
«La Cour constitutionnelle et son rôle dans l’édification de l’Algérie nouvelle» est le thème d’un colloque international, initié mardi à Alger par le Conseil constitutionnel, dans la perspective d’élaboration de la loi organique portant installation de cette instance aux fonctions multiples. «La Cour constitutionnelle est en effet l’un des jalons dans la consécration de l’État de droit, comme préconisé dans le projet de renouveau institutionnel du Président Abdelmadjid Tebboune», a souligné le président du Conseil constitutionnel, Kamel Fenniche.
«Il est impérieux de garantir l’indépendance de la Cour constitutionnelle en tant qu’organe de contrôle de la constitutionnalité, de régulation du fonctionnement des institutions, de préservation des droits et libertés fondamentaux, et de validation des résultats des consultations électorales et référendaires» a-t-il déclaré, dans son allocution d’ouverture du colloque. La cérémonie inaugurale de cet événement, organisé en collaboration avec la délégation du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), a été rehaussée par la présence des conseillers du chef de l’État, de membres du gouvernement et du représentant du chef d’état-major de l’ANP, le général Boualem Madi, directeur de la communication et de l’orientation. Des parlementaires, des responsables de plusieurs organisations nationales et internationales, des représentants du corps diplomatique, des experts en droit constitutionnel, ainsi que des universitaires ont aussi pris part à cette manifestation marquée par l’intervention de plusieurs constitutionalistes étrangers en visioconférence.
«En choisissant de concentrer nos réflexions sur la thématique de la Cour constitutionnelle dans la nouvelle République, c’est l’occasion de prendre la mesure de nos pratiques diverses en matière de justice constitutionnelle» a encore affirmé M. Fenniche, mettant l’accent sur le respect du principe constitutionnel de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs. Il explique que l’objectif du séminaire est «d’identifier les forces et les obstacles, ainsi que les facteurs de limitation et les éléments de stimulation de la justice constitutionnelle». Ceci en vue, a-t-il ajouté, de «tirer des enseignements des meilleures pratiques des uns et des autres, afin d’améliorer la qualité du juge constitutionnel».
Le colloque s’inscrit également dans la perspective d’élaboration de la loi organique portant installation de cette instance devant être opérationnelle dans un délai ne dépassant pas une année après l’adoption de la nouvelle Constitution, le 1er novembre dernier par voie référendaire.
Il a évoqué par ailleurs «les profondes mutations qui vit le pays dans le sillage du sursaut populaire du 22 février 2019, par lequel le peuple algérien a revendiqué, par des manifestations pacifiques ayant émerveillé le monde, son aspiration à une vie meilleure et sa volonté de consacrer une véritable démocratie et de bâtir un État de droit garant des libertés individuelles et collectives». Il a salué, à cette occasion, l’accompagnement et l’encadrement du Hirak béni par l’ANP, dans le sens de la consécration des aspirations légitimes du peuple et de la préservation de la stabilité institutionnelle et de la sécurité du pays. «Depuis son accession à la magistrature suprême, le Président Tebboune s’est engagé à cristalliser les revendications légitimes du peuple, à travers notamment une profonde révision de la Loi fondamentale ayant constitué cette étape cruciale du processus d’édification de la nouvelle République» a encore affirmé M. Fenniche.
Il a rappelé, à cet effet, les dispositions phares de la nouvelle Loi fondamentale traitant de la séparation équilibrée des pouvoirs, de la lutte sans merci contre les niches de corruption et la reconnaissance, sans exclusion aucune, du potentiel d’énergie dont dispose la jeunesse algérienne, qu’il faudrait mobiliser activement dans le processus d’édification de l’Algérie nouvelle et pour la préservation des intérêts des générations futures.
Il a cité aussi le nouveau code électoral et ses objectifs escomptés en termes de moralisation de la vie politique, à travers la promotion de nouvelles normes basées sur la transparence et l’intégrité des élections, consacrant aussi bien la souveraineté du peuple dans la désignation de ses représentants qu’une rupture radicale avec les mauvaises pratiques du passé.
Revenant sur l’importance de la Cour constitutionnelle, qui remplacera le Conseil constitutionnel comme le stipule la nouvelle Constitution, il dit que celle-ci sera dotée de prérogatives élargies qui lui permettront d’assumer pleinement son rôle axial, notamment dans la résolution des litiges institutionnels, et ce de façon à prémunir le pays du risque d’une crise politique pouvant conduire à la paralysie de l’une de ses institutions.
«L’autre nouveauté introduite dans la nouvelle Constitution, l’élargissement de l’application du principe d’exception d’inconstitutionnalité à l’ensemble des lois organiques», a expliqué le président du Conseil constitutionnel, qui a présenté une communication sur la régulation du fonctionnement des institutions constitutionnelles par le juge constitutionnel.
La représentante du PNUD : «La Cour constitutionnelle est l’interprète exclusif de la Constitution»
À la faveur de la création de la Cour constitutionnelle, «l’ensemble de l’arsenal normatif en Algérie sera soumis au contrôle du juge constitutionnel, que ce soit a priori ou a posteriori», a affirmé, pour sa part, la représentante résidente du PNUD en Algérie, Mme Blerta Aliko. «Loin de se limiter à un simple changement d’appellation, la transformation du conseil en cour constitutionnelle porte d’importantes implications autant sur le plan de la position institutionnelle de cette cour qu’au niveau de l’étendue de ses attributions», a-t-elle indiqué.
De son avis, «la Cour constitutionnelle est l’interprète exclusif de la Constitution, et peut être saisie par les principaux pouvoirs pour se prononcer sur la signification d’une ou de plusieurs dispositions de la Constitution». Sur l’exception d’inconstitutionnalité, elle dit que «ce mécanisme est non seulement une garantie des plus effectives en matière de protection des droits et des libertés, mais il ouvre également le contentieux constitutionnel et l’accès à la cour aux citoyens». En définitive, «le juge constitutionnel est garant de la Constitution, de l’équilibre institutionnel, des droits et des libertés». Plusieurs universitaires et experts en droit constitutionnel ont présenté des communication traitant du fonctionnement de la Cour constitutionnelle et de ses attributions. Les travaux se poursuivront aujourd’hui et seront sanctionnés par une série de recommandations.
Karim Aoudia