Face au bilan macabre des accidents de la circulation, qui continuent d'endeuiller des milliers de familles algériennes chaque année, les pouvoirs publics ont décidé de passer à la vitesse supérieure.
Le ministre de l'Intérieur, des Collectivités locales et des Transports a présenté, devant la commission des transports et des télécommunications de l'Assemblée populaire nationale, le projet de loi portant code de la route, qui marque une rupture nette avec les pratiques du passé. Plus sévère, plus technologique et surtout plus global, ce texte ambitionne de mettre fin au «terrorisme routier» par une approche multidimensionnelle. Au cœur de ce dispositif, la qualification du conducteur est passée au crible.
Saïd Sayoud a insisté sur une révision drastique des conditions d’obtention du permis de conduire. Tout candidat au permis devra fournir, outre le certificat d’aptitude classique, des analyses toxicologiques certifiant la non-consommation de stupéfiants. Le projet de loi accorde une attention névralgique à la catégorie des conducteurs professionnels. Ceux qui ont la charge du transport collectif de personnes, du transport scolaire ou des matières dangereuses seront soumis à un régime de surveillance et de formation draconien.
L’objectif est clair : professionnaliser le métier, pour garantir que des vies humaines ne soient plus confiées à des mains inexpertes ou irresponsables. La grande nouveauté de ce texte réside dans l’extension de la responsabilité pénale. Le projet de loi ne se contente plus de sanctionner le chauffard ; il remonte toute la chaîne de causalité de l’accident. Désormais, les contrôleurs des mines et autres experts agréés devront prêter serment devant le tribunal. Le texte criminalise explicitement la délivrance de procès-verbaux de complaisance. Cette logique de responsabilisation touche également les auto-écoles, les importateurs de pièces de rechange et, fait marquant, les organismes chargés de la maintenance des routes.
Sur le terrain, les services de sécurité seront dotés d'équipements modernes permettant le dépistage instantané de drogues, le pesage des charges et le paiement électronique des amendes. Mais c'est sur le plan judiciaire que le couperet tombe. Le projet de loi introduit, pour la première fois dans la législation routière nationale, la notion de «crime», pour les infractions les plus graves, dépassant les simples qualifications de contraventions ou de délits. Les peines d'emprisonnement et les amendes sont revues à la hausse, assorties de sanctions complémentaires redoutables, telles que l'annulation du permis, la confiscation du véhicule et l'obligation, pour le contrevenant, de financer sa propre formation de sensibilisation à la sécurité routière. Enfin, pour piloter cette stratégie, le texte prévoit la création d'un «système national des points noirs».
Alimentée par les données de la Sûreté nationale, de la Gendarmerie nationale, de la Protection civile et de la santé, cette base de données permettra de cartographier les zones accidentogènes, pour mieux cibler les interventions. En proposant l’institution d’une «Journée nationale de la sécurité routière», le gouvernement veut ancrer cette lutte dans la conscience collective. Le ministre a révélé, par ailleurs, que le nombre des accidents de la circulation enregistré entre 2022 et 2024 a atteint 24.644 accidents, ayant causé 33.513 blessés et 3.159 décès, et ayant occasionné au trésor public près de 230 milliards de DA, en 2022, selon le rapport de l'Inspection générale des finances (IGF).
M. M.