
Raconter les dissensions entre traditions et modernité, explorer la sagesse ancestrale et la science, telle est la thématique judicieuse abordée par l'auteur Mimoun Ayer dans son nouvel ouvrage à l'intitulé coquet «les eaux d'Azro Aziza». L'écrivain fait un parallèle entre l'appel de la voix des anciens et la science qui interpelle plus d'un à notre époque. Ce beau roman nous rappelle cette pertinente citation d'un auteur : «le vrai progrès, c'est une tradition qui se prolonge». A l'évidence, Mimoun Ayer axe sur le fait qu'un homme sans passé et sans identité ne peut aller de l'avant ni asseoir une socièté équilibrée. D'une histoire simple et colorée d'un village des monts de Tlemcen, Sidi Ahramoune, il met en relief cette solidarité et fraternité ancestrales presque «innées» des familles qui se concertent pour résoudre les problèmes de leur localité. «Les eaux d'Azro Aziza» nous font rentrer de plain-pied dans cette saga villageoise, où la source qui alimente le village s'est soudainement tari. Une énorme catastrophe pour cette région rurale, où les champs de vergers et d'agrumes sont monnaie courante.
Face à cette calamité, les villageois se réunissent, dont Touhami et sa femme Talia, deux ex-enseignants de collège reconvertis en agriculteurs par amour de l'écologie. Inquiet par ce brusque tarissement de la source Azro Aziza, Touhami cherche un moyen pour sa résurgence, alors que les paysans de ce village se réfèrent à la tradition avec des invocations, prières et manifestations votives, etc. Mimoun Ayer met en relief le poids de la tradition et l'apport de la science ; cette dernière permettra la résurgence de la source au grand bonheur des habitants de Sidi Ahramoune. Cette tragédie a permis de recentrer le débat sur les relations conflictuelles et la résilience des individus face au malheur. D'une écriture fluide et pleine d'humour, l'auteur nous livre un condensé de réconciliations et de solidarité entre voisins et amis. C'est un hymne à la philantropie, à la fraternité et à la solidarité.
Ce récit narré avec beaucoup de bon sens et faisant preuve d’une grande sagacité rappelle l'union des habitants de hameaux et bourgs pour résoudre les différends en faisant référence à la djamaâ locale, issue de notre identité et culture atavique. L'écrivain au talent avéré de conteur met le doigt sur un phénomène de socièté qui prend de l'ampleur, celui de l'égoisme et de la violence de la socièté, en se référant aux valeurs ancestrales de l'unité et de la solidarité sociale. Ce roman est un hymne d'altruisme et d'amour du prochain qui nous fait penser à cette citation de Dom Helder Camara : «lorsque l'on rêve seul, ce n'est qu'un rêve, alors que lorsque l'on rêve à plusieurs, c'est déjà une réalité.» C'est un roman à forte résonance d'amitié et fleure bon la fraternité qui donne du baume au cœur.
K. A.