
Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Lotfi Boudjemaâ, a présidé, jeudi dernier à l’École supérieure de la magistrature (ESM) de Koléa, la cérémonie de sortie de la 28e promotion des élèves magistrats. Lors de cette cérémonie, 198 élèves ont reçu leurs diplômes après trois années de formation. Dans une allocution prononcée à l'occasion, le ministre a tenu à féliciter les nouveaux diplômés et a souligné le caractère noble et exigeant de leur mission future. Il a rappelé que cette réussite collective est le fruit d’un travail soutenu, et s’inscrit dans le cadre d’une politique globale de modernisation du secteur de la Justice.
Cette politique, impulsée par le Président de la République, vise à améliorer les conditions socioprofessionnelles des magistrats et à renforcer l’indépendance du pouvoir judiciaire, consacrée par la Constitution de 2020. Le ministre a insisté sur le rôle fondamental du juge dans la société. Il a précisé que la force de l’autorité judiciaire repose avant tout sur la compétence, l’intégrité et la conscience morale de ses membres. «Le juge doit incarner les principes de légalité, de justice et d’équité, et faire preuve d’un engagement constant envers la protection des droits des citoyens et la préservation des libertés», a-t-il souligné. Cette 28ème promotion porte le nom du regretté Mouloud Yelès, premier procureur-adjoint près la cour d'Adrar, décédé dans un tragique accident alors qu’il se rendait à son lieu de travail. Il a salué la mémoire de cet homme de justice exemplaire, soulignant son éthique irréprochable et son dévouement au service de la justice durant une carrière de près de 20 ans.
Un chantier de réformes pour une justice moderne et accessible
La formation des élèves magistrats a fait l’objet d’une attention particulière. Le ministre a indiqué que les programmes pédagogiques ont été développés pour répondre aux évolutions technologiques et aux mutations sociales. Cette modernisation de la formation est appelée à renforcer les capacités des futurs magistrats et à leur permettre de s’adapter aux défis actuels du monde judiciaire. Il a également souligné l’importance pour les juges d’être dotés de solides connaissances juridiques, d’une culture générale étendue et de hautes qualités morales. Abordant le volet des réformes engagées, M. Boudjemaâ a évoqué les grandes lignes du programme législatif en cours. Il a cité notamment la révision du Code de procédure pénale, récemment approuvée par le Parlement. Cette loi introduit de nouveaux mécanismes pour renforcer la transparence, améliorer la gestion des affaires pénales, moderniser les procédures et unifier les pratiques des juridictions. Il a également mentionné la révision en cours de la loi sur les procédures civiles et administratives visant à rapprocher la justice des citoyens. D’autres lois importantes ont été adoptées ou sont en cours de promulgation, notamment celles relatives à la lutte contre le blanchiment d’argent et à la protection des données personnelles. Ces textes visent, selon M. Boudjemaâ à adapter la législation nationale aux normes internationales et à mieux protéger la vie privée des citoyens dans un contexte de transition numérique et de transformation globale.
La volonté de l’État de poursuivre les réformes structurelles, réitérée
«Cette démarche vise à renforcer l’efficacité du système judiciaire, à améliorer la lutte contre la criminalité grave et à unifier les méthodes de travail des juridictions. Elle accompagne également les efforts de promotion de l’investissement et d’amélioration du climat des affaires», a-t-il affirmé. Il a exhorté les nouveaux juges à faire preuve de loyauté, de rigueur et de discernement dans l’exercice de leur mission. Il les a appelés à incarner les valeurs de justice, de neutralité et de responsabilité, en s’inspirant des principes constitutionnels qui régissent leur fonction. Il a rappelé que l’indépendance de la justice commence par la conscience du juge lui-même, et que cette conscience doit être guidée par l’intégrité et la volonté de garantir les droits de tous. Enfin, le ministre a réaffirmé que la dynamique de réforme engagée par l’État s’inscrit dans une vision claire fondée sur le service du citoyen et la garantie de ses droits. Il a exprimé sa confiance en la capacité des jeunes magistrats à participer activement à cette transformation et à contribuer à l’édification d’une justice forte, équitable et au service de la société. Il a salué l’ensemble des efforts consentis par la grande famille judiciaire.
Une école tournée vers l’excellence et l’ouverture
De son côté, le directeur de l’École supérieure de la magistrature, Abdelkrim Djadi, est revenu sur le rôle central de l’École dans l’accompagnement des réformes impulsées par la Constitution de 2020, notamment en ce qui concerne le renforcement de l’indépendance du pouvoir judiciaire. Cette indépendance, a-t-il insisté, repose sur des principes, mais aussi sur l’éthique, la conscience professionnelle et l’engagement constant pour la justice et l’équité. Depuis 2020, cinq concours nationaux ont été organisés, réunissant plus de 60 000 candidats. La promotion formée entre 2020 et aujourd’hui compte 545 nouveaux magistrats, dont 36 magistrats militaires. En parallèle, 990 élèves suivent actuellement leur formation dans les différentes juridictions du pays. L’École assure également une formation continue spécialisée, répondant aux défis contemporains. Plus de 1 500 magistrats ont été formés sur des thématiques comme le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme, la cybercriminalité, la récupération des avoirs criminels, la traite des êtres humains, le trafic de stupéfiants, les enquêtes spéciales et la coopération judiciaire internationale. Dans un souci de soutenir l’investissement et l’économie, l’École a renforcé ses modules autour de l’arbitrage commercial international, du droit des affaires, de la finance bancaire et de la comptabilité judiciaire. Elle a également intégré les nouvelles technologies, avec l’introduction de modules sur l’intelligence artificielle appliquée au droit. Soucieuse de s’ouvrir aux systèmes juridiques étrangers, l’École a développé des partenariats avec des institutions arabes, africaines et européennes, organisant des sessions conjointes de formation à Washington, Ankara et dans plusieurs capitales. «Nous aspirons à ce que les magistrats formés ici soient à la hauteur des évolutions dans tous les domaines», a conclu M. Djadi.
S. E.