Forum de la mémoire d’El Moudjahid : l’histoire des déportés algériens racontée à Tissemsilt

La maison de la culture Mouloud- Kacem-Naït Belkacem a abrité, jeudi dernier, un forum historique sur la contribution du film documentaire à la préservation de la mémoire et à la transmission du message de la glorieuse Révolution de Novembre, ainsi qu'à l'ancrage des valeurs et des principes de l'histoire.

Cet événement a été organisé par l'association Machaâl Echahid, en coordination avec le quotidien El Moudjahid et la direction des moudjahidine et des ayants droit de Tissemsilt.

Le forum a été inauguré par Abad Mohamed, président de l'association Machaâl Echahid, qui a prononcé une brève allocution exposant l'objectif d'organiser ce type de rencontre. Il a souligné l'importance de commémorer et de rétablir la mémoire collective pour les générations futures. En marge du forum, le wali de Tissemsilt, M. Bouzaid Fethi, a honoré le documentaliste et cinéaste Saïd Oulmi, ainsi que le président de l'association Machaâl Echahid, Abbad Mohamed. Ce dernier a remis une distinction au wali, soulignant ainsi l'importance de cette collaboration.

Devant un public attentif, Saïd Oulmi a présenté des extraits de 21 minutes de son film «Les Témoins de la Mémoire» (2004), une œuvre qui réhabilite la mémoire des Algériens déportés en Nouvelle-Calédonie. Le réalisateur a contextualisé cette déportation (1864-1897), relevant de la loi de 1854 sur les bagnes coloniaux, un outil répressif au même titre que le code de l’indigénat. Les conditions étaient décrites comme inhumaines. les déportés étaient entassés dans des cages de fer étroites, engendrant de nombreuses morts, tandis que certains étaient même jetés à la mer. Oulmi a ensuite soulevé des interrogations fondamentales : le film documentaire peut-il devenir un pont pour commémorer et réhabiliter la mémoire, tout en la transmettant aux générations futures ? Peut-il briser le mur du silence et de l’oubli qui entoure cette page négligée de l'histoire ? En déconstruisant la mémoire coloniale imposée, peut-il reconstruire celle des déportés ? Enfin, quel impact ce travail pourrait-il avoir sur l’opinion publique et la réhabilitation collective ? Le réalisateur, un demi-siècle après l'indépendance, a exploré ces lieux oubliés pour donner voix aux silences qui les habitent.

Il a recueilli des récits bouleversants des derniers survivants ayant enduré l'innommable. Ces témoignages, empreints de silences lourds de sens, révèlent des regards hagards portant le poids d'instants éternels et indélébiles. Au-delà de ces témoignages, le réalisateur a enrichi son récit de diverses sources, tant algériennes que françaises, s’appuyant sur les études d'historiens, de chercheurs, d'anciens soldats de l'armée française opposés à la guerre, de moudjahidine et de figures politiques. Cette œuvre, soigneusement croisée et vérifiée, élève le documentaire au rang de référence académique et pédagogique, riche et fiable.

Le documentaire d’Oulmi, au-delà de son rôle historique, se révèle être un acte de résistance contre l’oubli.

S. M. N.

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