L’Ahellil du Gourara : Ce chant venu des temps anciens

En 2008, ce « genre musical » fut inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Cette consécration était le fruit d’un long et acharné travail effectué par Mouloud Mammeri et une équipe de jeunes chercheurs, tel Rachid Bellil. Dès 1971, l’écrivain qui occupait alors le poste de directeur du Centre de recherche en anthropologie, préhistoire et ethnologie (CRAPE), poussa sa recherche de manuscrits en langue amazigh jusque dans la région du Gourara, fief d’une tribu zénète, où il rencontra Moulay Seddik Slimane qui lui fit découvrir cette perle du patrimoine national, l’Ahellil. Après plusieurs séjours dans cette région, il fit graver un 33 tours par le biais du Crape et en collaboration avec l’Unesco intitulé Algérie Sahara.
Selon le profond et minutieux travail de R. Bellil, l’Ahellil constitue un recueil de poésies zénètes chantées dans un rythme lent. Mammeri le définissait comme : « Une manifestation à la fois musicale, littéraire et chorégraphique célébrée comme un spectacle profane en même temps qu’une cérémonie quasi religieuse ». En effet, les textes de ces corpus sont constitués de louanges à Dieu, au Prophète, aux saints de l’Islam et aux walis (saints hommes) de la région du Gourara. D’où le nom d’Ahellil qui vient de tahlil (louange) et non, comme l’ont déformé certains, ahl ellil (gens de la nuit).
L’Ahellil nous vient de la nuit des temps, il s’est transmis exclusivement par voie orale, les seules traces écrites ont été retrouvées dans de vieux manuscrits conservés depuis le quatorzième siècle dans la région du Touat.
Ces mélopées envoûtantes sont exécutées lors de la célébration du Sbou’ principalement. Mais aussi, dans d’autres fêtes religieuses ou même profanes. Aujourd’hui, alors qu’on prédisait la disparition de l’Ahellil, des dizaines de troupes formées par des jeunes de la région perpétuent cette mémoire et occupent les scènes musicales nationales et se produisent même à l’étranger. Ceux qui connaissent l’Ahellil, vous parleront de ce tempo qui emballe et de cette danse métronomique qui vous prend aux tripes. Pour ceux qui ne connaissent pas, ils peuvent visionner et apprécier les quelques séances de grande facture diffusées sur la Toile.
K. Morsli

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