Le colonel Abderrahmane Mira, un des chefs de la Wilaya III historique, était à la fois un fin dirigeant politico-militaire et un combattant de la première heure pour l’indépendance et le recouvrement de la souveraineté nationale, affirment des moudjahidine et des chercheurs en histoire.
À l’occasion du 66e anniversaire de la disparition d’Abderrahmane Mira, surnommé le «tigre de la Soummam», tombé au champ d’honneur le 6 novembre 1959 dans la région d’Akbou (Bejaia), des universitaires et des moudjahidine continuent d’évoquer un dirigeant politico-militaire «brave» et «discipliné» qui a combattu le colonialisme de toutes ses forces.
L’enseignant au département d’histoire de l’Université Abderrahmane-Mira de Bejaia, Pr Ouatmani Settar, a déclaré à l’APS qu’«à l’arrivée d’Amirouche Ait Hamouda, désigné par Krim Belkacem à la tête de la vallée de la Soummam, Abderrahmane Mira était parmi les premiers maquisards en activité dans la région».
«Mira était déjà dans le mouvement national. Il avait entamé son activité révolutionnaire et juste après de le déclenchement de la lutte armée, le 1er novembre 1954, il n’a pas hésité à prendre les armes contre l’ennemi», a ajouté Pr Ouatmani.
Mira avait énormément contribué aux préparatifs du congrès de la Soummam, le 20 août 1956, en accueillant dans son village les délégations de l’ALN qui venaient des différentes wilayas, a-t-il dit.
«Il avait joué un rôle déterminant» dans la sécurisation du Congrès qui se tenait dans une région entourée de casernes militaires de l’armée coloniale, a relevé Pr Ouatmani.
Il a aussi mis sur pied des compagnies d’acheminement des armes depuis la Tunisie, lui-même ayant fait le voyage plusieurs fois.
Son courage et son abnégation lui ont valu d’importantes promotions, d’abord comme chef de zone puis commandant de l’Armée de libération nationale (ALN). Il a mené également de grandes missions durant la guerre de libération à travers plusieurs régions du pays.
Après la mort du colonel Amirouche, tombé au champ d’honneur le 29 mars 1959 à Bou Sâada (M’sila), Abderrahmane Mira a pris la tête de la Wilaya III historique et y demeura jusqu’à ce qu’il rejoigne la longue liste des martyrs de la Révolution, le 6 novembre de la même année.
«Il était un baroudeur et un grand combattant qui a beaucoup apporté à la Révolution de libération nationale», souligne l’universitaire.
Le moudjahid Challal Kaci, qui a croisé à deux reprises le chemin d’Abderrahmane Mira pendant la Guerre de libération, affirme que Mira était «un brave homme qui aimait son pays». «Il était aussi un fin politicien et un grand militaire qui entretenait de bonnes relations avec ses soldats», témoigne Challal Kaci, relevant que le colonel Abderrahmane Mira «maitrisait l’art de motiver ses djounoud» et «était un bon soldat qui aimait l’ordre et la discipline».
Dans un ouvrage paru récemment, Tarik Mira, fils du colonel martyr, souligne que son père «avait compris que la discrimination était l’essence du colonialisme et qu’il fallait par conséquent s’y extraire et combattre ce monstre juridico-politique à conséquence sociale, économique et identitaire d’une ampleur sans précédent».
«Il fut le premier à ouvrir le feu dans la vallée de la Soummam et gravit les échelons au sein de la Révolution jusqu’à la tête de la Wilaya III historique. Il fut un héros, une figure quintessenciée de ce patriotisme rural qui avait porté l’Algérie au pinacle de la gloire», a encore écrit Tarik Mira.
Né en 1922 à Taghalat, près de Tazmalt, Abderrahmane Mira avait épousé la cause nationale dès 1947, année de son adhésion au Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD).
Il est tombé au champ d’honneur près du col de Chellata, sur les hauteurs d’Akbou, le 6 novembre 1959 après qu’il fut touché lors d’une embuscade tendue par le 2e régiment d’infanterie de marine aéroportée de l’armée française, en pleine opération «Jumelles» menée par l’armée coloniale contre la wilaya III historique.
Sa dépouille, exposée par l’armée coloniale dans plusieurs villages de la région, a été transportée par hélicoptère vers une destination inconnue et n’a jamais été retrouvée à ce jour, comme l’a souligné son fils Tarik.