
Internet est loin d'être cette grande plateforme virtuelle soucieuse de notre bien-être. Bien au contraire, elle ne cesse de surprendre tous les jours que Dieu fait, par ses griffes acérées qui laissent des traces sur le passage d'internautes dont le seul tort était d'avoir cru que la technologie pouvait être facilement domptée pour être utilisée sans s'exposer à des escroqueries, des arnaques et d'autres dangers de la toile. Fraude, abus de confiance, tromperie sur la qualité, fausses relations et transactions, intimidations et harcèlement et bien d'autres scénarii dignes des grands films policiers qui ont marqué le cinéma.
La toile, amie ou ennemie ? La question taraude l'esprit de beaucoup d'utilisateurs partagés par deux options difficiles : chanter les louanges de celle-ci ou la maudire.
Les victimes des arnaqueurs ne sont, certes, pas nombreuses, comparé à d'autres pays qui ont découvert ces plateformes bien avant les Algériens, lesquels, de surcroît, n'ont pas la culture de dénoncer une tromperie concernant la qualité, le prix d'un produit acheté sur internet ou même un harcèlement. Cela dit, avec le e-commerce et les réseaux sociaux, les risques de se faire arnaquer augmentent, d’autant plus que le nombre d’internautes est monté en flèche ces dernières années. Il faut savoir que le rapport sur l'utilisation d'internet dans le monde pour 2021 fait ressortir que la moitié de la population algérienne l’utilise et que 25 millions sont actifs sur les réseaux sociaux. Le rapport en question fait état de plus de 59% de personnes connectées, enregistrant une hausse de 16%, comparé à janvier 2020. Un Algérien sur deux utilise les réseau sociaux et 6,3% des hommes et 3% des femmes effectuent des transactions en ligne.
Nouveaux services pour de nouveaux besoins
Cette percée d'internet a fait naître de nouveaux besoins, et bien entendu, de nouveaux services et offres accueillis favorablement, y compris par les plus réticents, sans tenir compte du revers de la médaille. Le ministère du Commerce a mis à la disposition du consommateur un numéro vert 1020 pour signaler un dépassement ou une atteinte à ses droits, à Alger, Tipaza et Boumerdès.
Il faut préciser également que la réforme de la justice a permis l’adaptation du dispositif normatif pour lutter contre la cybercriminalité. Dans le même sillage, en 2018, la Sûreté nationale a adopté un plan d'action complémentaire qui a pour mission principale de doter le personnel de moyens technologiques innovants pour lutter contre toutes les formes de cybercriminalité et garantir à tous un espace numérique sans danger.
Aujourd'hui, le phénomène ne connaît pas de frontières et les services de la Sûreté nationale ont procédé à la création de brigades cybercriminelles dans chaque wilaya. Ces dernières misent sur les campagnes de sensibilisation des utilisateurs d'internet. Le citoyen peut signaler un dépassement, une infraction ou un crime constaté sur les réseaux sociaux en appelant le 15-48 ou bien en contactant la DGSN sur les pages de ses réseaux sociaux et déposer plainte au niveau des brigades. Cela permettra la prise en charge des victimes par des experts qui mèneront les investigations pour ce genre de crimes. Aujourd'hui, la Sûreté nationale est parvenue à mettre hors d'état de nuire des personnes impliquées dans des crimes liés à la sécurité des systèmes informatiques, d’escroquerie via Internet et d’autres formes de cybercriminalité.
A ce sujet, la police judiciaire affirme que les éléments de la Sûreté nationale, à travers ses brigades spécialisées dans la lutte contre la cybercriminalité, avaient relevé en 2020, 2815 affaires liées aux atteintes à 3192 personnes, alors que le nombre d’auteurs impliqués était de 2524. Les mêmes services ont relevé également 238 crimes d'escroquerie, 239 affaires portées devant la justice et 322 personnes arrêtées.
En 2021, 2.149 affaires d'atteinte aux personnes étaient traitées, perpétrées par 1.969 criminels, alors que le nombre des victimes avaient atteint les 2.238.
Concernant les atteintes aux personnes en 2021 toujours, 500 crimes d'escroquerie ont été commis par 731internautes.
Les associations au secours du consommateur
Si, il y a quelques années, le client était livré à son sort, les choses ont changé aujourd'hui : des associations se constituent même partie civile pour défendre le consommateur. Le Directeur Exécutif de la Fédération Algérienne des Consommateurs, Mohamed Toumi, dira que les choses ont évolué avec de plus en plus de mouvements associatifs dédiés à la protection des consommateurs. L'organisation qu'il représente, dont la création remonte à 2011, compte aujourd'hui 30 associations. Leur but :
défendre les consommateurs par le conseil, l'orientation ou l'assistance, la loi permettant aux associations de se constituer partie civile devant la justice. La devise est de régler toujours les problèmes exposés par les plaignants à l'amiable. Dans ce sens, la mission principale de la FAC est de protéger le client dans le cadre de la loi 09-03 relative à la protection des consommateurs ; malheureusement, peu de citoyens connaissent leurs droits, et la majorité des consommateurs ignore l'existence d'associations de protection, ce qui favorise l’arnaque et la fraude. M.Toumi évoquera, à titre d'exemple, la vente du sachet de lait subventionné. «Vous achetez quatre sachets de lait subventionné dont le prix est plafonné à 25 DA, Mais le commerçant exige entre 30 et 35 DA l'unité de son client, et ce n'est pas tout : il va jusqu'à obliger le consommateur à acheter également un sachet de lait de vache cédé entre 60 et 65 DA. C'est ce que l’on appelle la vente concomitante qui est interdite. Le client ne dénonce pas cette situation car il ignore que cette pratique est interdite et qu'il a la possibilité de dénoncer le commerçant auprès des association de protection des consommateurs ou de la Direction du Commerce, de même que pour les autres arnaques.
Le directeur exécutif de la Fédération Algérienne des Consommateurs explique, par ailleurs, que la FAC a enregistré plusieurs arnaques et que les plaignants ont même été indemnisés. Le phénomène est universel, les pays développés ne sont pas à l'abri des escroqueries. Pourtant, les Associations de Protection des Consommateurs sont très puissantes et jouissent de larges pouvoirs et prérogatives. Depuis la naissance de la fédération, aucune plainte n'a été enregistrée par la FAC concernant les arnaques en ligne. Un état de fait imputé à l'absence de la culture des droits du consommateur, alors que les associations jouent pleinement leur rôle et sont disposées à prendre en charge ses doléances. Aujourd'hui, il est clair qu'avec la digitalisation des moyens de communication, se protéger des arnaques renvoie, certes, à faire preuve de vigilance, mais aussi à connaître ses droits, d'autant plus que l'Algérie a adopté des lois contre les crimes électroniques.
Samia D.