
La notoriété du regretté Rabah Saâdallah est grande par ses articles, ses publications et surtout sa mémorable émission télévisée «Amdjad el-madhi» (Gloires du passé). Il remettait sous les feux de la rampe d’anciens sportifs (boxeurs, cyclistes… ) stars nationales en leur temps. Saâdallah était d’abord journaliste ; il a exercé au Journal d’Alger, puis à El Moudjahid.
Natif de la Casbah, il avait deux grandes passions : le sport et la musique populaire. Pour la première, il a produit plusieurs livres sur la boxe, le cyclisme et le football (Mouloudia, Gallia, équipe du FLN…), et pour la musique, il a laissé un chef-d’œuvre sur le chaâbi et la vie d’El Hadj M’hamed El Anka. Ce livre est une immersion dans la vie artistique algéroise du temps de maître Nador et de la relève qu’assura El Hadj M’hamed en imposant son style innovant, le chaâbi. L’auteur a, sur de longues années, compulsé, recoupé et vérifié une somme considérable d’informations, de témoignages et d’anecdotes.
A la lecture des premières moutures, Mahieddine Bachtarzi tint à préfacer l’œuvre en ces termes : «Il est réconfortant de constater, depuis quelque temps, que de jeunes journalistes algériens essaient de faire sortir de l’oubli les anciens artistes, comédiens, chanteurs, musiciens et les grands maîtres algériens disparus, qui, durant leur existence, ont sacrifié leur temps, leur santé et parfois leur vie, pour apporter joie, bonheur et gaîté à un peuple persécuté, et faire oublier les mauvais souvenirs de la faim, de la misère et les servitudes de la nuit coloniale, et marquer de leur empreinte cet important volet de la culture algérienne (…).»
Les termes élogieux de Bachtarzi traduisaient la minutie de la récolte d’informations sur le parcours d’El Hadj. Sur 150 pages, le livre écrit dans une chronologie rigoureuse et détaillée, revient d’abord sur l’ambiance du début du siècle à la Casbah pour remonter, avec mille et une anecdotes, jusqu’à la disparition du maître.
A travers les chapitres, on y rencontre les artistes contemporains d’El Anka, tels Mustapha Nador, Yahia El Ghouliane, Si Laïd El Arbi, Mustapha Wlid El Meddah, Omar Bebeo… et tant d’autres, chacun avec son parcours et son art. La masse de documents iconographiques projette le lecteur dans le passé tumultueux mais irisé de la Cité, où l’art côtoyait les affres de la colonisation. Un livre édité aux éditions Maison des livres qui constitue une si précieuse archive pour les amoureux du chaâbi et ceux qui affectionnent la recherche historique sur un passé artistique glorieux.
Kamel Morsli