
Le 8 février 1958, une date importante dans l’histoire des deux pays voisins, l’Algérie et la Tunisie, qui ont vécu ce jour dans la douleur : les bombardements du village tunisien Sakiet Sidi Youssef qui a coûté la vie à 79 personnes innocentes, 20 écoliers et 11 femmes des deux nationalités.
Ce massacre contre des civils algériens et tunisiens est un crime de guerre que l’armée française n’a jamais reconnu devant le reste du monde. Sakiet Sidi-Youssef, région frontalière, est le symbole du sacrifice et de la solidarité entre les deux peuples qui ont toujours combattu l’impérialisme et les atteintes contre les pays opprimés. Le bombardement de Sakiet Sidi Youssef, qui n'est pas un simple fait parmi tous ceux de la Révolution du 1er novembre, a cependant contribué au déclenchement des événements qui aboutirent à la fin de la IVe République. Pour commémorer cette date, le ministère des Moudjahidine et des Ayants-droit a organisé hier au centre national d’études et recherches sur le mouvement national et la révolution du 1er novembre 1954, à El-Biar, une conférence historique intitulée «La solidarité algéro-tunisienne durant la lutte de Libération, les événements de Sakiet Sidi-Youssef, un exemple». Dans son allocution d’ouverture, le secrétaire général du ministère des Moudjahidine, Laid Rebigua, a indiqué que les événements de Sakiet Sidi Youssef ont unifié le destin et la vision des deux peuples. La Tunisie a soutenu et accueilli à bras ouverts les fils de l’Algérie et les moudjahidine qui ont lutté sans relâche pour l’indépendance de l’Algérie. L’Algérie a soutenu et soutiendra continuellement la Tunisie, la dernière preuve en date est le don de 11 tonnes de produits médicaux pour aider l’Etat tunisien à lutter contre la propagation de la Covid-19, suite aux instructions du Président de la République.
«Cette conférence historique a pour objectif de rappeler à tous que les deux pays ont un destin commun et l’histoire unit les deux peuples ; les barrages et les frontières ne se mettront jamais entre les deux peuples frères et le sang versé durant les attaques de l’armée française a renforcé la solidarité et la fraternité entre les deux pays», a-t-il relevé. «Les évènements de Sakiet Sidi Youssef restent un symbole qui incite nos deux pays à travailler ensemble pour améliorer leurs relations de coopération en vue de concrétiser un partenariat stratégique», a déclaré, pour sa part, l’ambassadeur tunisien, Ramdhane Al-Fayedh. Il dira que les relations bilatérales entre les pays voisins sont excellentes et exceptionnelles sur tous les plans, précisant que la coordination et la consultation entre les deux pays n’ont jamais cessées.
Une base logistique pour la lutte armée
Il précisera que l’évènement de Sakiet Sidi Youssef est très important dans l’histoire des deux pays. Le sang lie nos deux nations qui ont payé un lourd sacrifice dans la lutte contre le colonialisme. C’est également une occasion pour se rencontrer chaque année et organiser des célébrations grandioses pour commémorer cette douloureuse date. Il indiquera que la région de Sakiet Sidi Youssef «est l'un des plus importants jalons de la mise en place de cette stratégie dans le but de développer la région et d'assurer la sécurité et la stabilité des deux peuples».
L'ambassadeur a remercié le Président
Abdelmadjid Tebboune et les autorités algériennes pour l’aide médicale, composée de moyens de lutte contre la Covid-19 à destination de Sakiet Sidi Youssef, qui a été envoyée samedi dernier à partir d'Alger. Dans son intervention intitulée «Les événements de Sakiet Sidi Youssef, symbolique du lieu et du temps», le docteur Said Djilaoui, professeur à l’université Amhand-Akli de Bouira a souligné que la région frontalière était après l’indépendance, en 1956, en réalité une base logistique et politique pour le FLN, comprenant des bases de transport, des stations de transmission et de diffusion radiophoniques et des centres d’instruction, ainsi que des dépôts d’armes pour alimenter les moudjahidine dans leur mission. La frontière algéro-tunisienne au niveau de Sakiet Sidi Youssef est une région stratégique et économique par excellence, a-t-il expliqué, précisant que la région était forte de plusieurs milliers de combattants situés dans l’«axe de feu». La région en question, a-t-il ajouté, comptait pas moins de 4.400 moudjahidines, 23.000 armes et 6.500 autres soldats composant 10 divisons. C’est pour tous ces facteurs que «la France voulait détruire, coûte que coûte ,la région et casser le FLN, mais ce fut un échec».
Mohamed Mendaci
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Une solidarité jamais démentie
Le ciment de la fraternité algéro-tunisienne
Les massacres de Sakiet Sidi Youssef commis par les forces coloniales françaises en 1958, au cours desquels près de 80 civils algériens et tunisiens, dont des femmes et des enfants, ont péri, auront scellé à tout jamais les liens de fraternité et de solidarité actives entre les peuples algérien et tunisien, qui partagent avec les autres peuples maghrébins la communauté de destin. C'est dans cet esprit de solidarité que sur décision du Président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, 11 tonnes de médicaments et moyens de lutte contre la pandémie de Covid-19 ont été acheminés vers la ville de Sakiet Sidi Youssef. En recevant en février 2020 son homologue tunisien, Kaïs Saïed, le Président Abdelmadjid Tebboune avait réaffirmé que l'Algérie était prête à apporter toute son aide à la Tunisie qui traverse une conjoncture difficile, tant au plan financier qu'économique», faisant part de la décision de «dépôt de 150 millions USD à la Banque centrale tunisienne et la poursuite des facilitations de paiement de l'approvisionnement en gaz et hydrocarbures».
Le Président Tebboune s'était félicité, en outre, de la convergence de vues «totale et absolue» entre l'Algérie et la Tunisie «sur tous les plans», y compris sur les questions régionales et internationales, à leur tête le dossier libyen.
L'Algérie et la Tunisie sont liées depuis 2008 par un accord commercial préférentiel. Depuis la signature de cet accord et l'adhésion de l'Algérie à la Grande zone arabe de libre échange (GZALE) en janvier 2009, les échanges commerciaux entre les deux pays ont enregistré une augmentation substantielle.
Selon les statistiques des douanes algériennes portant sur le commerce extérieur durant les 11 premiers mois de l'année 2019, l'Algérie a exporté vers la Tunisie un peu plus d'un milliard de dollars, un chiffre en progression de 13% par rapport à la même période en 2018. Les exportations algériennes vers la Tunisie sont
constituées essentiellement d'hydrocarbures et dérivés.
Quant aux importations provenant de la Tunisie, qui ont avoisiné les 400 millions de dollars (en hausse de 3,7% par rapport à 2018), elles comprennent, entre autres, des produits agroalimentaires, des équipements industriels, du textile et de l'habillement.
Les investissements communs ont également connu une croissance soutenue, notamment dans le secteur énergétique, avec une série d’accords signés pour le renforcement du partenariat énergétique.
Ces accords portent notamment sur l'augmentation de la capacité d'interconnexion électrique, l'augmentation de la quantité de GPL (gaz de pétale liquéfié) exporté vers la Tunisie et l'approvisionnement des régions frontalières en gaz algérien. La coopération énergétique s'est, en outre, élargie aux activités de prospection et de production des hydrocarbures entre la société nationale Sonatrach et l'Entreprise tunisienne des activités pétrolières (ETAP).
Dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, le crime organisé et la contrebande, les deux pays entretiennent une étroite collaboration, notamment au niveau des zones frontalières.
Les bombardements aériens de Sakiet Sidi Youssef, qui avaient fait 79 morts, dont 20 écoliers et 11 femmes, ont apporté à la guerre de Libération nationale le soutien de l'opinion internationale qui avait condamné unanimement le colonialisme français en Afrique du Nord.
La France coloniale a tenté de justifier son crime par la poursuite des unités de l'Armée de libération nationale (ALN) sur le territoire tunisien, mais ces faux prétextes ont rapidement révélé leur caractère mensonger lorsque les médias internationaux ont dévoilé la vérité sur l'agression barbare de l'armée française sur des civils», note Athmane Menadi, enseignant à l'université de Souk-Ahras.
«Loin de briser par la terreur les liens de fraternité des deux peuples voisins, les bombardements français de Sakiet Sidi Youcef ont cimenté davantage leur solidarité», affirme-t-il.
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Tébessa
Des chercheurs appellent à intensifier les études
Des chercheurs de l’université Larbi-Tebessi de Tébessa ont mis l'accent sur l'impératif d'intensifier les études et les recherches dans le domaine de l'histoire afin d’approfondir les connaissances sur les évènements de Sakiet Sidi Youssef.
Le chef du département histoire et archéologie à la faculté des sciences sociales et humaines, Farid Nasrallah, et son confrère, le professeur et chercheur en histoire de la révolution, Atef Seradj, ont appelé les chercheurs à se pencher davantage, avec la coopération des parties concernées, dont le ministère des Moudjahidine, sur les massacres de Sakiet Sidi Youssef.
Dans une déclaration à l’APS, Farid Nasrallah a considéré que les bombardements de Sakiet Sidi Youssef «suscitent peu d’intérêt de la part des étudiants chercheurs, d’où le déficit criant en informations sur le sujet».
L'universitaire, qui préconise d’encourager, d’accompagner et encadrer les étudiants, notamment sur les sources authentiques susceptibles de fournir les vérités historiques, a souligné que de telles recherches enrichiraient la connaissance de l'histoire de la révolution avec ses différentes phases.
Farid Nasrallah a appelé à «consacrer des ateliers, des laboratoires de recherche, des journées d’études et des séminaires nationaux, mais aussi internationaux, en vue de favoriser les échanges entre chercheurs et approfondir les investigations sur ces évènements historiques».
«Les informations disponibles sur ce massacre et connues de tous se réduisent uniquement au bombardement aérien mené par les forces du colonialisme français ayant fait 79 morts dont 20 enfants et 11 femmes ainsi que 130 blessés», a ajouté l'universitaire qui a mis l’accent «sur l’importance de mener des recherches sur les véritables causes de cette attaque et ses répercussions».
De son côté, le chercheur en histoire, Atef Seradj, a considéré que «l'absence d’informations sur ces évènements explique le peu d’intérêt affiché par les étudiants des universités».
M. Seradj a, à ce titre, mis l’accent sur «la coordination entre le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, le ministère des Moudjahidine et Ayants-droit et les instances concernées pour mettre tous les moyens à la disposition des chercheurs à l'effet de mener des recherches sur ces massacres».
Selon lui, il est ainsi impératif d'octroyer «des bourses d’étude aux chercheurs et aux étudiants des différentes universités en vue de recueillir des témoignages de moudjahidine encore en vie et remonter aux sources des informations sur le massacre de Sakiet Sidi Youssef pour enrichir la connaissance».