Selon le ministre des Énergies renouvelable et de la Transition énergétique, Chems Eddine Chitour, il est grand temps de sortir de l’ébriété énergétique actuelle, pour aller vers la sobriété énergétique qui nous permettra de consommer moins en consommant mieux. Intervenant au Forum du journal Echaâb, il a expliqué que l’Algérie consomme 60 millions de tonnes de pétrole et 800 millions de mètres cubes de gaz par semaine. «Si nous continuons ainsi, nous aurons d’ici 2030 un énorme déficit et nous ne pourrons plus exporter», a-t-il estimé.
La consommation énergétique repose, selon M. Chitour, sur trois domaines : les transports, qui représentent environ 40%, l’habitat et le résidentiel, environ 40%, et enfin l’agriculture et l’industrie, qui se partagent les 20 % restants. Cela est énorme, d’autant plus qu’il ne s’agit pas de secteurs producteurs. «La sortie de la dépendance des énergies fossiles s’inscrit dans la nouvelle stratégie de rationalisation des dépenses et de relance économique engagée par l’État, comme objectif urgent, visant à mettre fin à l’importation de carburants à l’horizon 2024», dit-il. S’agissant du secteur de l’Habitat, le ministre a fait savoir qu’il a été convenu de mettre en place de nouveaux cahiers des charges avant toute nouvelle construction, où il sera tenu compte de l’aspect économie d’énergie par le choix des matériaux, et le double vitrage.
Généraliser le chauffe-eau solaire
Dans les permis de construire, seront indiquées les règles à appliquer dans les habitations avant la délivrance du certificat de conformité, un diagnostic énergétique sera élaboré pour évaluer la conformité aux normes par de jeunes entreprises, ce qui va permettre de créer de l’emploi et de la richesse. Pour économiser l’énergie consommée par les ménages, le ministre a recommandé l’installation de chauffe-eau solaires, rappelant que le pays ambitionne de mettre en place 100.000 unités l’année prochaine. Des réservations seront faites dans les nouvelles constructions, des prototypes existent, en cours d’homologation avec le CDER. «Nous allons, avec les ministères de l’Habitat et de l’Industrie, mettre en œuvre la possibilité de créer des entreprises de réalisation de chauffe-eau solaires, ce sont des métiers nouveaux. L’État va encourager cette transition vers les énergies vertes, en prenant à sa charge une partie du prix de cet équipement. Cette transition permettra aux citoyens de diminuer leur facture énergétique, tout en faisant gagner au pays 40% d’énergie», affirme-t-il. Pour le secteur des Transports, le ministre précise que celui-ci consomme 40% de l’énergie produite. «Nous importons environ 2 millions de tonnes de carburants pour les besoins des transports qui nous coûtent près de 2 milliards de dollars», dit-il, tout en suggérant d’encourager la conversion du parc automobile au GPL. «Dans ce secteur, nous misons sur la conversion, le parc de l’administration au sens large, soit 100.000 véhicules, doit être converti aux carburants propres. Nous avons fait le listing ministère par ministère, pour voir ce qu’il y a lieu de convertir. Nous avons mis un point focal au niveau de chaque département ministériel.»
Transition vers le GPL, une nécessité
M. Chitour a estimé que le pays dispose d’un savoir-faire dans ce domaine qu’il faut stimuler, soulignant que 80.000 véhicules ont été convertis en 2020. «Nous envisageons de porter ce chiffre à 200.000 en 2021, ce qui représente 200.000 tonnes d’essence d’économie. Nous allons acheter 200.000 kits et nous sommes gagnants, parce qu’il faut aussi poursuivre la conversion pour des véhicules particuliers», a-t-il ajouté. L’État va prendre en charge 50% du coût des kits, ainsi le possesseur d’un véhicule à essence récupère en moins d’une année l’investissement à 50% pour la conversion au GPL du fait qu’il coûte cinq fois moins cher que l’essence. «J’ai sollicité le ministère des Finances pour débloquer les kits et les distribuer non seulement aux 600 opérateurs privés et à Naftal, mais aussi au profit des jeunes. Nous avons l’ambition en effet de lancer 200 micro-entreprises dans ce cadre.» Par ailleurs, la disposition interdisant les véhicules consommant beaucoup de carburant fera économiser l’équivalent de 20% de carburant, soit 2 milliards de dollars. Le passage graduel au GPL, au GNC et à la voiture électrique va éviter l’importation des carburants, et le pays deviendra vendeurs de carburants à tous les pays africains qui n’ont pas de raffineries. S’agissant du plan solaire, M. Chitour assure que l’État veut réaliser de petites centrales de 10 à 50 mégawatts en fonction de la demande de certains secteurs, dont l’agriculture et l’industrie. «Nous disposons du potentiel humain pour cela, avec 300.000 diplômés par an, il faut donc libérer l’initiative, d’autant que nous n’avons pas d’autre choix que d’aller vers la transition énergétique, il faut aussi établir des partenariats d’exception avec des pays, tels que la Chine et l’Allemagne», a-t-il conclu.
Salima Ettouahria
