
- Microscopique mais omniprésent, le plastique s’infiltre dans l’air, l’eau et les organismes vivants. Une pollution persistante, portée par les vents et la surproduction.
Invisibles à l’œil nu, les microplastiques sont désormais présents dans tous les milieux, côtes, rivières, nappes phréatiques, sols agricoles, air, pluie, neige. Fragments de moins de cinq millimètres, ils proviennent de la dégradation de déchets plastiques ou sont directement ajoutés à certains produits industriels. Rien ne les arrête. Ils se propagent sans barrière ni frontière. Le plastique fait désormais partie intégrante de notre quotidien. Léger, souple, résistant et bon marché, il s’est imposé dans tous les secteurs tels que l’industrie, l’alimentation, le textile, l’automobile ou l’électronique. Mais sa durabilité fait aussi sa dangerosité. Aucun plastique ne disparaît complètement. Sous l’effet de la lumière, de la chaleur ou de l’usure, il se fragmente lentement. Un simple sac abandonné sur le bord d’une route finit par se transformer en milliers de microparticules qui contaminent les eaux usées, les sols ou l’atmosphère. Les principales sources sont bien identifiées. L’usure des pneus, les fibres synthétiques relâchées par les machines à laver, les peintures, les cosmétiques, les déchets mal collectés. Une partie de ces fragments finit dans les mers, une autre reste en suspension dans l’air ou se dépose dans les sols. L’invasion est lente, diffuse et planétaire. Ces déchets nuisent gravement aux ressources biologiques et à la qualité de l’eau. “Ils perturbent les activités maritimes et peuvent menacer la santé humaine”, alerte un biologiste. Leur longévité aggrave encore le problème. Une bouteille plastique peut mettre jusqu’à 450 ans à se décomposer. La mer Méditerranée concentre aujourd’hui la quasi-totalité des déchets plastiques recensés en mer, sur les plages ou dans les fonds marins. Selon une étude de 2018, ces déchets proviennent principalement de Turquie, d’Espagne, d’Italie, d’Égypte et de France. L’Europe, deuxième producteur mondial de plastique, rejette chaque année entre 150 000 et 500 000 tonnes de macroplastiques et jusqu’à 130 000 tonnes de microplastiques. Une part importante finit dans la Méditerranée, avec des effets dramatiques sur la faune marine. Plus inquiétante encore est la capacité des microplastiques à voyager sur de longues distances. Transportés par les vents, ils s’associent aux poussières, montent dans l’atmosphère et retombent avec la pluie ou la neige, parfois à des milliers de kilomètres de leur point d’origine. Ce cycle atmosphérique est désormais reconnu. Des microplastiques ont été retrouvés dans les précipitations tombées sur des zones reculées ou montagneuses. Leur présence dans l’environnement dépasse désormais la seule problématique écologique. Elle est devenue une question sanitaire. On les inhale chaque jour, notamment en milieu urbain. Des études ont détecté des particules plastiques dans les poumons, le sang et même dans le lait maternel. Ces microparticules peuvent transporter des substances toxiques, perturber le système hormonal ou provoquer des inflammations. Les effets à long terme restent encore mal connus, mais les signaux d’alerte se multiplient. Aucune norme internationale ne régule actuellement leur présence dans l’air ou dans l’eau. Face à cette réalité, les réponses doivent être multiples. Il est urgent de réduire l’usage du plastique dès la conception des produits, d’éliminer progressivement les articles à usage unique ou non recyclables, et de promouvoir des matériaux alternatifs biodégradables. Des solutions techniques existent déjà — filtres à microfibres sur les machines à laver, stations d’épuration plus performantes, reconfiguration des matériaux dans les secteurs du textile ou de l’automobile. Mais au-delà de la technologie, c’est tout un modèle de consommation qu’il faut remettre en question. Le mythe d’un plastique recyclable à l’infini ne tient plus.
A. F.