Le centre culturel islamique a organisé, hier, à la Bibliothèque nationale du Hamma, une conférence intitulée «Avenir des bibliothèques au moyen- orient et en Afrique du nord : défis et prospectives», animée par le Dr yahia Bakli. La globalisation et ses mutations vertigineuses commandent, d'après l'enseignant universitaire, consultant bibliothécaire de développer, rapidement, une vision prospective et modulable en vue de pérenniser la place centrale de la bibliothèque dans les sociétés du savoir. Soumis à la loi de l'innovation permanente, le livre imprimé a tragiquement été supplanté par le livre digital, le PDF. Et ce dernier, avant même qu'il n'assoie son emprise, est détrôné par les plateformes, bibliothèques online et les réseaux sociaux qui lui vouent une concurrence féroce et déloyale.
Les nouvelles générations, les néo-lecteurs, dit-il, sont adiccts à de nouveaux formats de livres et développent de nouvelles habitudes et comportements que les décideurs doivent intégrer dans les politiques (de lecture) publiques, pour soit les mettre à jour et/ou anticiper les changements en cours. Il s'agit, concrètement, d'interroger le présent et l'avenir, savoir qui forme cette génération de nouveaux lecteurs, ses lubies instables et son rapport expéditif au temps. Sur internet, précise-t-il, la moyenne de concentration optimale ne dépasse pas une minute et demie. Citant des recommandations de référence de l'American library association sur la gestion des bibliothèques dans le monde, le conférencier exhorte les pouvoirs publics à se mettre au diapason de ce qui se fait ailleurs. «Exemple : les bibliothèques sont aujourd'hui équipées de scooters. Pourquoi ? Parce que le prêt externe exige aujourd'hui de pouvoir livrer à domicile l'ouvrage commandé par un lecteur». Les nouvelles approches innovantes sont déjà des réalités. Aux Usa, en Turquie, aux Emirats, au Qatar et autre Arabie Saoudite, qui ont développé des offres à jour, investissant dans les bibliothèques portatives (digitales) et dans les consortiums (fonds partagés de bibliothèques). En la matière, l'universitaire déplorera le défaut simple de politique stratégique. A l'ère du metaverse, de la réalité augmentée et du concept de l'autoformation cher à l'Unesco, des outils high-tech comme Tiktok, youtube, google sont déjà dépassés. Alors autant, préconise le spécialiste, remédier rapidement, au statu quo mortifère qui menace et les «gens du livres» et l'intégrité des espaces dépositaires de la mémoire et du patrimoine livresque national.
Le président du Haut Conseil de la langue arabe abonde dans le sens de la révolution technologique qui reconfigure les êtres et les espaces. Alors que chez nous, la tendance, note-t-il, est à la «fastfoodisation», à la disparition pure et simple des bibliothèques et des librairies. «A Belcourt, il n'en reste qu'une seule aujourd'hui. Et d’ici à 2030, il n'en subsistera plus à Alger».
A Istanbul, les bibliothèques demeurent ouvertes 24h/24. «A Damas, elles ne ferment qu’à 22 heures. On ne peut défier la globalisation. L'enjeu est : «résister en préservant ses particularismes ou disparaître.»
M. Az.