Grand angle : Le butin de tous les dangers

Après le choc causé par la chute du gouvernement afghan, le retour des talibans au pouvoir duquel ils ont été chassés en 2001 et les craintes de voir les nouveaux dirigeants imposer aux afghans leur vision ultra-rigoriste de l’islam, les médias focalisent aujourd’hui sur les conséquences qui risquent de découler du butin de guerre sur lequel les talibans ont mis la main. D’autant qu’ il est très conséquent. En effet, 20 ans durant, les américains ont dépensé plusieurs milliards de dollars pour la modernisation et la formation de l’armée afghane. Et si l’investissement colossal n’a pas empêché la chute de Kaboul et du Président Ashraf Ghani, il reste que depuis ce 15 août, il présente un danger pour la région. Et pour cause, ce sont des tonnes d’équipements et d’armements ultra-modernes qui sont désormais en possession des talibans. Un arsenal qui pourrait intéresser nombre de marchands d’armes, de terroristes et de mercenaires désireux de faire de «bonnes affaires». D’autant que ce que les soldats afghans ont laissé derrière eux ferait envie à n’importe quelle armée ou groupe criminel. Jugez-en : des armes automatiques, des fusils de précision utilisés par les tireurs d’élite, des fusils d’assaut, des casques tactiques, des lunettes de visée nocturne, des gilets balistiques, des véhicules blindés équipés de lance-roquettes ou pour le transport des troupes, des hélicoptères d’attaque Black Hawk, des drones et des équipements de communication figurent sur la liste qui est loin d’être exhaustive. Des joujoux que les talibans n’auraient jamais, un jour, rêvé pouvoir posséder. C’est dire que les craintes soulevées par certains analystes sont pour le moins fondées. Preuve en est, l’administration du Président Biden s’est dite très préoccupée par cette situation et le pentagone a averti qu’il ne s’interdirait pas d’aller détruire tous ces armements laissés aux mains des talibans. Car ce qui fait encore plus peur, ce n’est pas que cet arsenal soit utilisé pour mater toute rébellion interne. Non, ce qui inquiète Washington et ses alliés, c’est que ces armements parviennent aux groupes terroristes qui pourraient les utiliser contre des intérêts occidentaux ou des pays amis dans la région. Mais cette situation n’est pas inédite. Elle rappelle celle qui a découlé de la chute, en 2011, du régime de Mouammar Kadhafi. L’arsenal militaire, pillé des armureries libyennes et vendu au plus offrant, a permis aux groupes terroristes actifs dans l’espace sahélo-saharien de renforcer leurs capacités logistiques et de monter en puissance. Dix ans après, il continue de présenter une menace majeure pour la stabilité et la sécurité de toute la région. Les attaques répétées, notamment dans la zone dite des trois frontières, en témoignent. Aujourd’hui, c’est l’Afghanistan qui pourrait alimenter le marché gris de l’armement par la mise en vente des équipements et armements américains. Terroristes et mercenaires pourront ainsi faire leurs emplettes en toute quiétude. Le butin récupéré par les talibans est assez conséquent. Le large éventail trouvé dans les casernes a de quoi répondre à toute demande formulée par tout acheteur qui pourrait y trouver non pas «chaussure à son pied», mais plutôt arme à sa main… C’est l’effet boomerang.
N. K.

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