
L’Algérie a opté pour l’anticipation, la prévention, l’actualisation et l’adaptation de son système juridique dans la lutte contre le phénomène de la traite humaine. Les pouvoirs publics accordent aujourd’hui une priorité majeure à la détection et à la protection des victimes, pour une meilleure prise en charge.
L’Algérie a fait des progrès significatifs pour contrecarrer la traite des êtres humains, notamment à l’intérieur de ses frontières. Plus de 400 réseaux ont été démantelés durant les deux dernières années. De plus, les services de sécurité ciblent les réseaux et protègent plus de victimes de la traite des êtres humains étrangers. C’est ce qu’ont indiqué, hier, des membres du Comité national de prévention et de lutte contre la traite des personnes, représentants des ministères et institutions, dans des déclarations à El Moudjahid, en marge du lancement d’un atelier sur le développement de mécanisme d’orientation des victimes de la traite des personnes, organisé hier à Alger. «La situation n’est pas alarmante. Des juridictions judiciaires ont traité plusieurs affaires liées à la traite humaine. Le phénomène existe, plusieurs mesures ont été prises pour le contenir avant qu’il prenne des proportions inquiétantes», soutient le représentant du ministère de la Justice au Comité, le magistrat Mehdi Mohamed Nour El-Islam, juge d’instruction à la cour de Boumerdès, qui a relevé que l’Algérie est un pays de transit ayant enregistré ce phénomène. «De ce fait, il a été procédé à la l’actualisation et à l’adaptation de l’arsenal judiciaire afin de lutter efficacement contre la traite humaine qui est l’un des plus dangereux phénomènes, et les affaires sont très complexes. La victime elle-même est, dans ces affaires, auteur d’un délit ou crime, car exploitée par les réseaux dans des activités illégales», dit-il. «Cet atelier va permettre de renforcer les capacités des enquêteurs, lors de l’enquête préliminaire menée par les officiers de la police judiciaire ou de la Gendarmerie nationale et durant l’instruction judiciaire», assure le magistrat. Il a indiqué que l’Algérie s’est mobilisée par la mise en place de mécanismes dans le code pénal. «Les mis en cause ne bénéficient pas de circonstances atténuantes, le renforcement de la coopération judiciaire internationale en raison des ramifications internationales du phénomène et l’élaboration d’une loi nationale qui vient d’être finalisée», précise-t-il. «Les victimes de la traite humaine bénéficient d’une assistance et d’une prise en charge médicale», a indiqué, de son côté, le représentant du ministère de la Santé, membre du comité national de lutte et de prévention contre la traite humaine. Le sous-directeur des recherches et des analyses de la population, Farid Bouafou, a mis en exergue l’accès aux soins gratuitement à tous les citoyens, y compris les étrangers. «Une fois les victimes de la traite humaine sont identifiées, elles sont prises en charge par les structures médicales. Il faut savoir que l’accès aux soins est libre aux Algériens, comme pour les étrangers qui peuvent se présenter par une tierce personne ou elles-mêmes au centre de soins sans même fournir une pièce d’identité», explique-t-il. Le responsable a relevé l’importance de la gratuité des soins, notamment pour les victimes de la traite humaine. «C’est extrêmement important, car dans d’autres pays, il faut trouver des moyens de financement par des associations», dit-il. À une question sur l’hébergement et le placement des victimes de la traite humaine, M. Bouafou a plaidé pour la mise en place d’un mécanisme d’orientation. «C’est l’objectif de ces ateliers. On ne peut placer des femmes avec des hommes et les mineurs avec des adultes. Il faut réfléchir à un lieu. Une fois le centre mis en place, on peut mobiliser une équipe médicale multidisciplinaire, même si la prise en charge sanitaire est assurée aujourd’hui», assure-t-il.
Protection sociale et judiciaire pour tous les enfants sur le territoire national
L’Organe national de protection et de promotion de l’enfance (ONPPE) a affirmé que la traite humaine est liée à toutes les formes d’exploitation des enfants, à savoir sexuelle, par le travail, la mendicité et la petite délinquance. «Notre souci majeur est la protection de l’enfant en danger qui se trouve sur le territoire national et lui assurer une protection morale et physique», a indiqué la secrétaire générale de l’ONPPE, Dalila Aliane. Elle a tenu à préciser que l’organe est membre du Comité national de lutte contre la traite humaine, mis sous la tutelle du Premier ministre. L’ONPPE agit à toute alerte sur un cas éventuel de traite humaine. «Actuellement, on a tendance à dénoncer l’exploitation sexuelle, la mendicité et le travail forcé. On n’évoque pas la traite humaine, d’où nos actions de sensibilisation pour contrecarrer ce phénomène qui constitue une violation des droits de l’homme», dit-elle. La responsable a expliqué qu’une fois alerté, l’organe œuvre à assurer une prise en charge de la victime. «Nous lui assurons d’abord une prise en charge médicale et un placement dans les centres d’hébergement pour les enfants mendiants et aussi une réintégration sociale, c’est-à-dire une scolarisation. Aujourd’hui, des enfants migrants sont scolarisés dans des écoles aux côtés des élèves algériens et bénéficient des mêmes droits», assure-t-elle. Par ailleurs, le ministère de la Solidarité nationale intervient en amont du phénomène. «C’est un secteur qui est transversal et qui agit dans la prévention», assure la directrice de la protection de la femme et de l’enfant, Dr Soumia Oulmane. «On cherche les victimes dans les milieux défavorisés où la femme se trouve en difficulté et l’enfant en précarité, qui peuvent constituer des proies pour les réseaux ce traite humaine», dit-elle. Elle a affirmé que le ministère de la Solidarité nationale a mis en place des dispositifs et des mécanismes pour mettre fin à cette précarité. «Plusieurs programmes sont mis en œuvre pour une meilleure prise en charge des personnes vulnérables, notamment les femmes et les enfants en difficulté, dans le cadre des actions de prévention», assure-t-elle.
Neila Benrahal