
L’auteur de ce livre, l’anthropologue Yazid Ben Hounet, axe son ouvrage sur la guerre de quatrième génération menée contre l’Algérie depuis un certain temps, et plus particulièrement depuis le Hirak.
Les puissances et les lobbys néocoloniaux et impérialistes sont à l’origine de la propagande médiatique visant à déformer la réalité algérienne, et, pour l’auteur, qui a décrypté ces discours, ces actions hostiles n’émergent pas ex-nihilo. «La guerre de quatrième génération, qui focalise l'attention de l'Institut national d'études de stratégie globale (INESG - Algérie) et des autorités algériennes, inclut notamment la subversion via la manipulation des médias. Quand on analyse les propagandes de certains médias à l'encontre de l'Algérie et qu'on se pose la question de leur finalité, on saisit mieux les raisons de cette préoccupation.»
Dans la préface, le professeur Ammar Belhimer, l’actuel ministre de la Communication, revient sur la réalité juridique de tout un pan de la composante médiatique : «En dehors des cadres légaux, la France est médiatiquement présente en Algérie à travers ses correspondants de presse nationaux et ses financements à des médias locaux acquis à sa cause, sous couvert de francophonie. S'agissant de son premier relais hors légalité, certains journalistes s'installent comme «correspondants de fait» — non accrédités selon les procédures en vigueur d'organes étrangers — et entretiennent une sorte de «loi du fait accompli» qui les expose à plusieurs risques dont le premier, et non des moindres, est qu'ils ne sont pas reconnus comme correspondants.» Il explique aussi que «les journalistes en question doivent savoir que les pays des médias qui les emploient n'auraient jamais toléré de telles pratiques sur leurs sols respectifs.» Il pointe par la même du doigt l’imbroglio des financements étrangers de médias locaux. «Ils sont prohibés par la loi organique n° 12-05 du 1er janvier 2012 relative à l'Information et de la loi n° 14-04 du 24 février 2014 inhérente à l'activité audiovisuelle.»
En effet, l'article 29 de la loi sur l'Information souligne, de manière claire et précise, que «l'aide matérielle directe et indirecte de toute partie étrangère est interdite». Le même article oblige «tous les médias écrits et audiovisuels à déclarer ou à justifier l'origine des fonds constituant leur capital social et ceux nécessaires à leur gestion, conformément à la législation en vigueur».
En conclusion, A. Belhimer assènera : «Plus profondément, le cyber-harcèlement émanant d'usines à trolls étrangères, notamment israéliennes ou marocaines — avec le soutien technologique français — s'acharne à faire voler en éclat le tissu social et à déstabiliser notre pays. Au-delà du «trolling» et de l'incivisme ou de l'agressivité comme registre d'expression, le cyber-harcèlement militant d'outre-Méditerranée et les discours de haine qu'il propage à une échelle inquiétante jusqu'à nos jours sont l'expression manifeste d'une ingérence intolérable.»
L’auteur a regroupé plusieurs courtes analyses critiques, publiées en France, puis en Algérie, concernant le traitement médiatique de l'actualité politique algérienne depuis l'avènement du Hirak (février 2019). «Une première version du manuscrit a été transmise au début du mois de juillet 2021 aux éditions ANEP. Durant l'été, l'affaire du logiciel espion Pegasus a permis de mettre à nu les collusions maroco-israéliennes à l'encontre de l'Algérie. Ammar Belhimer avait, de manière clairvoyante, consacré un article sur le sujet, intitulé «L'oeil du Mossad», le 26 novembre 2019, dans le Soir d'Algérie.» On trouvera dans cet essai plusieurs articles parus çà et là et qui viennent étayer ses thèses largement documentées. Un éclairage sur les truchements d’une guerre qui refuse de dire son nom.
K. Morsli
Hirak et propagande médiatique en contexte postcolonial, de Yazid Ben Hounet, aux éditions ANEP. Préfacé par le professeur Ammar Belhimer. 120 pages.