que les réseaux sociaux ont révolutionné la façon d’accéder à l’information, de communiquer et de partager le savoir dans de nombreux domaines, y compris celui de la médecine. L’expérience, poursuit-il, a démontré que les réseaux sociaux constituent désormais, une plateforme de partage pour accéder à un grand nombre de personnes. L’immunologue assure que les médecins reçoivent énormément de messages sur leurs comptes de réseaux sociaux, notamment des questions pour lutter contre le virus et révèle que les citoyens veulent savoir quelle attitude adopter lors de symptômes de la Covid-19, d’autres tentent d’avoir l’interprétation des explications de leurs analyses quand une autre partie s’interroge pourquoi sur le test sérologique. Il estime que les réseaux sociaux ont été envahis par « les lobbys du mal » qui n’accordaient aucune importance à la vie du citoyen lequel reste, selon lui, très influençable. «Ces lobbys activent fortement sur les réseaux sociaux pour convaincre le plus de personnes d’éviter la vaccination anti-Covid, le tout sans aucun fondement scientifique. Et comme nous sommes un pays francophone, ces groupes du mal influencent les Algériens», regrette le spécialiste. « on trouve des interventions des personnes qu’on ne connaît pas. on ne sait même pas s’ils sont des experts. Il ne faut pas prendre tout ce qui se dit sur le net pour argent comptant», prévient-il. Le président de la Société algérienne d'immunologie appelle les secteurs de la Santé et de la Communication et les conseils scientifiques à créer une organisation sur le net pour barrer al route à la campagne anti-vaccination. De son côté, le Dr Amina Abdelouahab, sénologue au Centre Pierre et Marie Curie du CHU Mustapha-Pacha trouve que l’utilisation par les médecins des réseaux sociaux est important dans la mesure où ils apportent aide et conseil aux citoyens. «Toutefois, il faut être prudent», met-elle en garde. La spécialiste considère que les médecins doivent, avant d’intervenir sur le net, s’informer et avoir des preuves issues des études scientifiques sur ce qu’ils avancent comme informations. « Il faut se baser sur les études qui ont été effectuées, particulièrement en ces temps de Covid », plaide-t-elle. Le Dr Abdelouahab regrette cependant que des personnes étrangères à la profession essayent de dissuader les internautes à se faire vacciner. Attention aux fausses informations», a-t-elle lancé.
Mohamed Mendaci

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Pr Ahmed Triki, sociologue, doyen de la faculté des Sciences humaines et sociales de Bechar : «Les réseaux sociaux nuisent à la gestion de la crise sanitaire»

Entretien réalisé par Karim Aoudia

Face à la pandémie caractérisée par un rebond des contaminations, pensez-vous que la société a enfin pris conscience de la dangerosité de la situation en adoptant une attitude plus respectueuse des gestes barrières ?
Hélas, non. La prise de conscience collective face à la propagation de la pandémie fait gravement défaut. En revanche, la peur et l’affolement s’emparent des esprits. La crainte se généralise au sein du foyer social et génère plus de désordre, voire une anarchie galopante. Le lot d’informations diffusées au quotidien sur le nombre des décès de la Covid-19 et des malades a provoqué une panique de tendance à échapper à tout contrôle. Les exemples qui attestent de ce constat sont d’ailleurs nombreux, à commencer par cet affolement autour du manque d’oxygène dans les hôpitaux, le recours de plus en plus manifeste à l’automédication, et toute la charlatanerie qui se déploie au sujet de la crise sanitaire. Face à l’épidémie et ses conséquences fâcheuses, les citoyens sont effrayés. Ils ont peur de mourir, peur de souffrir dans des hôpitaux surchargés de malades. En dépit d’un tel contexte intenable, force est de constater qu’il y a encore un grand manque à gagner en matière de prise de conscience de la collectivité sur la nécessité de faire valoir une meilleure prévention contre la maladie. La distanciation sociale laisse à désirer sur la place publique et plus particulièrement dans les marchés. Les rassemblements sont toujours là et le comportement des uns et des autres ne tient pas compte des gestes barrières, pourtant élémentaires, pour briser la chaîne des contaminations. Nous sommes dans une phase critique de l’évolution de l’épidémie et quoique la situation est réellement alarmante, il existe encore ceux qui s’aventurent dehors sans bavettes, qui organisent des fêtes et qui affluent en grand nombre vers les plages, même si leur accès est formellement interdit par les autorités. On remarque en outre qu’il y a de moins en moins de campagnes d’hygiène et de désinfection des places publiques et de nettoyage de notre environnement.

Quel est votre avis sur le contenu des réseaux sociaux concernant l’évolution de la pandémie ?
Les réseaux sociaux sont truffés de contenus infondés, de mensonges, dont le seul impact est d’entretenir la panique. Il devient urgent en effet de stopper net ce déluge de désinformation et parfois même d’abêtissement de l’opinion que l’on constate au quotidien sur ces réseaux. Lorsqu’on a affaire à des publications remettant en cause l’existence même de l’épidémie ou encore l’efficacité des méthodes de lutte, y compris le vaccin que certains n’hésitent pas à dénigrer, cela relève d’un comportement nuisible à l’endroit duquel il y a lieu de sévir. En somme, les réseaux sociaux nuisent à la gestion de la crise sanitaire. Autre facteur aggravant, l’esprit collectif est malheureusement de tendance à croire les réseaux sociaux que les médias professionnels qui diffusent une information juste et vérifiée. Cela dit, les canaux de la communication officielle doivent redoubler d’efforts en termes, notamment, de sensibilisation de la collectivité à travers la mobilisation de l’élite maîtrisant l’art de parler au grand public afin d’influer positivement sur l’attitude sociale.

Que faire pour corriger les anomalies résultant d’une mauvaise attitude sociale ?
Si l’on veut se rattraper en tant que société, il nous faut indéniablement agir dans le sens de réhabiliter les principes de l’éducation, de la discipline et de l’éthique sociale. Un peuple éduqué est mieux immunisé contre toute sorte de dérapage qui peut provoquer sa perte. La bonne éducation est une partie intégrante de la solution à tous les problèmes sociaux auxquels nous sommes confrontés actuellement.
K. A.

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