Zone Rouge, Israël 73 ans après : une fourberie du XXe siècle

Par Boukhalfa Amazit

Depuis une dizaine de jours, Israël bombarde Gaza et réprime à El Qods et en Cisjordanie. Les Palestiniens ripostent courageusement aux attaques aériennes par des tirs roquettes. Un combat asymétrique s’il en est, qui bien entendu profite au double plan militaire et politique aux Israéliens. Militaire puisque les roquettes ne font pas bouger les lignes stratégiques et politiques parce que cela suffit à l’Etat agresseur pour invoquer, à cor et à cris, le «droit de se défendre». Une fumisterie pompeusement reprise par les chancelleries occidentales, qui se sont autoproclamées «communauté internationale».
A ce propos le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies a prévu de se réunir demain dimanche pour «examiner la situation».
Le temps joue, naturellement, pour l’occupant et particulièrement en faveur M. Benyamin Netanyahou qui, il y a quelques jours seulement, était sur la corde raide. Il préparait ses cartons et s’apprêtait à restituer les clés du Premier ministère qu’il occupe depuis 2009 sans discontinuer, 11 ans si on excepte les quatre autres années de 1996 à 1999. On lui avait préparé son vestiaire car en effet, il se trouvait dans l’impossibilité de former un gouvernement dans les 28 jours qui lui avaient été impartis et il se voyait déjà dans la posture de numéro un de l’opposition. Mais combinard qu’il est, et sachant que les situations d’extrême violence lui ont toujours profité, il a prémédité justement, des réactions des Palestiniens en empêchant les élections de se tenir à Al Qods, sachant que les autorités allaient les reporter ce qui a réveillé la contrariété des jeunes tant de Gaza que de Cisjordanie, des jeunes qui piaffent dans le paddock et qui aspirent au changement et à des réformes dans la résistance.
Par ailleurs, ce nouveau drame des populations palestiniennes aura permis de mettre à l’épreuve la solidité des liens nouveaux, qui lient Israël à ses alliés arabes qui ont bruyamment normalisé leurs relations diplomatiques dans l’écume du départ de M. Donald Trump et il aura aussi testé la réactivité de M. Joe Biden, le nouveau président des Etats-Unis. Des alliés qui sont restés sages. Alors que le monde s’attendait à un quelconque aquilon du président du Comité Al Qods, le roi Mohamed VI, aucun zéphyr n’a soufflé de l’extrême-Ouest du monde musulman.
Bombarder Gaza a toujours et invariablement, surhaussé la cote de popularité du Premier ministre sioniste en sursis, qui assurément tombera dans les bras de la justice pour plusieurs affaires pendantes toutes liées à des malversations, aussitôt son immunité levée.
Pendant ce temps, là-bas, en Palestine, les Israéliens tuent en gros des Palestiniens qui meurent en vrac. Cela, sans discontinuité depuis le 14 mai 1948, date de l’enterrement du greffon israélien sur la Palestine par l’Organisation des Nations unies (ONU), autrement dit, il y a de cela 73 ans pile, depuis hier vendredi.
Né de la mauvaise conscience des Etats européens qui ont assisté impuissants, mais aussi souvent complaisamment, au génocide commis par les nazis hitlériens, sur les ressortissants de confession juive, mais aussi les Tziganes ces oubliés de l’histoire, indépendamment de leurs nationalités, les Alliés victorieux, ont matérialisé l’idée de la création d’Israël en châtiant en toute injustice, les Palestiniens et en déchiquetant la Palestine leur pays, sous l’égide d’une nouvelle organisation, dénommée ONU, héritière obsolète de la Société des Nations (SDN), pourtant créée pour, comme son nom l’indique, «unir les nations» et promouvoir la paix entre les peuples. Une organisation qui a pris la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme pour credo, mais ceci ne l’a pas empêchée de procéder dès sa venue au monde, au viol profanateur des Droits de tout un peuple.
En 1948, au moment où démarrait le processus du déclin du colonialisme, bousculé par le mouvement historique et planétaire de l’émancipation des peuples, Israël, lui, s’ouvrait l’ingression. C’est-à-dire l’invasion, l’envahissement insidieux et sournois. Il découvrait avec «émerveillement», qu’il s’agissait de vouloir quelque chose, n’importe quelle chose, dans cette région singulièrement, quelqu’en soit la nature, les dépens, ou la valeur, pour s’en accaparer. Il suffit de vouloir pour avoir.
Au besoin de titiller la conscience de l’Occident, d’en faire sourdre des remords, pour l’amener, à rendre gorge des millions de malheureuses victimes de l’holocauste. En cas de pépin, il y a le recours à l’oncle Sam quand ce dernier ne s’autosaisit pas de lui-même. Israël s’est autoproclamé conscience, âme et esprit mosaïques des Hébreux et des Juifs dans l’histoire et dans la géographie. Il a même été accusé par des juifs d’avoir été à l’origine de «l’industrie de la shoah», après la défaite arabe de juin 1967 et l’annexion de territoires des voisins.
Dès après la Seconde Guerre mondiale, des colons juifs ont afflué de tous les continents, et convergé vers la Palestine, territoire sous mandat britannique décrétée terra nullius, par les nouveaux gouvernants. Des colons hypocritement poussés vers les quais des gares et des ports, par leurs propres compatriotes, avec lesquels ils avaient partagé des siècles de cohabitation. Ils voulaient un pays, ils ont pris celui des autres, avec la bénédiction de papas-gâteaux envers leur enfant gâté. Les cinq tontons-parrains du Conseil de sécurité de l’ONU, étaient là pour accéder aux désidératas de ces coucous qui s’emparaient du nid des autres. Il faut tout de même préciser que la condition sine qua non pour prétendre à faire partie d’un kibboutz, ces fermes collectivistes inspirées des kolkhozes soviétiques, était d’être de confession juive et nulle autre. Après avoir admis qu’une religion devienne une ethnie, ils ont accepté que cette même confession soit une nationalité. Il ne viendrait pas, en effet, à l’esprit d’aucun Etat, de mentionner sur le passeport dans la case nationalité : bouddhiste, animiste, musulman ou zoroastrien.
Puis, comme tout colonialisme qui s’assume, ils se sont inventé un cadre légal. Comme chez nous, au XIXe siècle, les Européens de l’Atlantique à l’Oural, tirés par la manche par l’Etat français, qui leur promettait l’Eldorado sur les côtes de l’Afrique. Là-bas, comme ici, ils ont mythifié les spoliateurs qui racontaient-ils, avaient fait du Néguev un Eden biblique où coule depuis, le miel et lait. Ici Bugeaud avait buriné lui-même le simulacre du soldat-laboureur, qui a fait pousser des orangers dans les marécages de Boufarik. Ici, nous avons eu le Code de l’indigénat et la loi Warnier de 1873 laquelle a organisé le processus de la dépossession «en toute légalité», des paysans algériens. Ce qui a permis aux colons de posséder en 1962 à l’indépendance, 2,5 millions hectares soit 75 pour cent des meilleures terres, pour deux pour cent de la population agricole. Des propriétaires indéboulonnables devant n’importe quel tribunal, puisqu’ils se sont attribué le pays en toute légalité. En Israël ils ont même exhibé des actes de vente qu’auraient signés, les propriétaires légitimes et historiques de lieux. «Dieu me l’a donnée, gare à qui y touchera», disait l’autre.
De fil en aiguille, aujourd’hui, selon la loi israélienne, si un juif est susceptible de fournir la preuve que sa famille «vivait à Jérusalem-Est, avant la guerre israélo-arabe de 1948, il peut demander à ce que lui soit rendu son «droit de propriété». Une loi qui n’existe, bien sûr, pas pour les Palestiniens ayant perdu leurs biens pendant la guerre. Il y a lieu de préciser qu’il est plus facile pour un colon israélien, même arrivé la veille dans les derniers wagons d’immigrants du fin fond du monde, de prouver une telle propriété que pour un «arabe israélien», comme ils désignent les natifs Palestiniens, d’obtenir un acte de naissance. C’est sur ce «droit au retour» interdit pour les Palestiniens alors qu’il est reconnu par les dispositions du «Plan de Partage» de 1947, qui été exhibé par le tribunal de l’occupant pour expulser quatre familles palestiniennes de Cheikh Jerrah à El Qods-Est sous occupation.
B. A.

kalafamazit@gmail.com
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UNE FOURBERIE DU XXème SIECLE.
Le journal n’étant pas paru jeudi, la chronique est publiée aujourd’hui à titre exceptionnel

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