Dans cet entretien, le président du CREA revient sur les décisions phares ayant marqué la réunion de jeudi dernier, organisée par le président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, avec les opérateurs économiques nationaux. Il fait savoir que le Président est prêt à accueillir les industriels, pour plus de compétitivité à l’international. Kamel Moula détaille aussi les objectifs de la commission de suivi des résultats de l’IATF.
El Moudjahid : Lors d’une rencontre, ce jeudi au CIC, destinée à conforter le succès de la 4e édition de l’IATF, le président de la République a réitéré son engagement à garantir un accompagnement conséquent aux opérateurs qui aspirent à élargir leurs activités industrielles et productives. En votre qualité d’organisation patronale, comment accueillez-vous cette assurance ?
Kamel Moula : Évidemment, nous sommes profondément satisfaits du soutien permanent exprimé par Monsieur le président de la République. Il est le reflet de sa détermination à bâtir une économie nationale à la hauteur des aspirations légitimes des citoyens. Ce choix stratégique vise non seulement à consolider la souveraineté économique de l’Algérie, mais également à affirmer sa place en tant qu’acteur incontournable et influent dans son environnement régional et sur la scène internationale. Par ailleurs, cet appui illustre l’engagement constant et sincère de Monsieur le président de la République, qui n’a jamais ménagé ses efforts pour encourager et accompagner les opérateurs économiques nationaux. Son objectif est de leur offrir les conditions nécessaires pour gagner en compétitivité, en performance et en ouverture vers les marchés extérieurs. Rappelons-nous que dans son discours d’investiture du second mandat, il a soutenu que son quinquennat serait «exclusivement économique», consacré aux investissements productifs, à la promotion de l’exportation et à la concrétisation des grands projets structurants. Aujourd’hui, nous nous inscrivons pleinement dans cette dynamique nouvelle, porteuse d’une relance économique et traduisant une orientation politique ferme en faveur de la diversification, de la modernisation et de l’internationalisation de l’économie algérienne.
Plus concrètement, qu’attendent les opérateurs comme véritables mesures d’accompagnement ?
S’agissant des mesures d’accompagnement, il faut rappeler que les contrats signés lors de l’IATF concernent à la fois des investissements dans plusieurs secteurs d’activité, mais aussi des engagements d’exportation. Pour honorer ces contrats et en même temps renforcer la production nationale, l’opérateur économique doit être accompagné sur toute la chaîne : lancement de nouveaux projets, extensions d’usines, mise en production et accès aux marchés extérieurs. Cela implique la levée de toute contrainte qui peut être liée à l’investissement, notamment l’accès au foncier industriel, la facilitation des procédures d’importation des matières premières et des équipements, la mise en place d’un accompagnement financier adapté ainsi que le renforcement de la logistique. Autant d’axes de progrès dont Monsieur le Président est parfaitement conscient.
Lors de la même rencontre, le président de la République a également annoncé que la commission de suivi des résultats de l’IATF sera prochainement rattachée aux services du Premier ministre. Le CREA fait-il partie de cette commission et quelles sont exactement ses missions ?
Nous espérons faire partie de cette commission, car notre rôle, en tant qu’organisation patronale, est de relayer la voix des opérateurs économiques et de contribuer directement en apportant notre expertise et notre connaissance du terrain. Le CREA a gagné la confiance des opérateurs économiques de par l’accompagnement mis en place depuis maintenant 3 ans. Les opérateurs nous sollicitent, voire nous tiennent informés des avancées de leurs projets. Nous sommes à même d’apporter des informations en temps réel sur les difficultés rencontrées.
Les principales missions de cette commission consisteront à :
• assurer le suivi régulier de l’état d’avancement des projets et contrats
• coordonner l’action entre les différents départements ministériels et les opérateurs
• identifier les blocages administratifs, financiers ou logistiques et proposer des mesures correctives.
Concrètement, cette commission sera un outil opérationnel de pilotage et de mise en œuvre.
Dans votre allocution, vous avez souligné la nécessité de lever «tous les obstacles qui freinent le processus économique» pour concrétiser le challenge des 11,4 milliards de dollars d’exportations hors hydrocarbures de contrats signés. Quels sont ces obstacles ?
Comme je l’ai souligné plus haut, la persistance de cette hydre bureaucratique, notamment dans certains établissements administratifs et financiers, met sérieusement à mal les efforts des autorités et des opérateurs économiques qui veulent investir dans de nouveaux projets et développer les entreprises existantes. Monsieur le président de la République a eu lui-même à dénoncer à maintes reprises cette situation à savoir la difficulté de l’administration à réaliser ses orientations. Je cite à ce propos des lenteurs dans le traitement des dossiers dont certains restent sans réponse, ce qui engendre des pertes considérables. A ce titre, il faut dire que les établissements bancaires doivent passer à la vitesse supérieure dans le traitement des dossiers d’investissement. Comme conséquence directe, ces lenteurs et ce manque de réactivité nuisent à la politique de promotion de la production nationale et la réduction de la facture des importations. Nous avons besoin d’une administration fluide et d’un secteur bancaire plus réactif. Les retards ou toute forme de blocage doivent être éliminés afin de ne plus perdre de temps dans l’acquisition de matières premières ou de nouveaux équipements. Cela, pour soutenir et encourager les initiatives, renforcer la confiance et créer un environnement plus favorable au développement économique de notre pays afin d’assurer la durabilité de notre croissance industrielle et technologique.
Un mois après l’événement, peut-on dire que l’Algérie n’était pas seulement le pays hôte de l’IATF-2025, mais aussi un tremplin pour d’autres économies africaines ? Certains considèrent que l’IATF-2025 est plus qu’un forum : peut-on parler d’une promesse tenue ?
Effectivement, la promesse a été tenue et le défi relevé. A travers l’organisation de l’IATF-2025, notre pays a démontré sa capacité à accueillir un événement continental d’envergure, si bien que du 4 au 10 septembre, Alger est devenue la capitale du commerce intra-africain. Les chiffres parlent d’eux- mêmes : 2 148 exposants venant de 49 pays africains et 21 pays hors Afrique, 112 000 visiteurs et 958 acheteurs professionnels. Faut-il crier victoire et cessez de se battre économiquement ? La réponse est non ! Il s’agit maintenant de transformer cet évènement en véritable levier de croissance pour notre pays et pour toute l’Afrique.
En tant que président d’une organisation patronale, le CREA en l’occurrence, vous vous êtes personnellement engagé à contribuer au succès de cette 4e édition de l’IATF. En quoi l’IATF incarne-t-elle un projet économique pour votre organisation, et au-delà ?
L’IATF-2025 a eu l’immense mérite de décomplexer de nombreuses entreprises algériennes dans la promotion de leurs productions et donc dans leur capacité à passer à l’acte d’exporter. Cet événement a permis de secouer «le cocotier» qui a, pendant longtemps, plombé l’activité de nos entreprises et de mobiliser tous les acteurs, qu’ils soient institutionnels ou économiques. L’IATF a également montré que l’Algérie peut être un pont solide entre l’Afrique et la Méditerranée et un moteur pour la ZLECAF. Il est désormais temps de consolider cette position, de renforcer nos infrastructures, et de continuer à encourager l’innovation et la compétitivité. La coopération Sud/Sud est un grand chantier économique, aussi bien pour notre organisation que pour tous les opérateurs à travers le continent africain. Il va sans dire que le succès économique de notre pays, de l’Algérie Nouvelle que Monsieur le président de la République appelle de tous ses vœux, repose sur la combinaison de la qualité de nos industries, de la mobilisation nationale et de notre capacité à créer un environnement qui pousse à la performance, à l’excellence et à l’investissement. Si nous poursuivons sur cette voie avec rigueur et ambition, l’Algérie s’imposera durablement comme un acteur majeur de l’économie africaine et internationale.
Tous les records ont été battus lors de la 4e édition de la Foire commerciale intra-africaine (IATF-2025), couronnée par la signature de contrats d’une valeur de plus de 48,3 milliards de dollars, dont 11,4 milliards au profit de l’Algérie. Vous attendiez-vous à un résultat aussi retentissant ?
D’abord, permettez-moi de vous dire que cette réussite a été le fruit d’un travail collectif remarquable entre opérateurs économiques, institutions publiques, partenaires africains et internationaux, le tout avec l’appui sans faille du président de la République. Ils ont tous conjugué leurs efforts et permis de dépasser tous les objectifs fixés par l’Afreximbank. Plusieurs de nos filières ont créé la surprise chez nos amis africains : celles de l’électroménager, de l’agroalimentaire, de la chimie, de la sidérurgie, du ciment, du pharmaceutique, des dispositifs médicaux ou des motocycles qui peuvent désormais être reconnues comme des références d’excellence sur le continent africain si nous concrétisons cette réussite par une fidélisation de nos nouveaux partenaires commerciaux, c’est-à-dire plus clairement nos nouveaux clients. Nous en faisons aujourd’hui un moment de fierté partagé suite à la grande réussite de l’IATF-2025. Nous avons conscience que le succès de l’IATF-2025 va ouvrir de nouvelles perspectives économiques pour notre pays.
F. B.