Ouverture du transport maritime au secteur privé : Adapter le code maritime

Fodil Tighilt, Youcef Bouchellal de l’Ecole nationale supérieure maritime et le Pr Nacer Dadi Addoun de l’École supérieure de Commerce affirment dans une analyse co-signée que «l’Etat algérien doit ouvrir le transport maritime au secteur économique privé national. Les universitaires soulignent qu’au vu des besoins de l’Algérie, il est urgent de relancer le transport maritime». Dans le même sillage, l’étude explique que «les autorités de tout pays, notamment algériennes, devraient savoir que la maîtrise des transports maritimes est une source de gain et d’économie en devises, ce qui impacte la performance des entreprises économiques, et participe ainsi à l’équilibre de la balance des paiements et de la balance commerciale nationale ». A propos de l’affrètement, les universitaires diront que «la liberté des conventions est totale, les deux parties étant considérées comme de poids économique égal, les législations nationales n’édictent pas de règles impératives. Elles sont supplétives à la volonté des parties». L’analyse explique que l’ambiguïté nécessitant une solution «se trouve dans l’article 4 du décret 08-57 du 6 février 2008 fixant les conditions et les modalités de concession et d’exploitation des services de transport maritime, notamment l’alinéa 5 qui impose comme préalable d’être armateur». Il s’agit ainsi de «permettre l’affrètement de navires par des opérateurs algériens en amendant la loi n° 98/05 du 25 juin 1998 portant code maritime, notamment l’article 44 qui dispose que seuls les armateurs peuvent affréter des navires pour effectuer le transport sur l’Algérie». Cet article, déplorent les rédacteurs de l’étude, «a fermé l’accès au transport maritime aux sociétés algériennes». Une situation qui intervient au moment. Au niveau mondial, la séparation existe déjà entre l’armateur et le transporteur maritime, ainsi, même les armateurs aujourd’hui dans le monde ne font pas directement du transport maritime mais préfèrent affréter leurs navires aux opérateurs spécialisés. Aujourd’hui, l’objectif de la participation du secteur privé est de mobiliser un maximum de ressources, le financement privé des ouvrages spécialisés et affectés à un trafic déterminé n’est rien d’autre qu’une redistribution plus rationnelle des attributions et des responsabilités.
Le recours au secteur privé dans l’exploitation des services portuaires en Algérie permettra sans doute de soulager les efforts de l’Etat en la matière.
Fouad Irnatene

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M. Fethi Ferhane, docteur en économie
«tirer le secteur vers le haut»

Entretien réalisé par  Amel Saher

Le ministre des Transports a proposé avant-hier un plan d’action d’urgence pour relancer et développer le secteur dans tous ses segments d’activités.
M. Fethi Ferhane, docteur en économie et expert en management, réagit aux mesures proposées en répondant à nos questions.

El Moudjahid : Que pensez-vous du plan d’urgence du ministère pour redynamiser le secteur des transports ?
Fethi Ferhane : En tant qu’opérateur je ne peux que saluer une telle démarche, notamment en ce qui concerne l’ouverture des transports maritimes et aériens aux investisseurs privés nationaux. Cela va booster la concurrence car toute émulation va tirer un secteur vers le haut et aussi proposer de meilleurs services aux meilleurs tarifs. Il est vrai qu’actuellement ce sont des entreprises qui ont le monopole de ces activités et cela n’enlève en rien à leur qualité et performance. Maintenant, ouvrir le secteur au privé va permettre de lui insuffler une dynamique et inciter les entreprises à se mettre à niveau et être plus attentives à leur clientèle. C’est aussi un signal fort en direction des investisseurs étrangers car je ne connais pas d’opérateurs privés qui pourront se lancer seuls dans ces créneaux et, du coup, ils seront certainement amenés à conclure des alliances et partenariats avec des compagnies étrangères. C’est un signal fort qui exprime la nouvelle vision économique du gouvernement. Maintenant, il faudrait que cela soit accompagné par des mesures et décisions concrètes pour faciliter, débureaucratiser et accompagner les investissements.

La question liée à la création et développement des plate-formes logistiques en particulier au niveau  des zones frontalières figure dans  ce plan d’urgence...
Les plate-formes logistiques sont les artères de circulation du flux des marchandises. Si nous voulons exporter vers l’Afrique ou ailleurs, cela ne peut se faire sans un maillage de logistique, de routes et de moyens de transports de différentes typologies. Il est clair que ceci va faciliter les échanges et aider à mieux exporter. Nous avons en Algérie des produits de qualité qui ne demandent qu’à être expédiés vers le marché africain ou internationaux. Reste à savoir comment ces futures plate-formes seront gérées et est-ce qu’elles seront dotées de moyens sophistiqués pour être au diapason des standards internationaux.

Pensez-vous que l’Algérie dispose actuellement d’organismes et d’établissements qui assurent une formation d’excellence en management moderne pour accompagner le développement de ces plate-formes ?
Nous avons des managers, dont certains exercent depuis quelques années et d’autres depuis des décennies.. L’avènement du digital a bouleversé des économies entières. Nous avons des situations exceptionnelles, des crises financières et sanitaires qui obligent les managers de tous les secteurs confondus à mettre à niveau ses connaissances en management moderne à travers l’acquisition d’une nouvelle vision stratégique et des nouveaux outils et grilles d’analyse.
A. S.

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