
Le Premier ministre a annoncé, depuis Tindouf, le lancement de la première zone franche commerciale dans cette wilaya, avant la fin du premier semestre de 2024, et souligné que «la dynamique économique que connaît la région sera renforcée, grâce aux projets en cours pour le développement des infrastructures, notamment après l’ouverture du poste frontalier algéro-mauritanien». Ce projet de première zone franche commerciale va sans doute ouvrir des perspectives de développement.
Il faut rappeler qu’à la faveur de la promulgation du décret exécutif 22-15 daté du 20 juillet 2022, fixant les règles régissant les zones franches, les pouvoirs publics ont consacré leur volonté d’utiliser les zones franches comme un levier d’attractivité pour les Investissements directs étrangers (IDE). L’idée n’est pas nouvelle et remonte aux débuts des années 1990, période durant laquelle le pays explorait les meilleurs moyens pour faire réussir son plan d’ouverture économique, en promulguant le décret législatif 94-320 du 19 octobre 1994, relatif aux zones franches.
La dénomination du texte juridique créant ces zones exprime parfaitement le contexte dans lequel ce dernier fut pris. Le pays traversait une conjoncture pénible, due à une situation sécuritaire contraignante et des mesures d’ajustement structurel imposées par les organisations financières internationales sur tous les plans, et la volonté politique ne suffisait pas pour l’attrait de nouveaux investissements étrangers. Cette initiative avait néanmoins le mérite de mettre en place un dispositif susceptible d’inciter et d’encourager l’investisseur étranger à s’installer sur le territoire national.
Le texte permettait une bonne visibilité du dispositif, notamment grâce à un cahier des charges précis, prévu pour la gestion des zones franches, protégeant l’économie nationale contre les effets de la concurrence externe. Et dans la perspective de relancer le projet et la création d’autres zones nouvelles, le gouvernement a promulgué, en 2003, l’Ordonnance 03-02 du 19 juillet 2003, relative à la création des zones franches.
Enseignant d’économie à l’université de Mostaganem, le Dr Douah Belkacem fait savoir que la réalisation des projets de zones franches «est orientée vers l’exportation par un capital étranger, avec la possibilité de faire bénéficier le marché local, en construisant, entre autres, un parc industriel pour développer les industries locales, particulièrement l’industrie agroalimentaire, l’industrie chimique, la construction navale et l’industrie des matériaux de construction, et prévoir également l’amélioration des installations portuaires». Il souligne que dans sa phase de transition économique, «l’Algérie a traversé des périodes difficiles, entraînant des signes ennuyeux, caractérisés, entre autres, par un taux de croissance faible, un commerce mono exportateur et une grande propension à importer du secteur productif». Et d’ajouter : «Pour pallier ces insuffisances, l’Algérie n’avait d’autres choix que de remédier à cette situation. Raison pour laquelle, une série de mesures a été prise, dont la relance de l’investissement, une démarche nécessitant d’importantes ressources financières, dont celles relatives à l’ouverture envers les capitaux étrangers.» C’est à partir des années 1990 que l’Algérie s’engagea dans un processus de réformes globales. La situation économique et financière du pays exigeait pourtant des décisions cohérentes, pour le libérer progressivement de contraintes majeures.
Dans le cadre des réformes sectorielles caractérisant son passage à l’économie de marché, l’Algérie a opté pour la création de zones franches par le biais desquelles elle souhaite bénéficier des avantages spécifiques à ce type d’investissements étrangers, en particulier «la création d’emplois, la stimulation des flux de revenus en devises, et de favoriser la création d’industries orientées sur les marchés extérieurs, ainsi que le transfert de technologies».
La création de zones franches permet, selon le Dr Douah, de «faire sortir la région de l’isolement et de promouvoir le développement économique global, par la création de nouveaux postes de travail, la réalisation de groupements pour les travailleurs, et de faire bénéficier l’environnement immédiat des avantages comparatifs». Il s’agit également de «réaliser des petites entreprises en sous-traitance, et de développer la transformation industrielle». Cela favoriserait, selon l’universitaire, la réalisation d’une valeur ajoutée importante, ainsi que les revenus en devises concernant l’importation des équipements et matières premières de l’intérieur du pays, et les produits de location et prestations fournies. Figure également l’intérêt du «transfert de technologies et développement des compétences par les experts, les licences d’exploitation, et les stages de perfectionnement» Enfin, les zones franches peuvent être considérées comme canaux de diplomatie économique, «en vendant l’image de marque de la zone par l’information des opérateurs économiques étrangers, à travers nos représentations diplomatiques, la participation efficace aux expositions et séminaires», conclut le Dr Douah.
Tahar Kaidi