
A une centaine de kilomètres d’Alger, Dellys est une ville méditerranéenne typique où s’harmonisent les styles berbère, andalou et ottoman, aussi bien dans les techniques de construction que dans le décor des habitations. La Casbah de Dellys, construite en 1068, surplombe la mer de 27 m. Elle se compose d’une haute Casbah et d’une basse Casbah qui longe le port, comme à Alger.
Le bâti traditionnel de la Casbah se caractérise par la diversité des modes de construction, fruit des différentes périodes historiques qu’a connues la ville. On y trouve des maisons de type méditerranéen musulman aux plans variés toutes agencées autour d’une cour centrale, selon un mode d’organisation très fréquent en Afrique du Nord et que l’on retrouve en Italie du Sud. C’est une caractéristique de l’architecture méditerranéenne qui s’inspire de l’atrium romain, déjà présente dans les maisons sumériennes du troisième millénaire.
On retrouve également d’autres techniques architecturales méditerranéennes comme l’appareillage en pierre de taille et en brique à la façon byzantine. Les escaliers en pierre sont soutenus par de petites voûtes en plein-cintre comme on en trouve en Épire (Grèce) et l’emploi de fragments de colonnes et de chapiteaux en marbre romain dans la construction de la muraille.
Séquelles du séisme de 2003
Malheureusement, le séisme dévastateur du 21 mai 2003 a provoqué la destruction de plusieurs bâtisses datant de plusieurs siècles. Des sites historiques se sont effondrés. Les travaux d’urgence, entamés à l’époque, se sont limités au nettoyage des gravats dans les ruelles et à cimenter les fissures. Le style architectural berbéro-andalou de La Casbah de Dellys a perdu de son éclat. Elle est dans un état lamentable. Seuls le mausolée de Sidi El Harfi et l’école coranique Sidi Ammar ont été restaurés. La dégradation du site s’est accentuée avec l’abandon des propriétaires des logements après le séisme. Mais c’est surtout l’histoire glorieuse, à la limite de la légende, de la ville de Dellys, qui fait la fierté de ses habitants, à l’instar de Ami Rabah Edelssy (70 ans) qui considère que la « position géographique de cette ville est à l’origine des différentes convoitises et civilisations qui se sont succédé dans la région». Il a poursuivi qu’il faut préserver ce patrimoine considéré comme un trésor qu’il ne faut pas ignorer. Nous avons aussi approché son fils Nacer qui a grandi ici et qui nous dira, à propos de ce patrimoine, que son souhait est de ne pas oublier le legs des ancêtres.
Parfois, l’on peut ainsi surprendre des Dellyssiens nostalgiques, assis sur un rocher dans la quiétude du cap Bengut ou sur un banc de la place dite de la Guinguette, mais dont il ne reste aujourd’hui que le nom, en train de suivre le passage des navires, voguant vers de lointains ports, ou simplement contempler la grande bleue, s’imaginant voir accoster sur les rivages de la région les navires des corsaires et autres envahisseurs.
C’est ce riche passé que les habitants de Dellys tentent aujourd’hui de préserver coûte que coûte en exhortant les autorités concernées à manifester davantage d’intérêt pour le patrimoine de leur ville et pour tous ses vestiges et patrimoine, dont de vieux manuscrits détenus par plusieurs citoyens.
Zine Eddine Gharbi