Les algériens et la vaccination : Les pour et les contre

- Dr Boudahdir, chef de service au CHU Frantz-Fanon  : «Faire barrage à l’intox Sur les réseaux sociaux»
- Dr Hamane Douadi, biologiste  : «Nous devons vivre avec le coronavirus comme avec la grippe»
- Ouargla : Création de 48 centres  de vaccination
- Sétif : 12.000 cadres et agents mobilisés

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Après le lancement officiel de la campagne de vaccination, El Moudjahid s’est entretenu avec des citoyens, pour savoir s’ils sont prêts à sauter le pas et à se faire vacciner dans l’un des 8.000 centres mis à leur disposition sur l’ensemble du territoire national.

Notre virée commence, en ce milieu d’après-midi, à la rue Abane-Ramdane, à Alger-Centre. Rencontrée à la Pharmacie centrale, Hakima, une quinquagénaire, a d’emblée indiqué qu’elle est favorable à la vaccination, mais qu’elle ne se précipitera pas pour la faire.
«Je pense que le vaccin est une bonne chose, mais je préfère attendre un peu et voir s’il n’y a pas d’effets secondaires importants», a-t-elle déclaré, avant d’ajouter suivre avec minutie les débats sur la question.
«J’essaye de m’informer au maximum, mais je fais confiance aux pouvoirs publics, qui ont assuré que le produit est fiable», dit-elle.
Salah, 33 ans, exprime quant à lui le souhait que la pandémie disparaisse le plus rapidement possible, pour pouvoir revenir à une vie normale, et la vaccination peut contribuer à atteindre cet objectif. Toutefois, il nuance son propos en disant qu’il ne compte pas se faire vacciner, car il estime que lorsque l’on est jeune et en bonne santé, on ne risque pas de développer les formes graves de la maladie.
«Je pense que la vaccination doit se faire prioritairement pour les personnes âgées et vulnérables», estime-t-il.
Au niveau de la rue commerçante Ahmed-Chaïb, très animée en cette journée ensoleillée de janvier, Brahim, gérant d’une boutique, la trentaine, indique que le lancement de la campagne de vaccination est un événement important pour notre pays et une victoire géopolitique.
«Je salue l’Armée nationale populaire qui a ramené les vaccins depuis la fédération de Russie ; c’est une réussite pour l’Algérie qui peut compter sur ses alliés», a-t-il affirmé, précisant cependant qu’il ne compte pas se faire vacciner, pour la simple et bonne raison qu’il a été, en septembre dernier, contaminé par le Sars-Cov2. «Ayant été infecté par le virus, j’estime ne plus être une personne prioritaire», tranche-t-il.
Un peu plus loin, à la place de Émir- Abdelkader, Sakina, vêtue du traditionnel haïk, âgée de soixante-dix ans, dit être d’accord pour se faire vacciner dans les plus brefs délais, car elle souffre de plusieurs maladies chroniques.
Cependant, dit-elle, la question suscite de grands débats au sein de la cellule familiale.
«Vous savez, à mon âge, je n’ai peur de rien, de plus, avec mes problèmes de diabète et d’hypertension, je préfère me faire vacciner et avoir l’esprit tranquille. Mais mes enfants sont totalement réticents, car ils ont peur que le vaccin entraîne des effets secondaires. Il faut faire pleinement confiance aux médecins, le risque zéro n’existe pas», dit-elle.
Sami Kaidi

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Dr Boudahdir, chef de service au CHU Frantz-Fanon
«Faire barrage à l’intox Sur les réseaux sociaux»

Le chef du service d’anesthésie et de réanimation Covid-19 du Centre hospitalo-universitaire Frantz-Fanon de Blida, docteur Adel Boudahdir, valorise le choix des pouvoirs publics de lancer officiellement la campagne nationale de vaccination depuis cette wilaya.
Selon Adel Boudahdir, le succès de la campagne nationale de vaccination dépend de la sensibilisation des citoyens et des professionnels du secteur de la Santé et de leur capacité à traiter les fausses informations qui sont largement diffusées et reliées sur les réseaux sociaux.
«La vaccination est facultative et ne peut être imposée à aucun individu. On doit inculquer une culture préventive et saine dans la société, et présenter une image claire dans un traitement positif de la vaccination», a-t-il rappelé, réfutant toutes les déclarations qui remettent en cause la vaccination. Le spécialiste confie que plus de 2 millions de personnes dans le monde ont été vaccinées sans qu'aucun incident a été enregistré, ce qui démontre que le vaccin est sûr. «Nous ne sommes pas des cobayes, comme le prétendent certains individus sur les réseaux sociaux. Le vaccin est certes testé pour la première fois en Algérie, mais pas pour la première fois au monde. Il est fiable, c’est la solution pour s’attaquer au virus et stopper sa propagation», a-t-il assuré. S’alignant sur l’ordre des priorités établi par les pouvoirs publics concernant les catégories de la société à bénéficier en premier de la vaccination, le chef de service souhaite que les autorités sanitaires et les responsables de la campagne de vaccination jugent opportun de commencer par les agents de santé atteints de maladies chroniques et confrontés à un double risque de l'infection. «Les autorités doivent penser à vacciner, lors de la deuxième étape, les travailleurs des unités Covid-19 qui n'ont jamais été infectés ou qui ont dépassé trois mois d'infection, afin de renforcer leur immunité et leur épargner le risque de complications auxquelles ils pourraient être exposés et pouvant aller jusqu’au décès», a souligné le Dr Boudahdir. La campagne de vaccination anti-Covid a débuté samedi, pour se poursuivre tout au long de l’année. «Le vaccin est le meilleur moyen disponible, à l'heure actuelle, pour se prémunir contre le coronavirus», a estimé le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Abderrahmane Benbouzid.
Mohamed Mendaci

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Dr Hamane Douadi, biologiste
«Nous devons vivre avec le coronavirus comme avec la grippe»

Le biologiste clinicien et directeur d'un laboratoire d'analyse, le docteur Hamane Douadi, prévoit que la Covid-19 ne disparaitra pas mais se transformera en une maladie avec laquelle les humains doivent coexister, comme c'est le cas avec la grippe saisonnière.
Le nombre de cas positifs quotidiens au laboratoire qu'il dirige a baissé de 50% par rapport au mois de novembre dernier où l’on observait une moyenne quotidienne de 100 cas. «Désormais, on enregistre aujourd’hui entre 30 et 40 personnes qui viennent se faire dépister, parmi lesquelles 10 à 12 cas seulement sont positifs. Cela s'applique uniquement à ceux qui subissent des tests androgéniques et PCR. Quant aux analyses sérologiques, nous enregistrons environ 100 cas testés par jour». Mais selon le spécialiste, le test sérologique n'est pas un critère d'évaluation de la situation épidémiologique, puisque ces analyses ne sont nécessaires que pour confirmer si la personne concernée a été déjà infectée, comme c'est le cas pour les personnes qui ont subi des chirurgies ou pour détecter d'autres maladies telles que les hépatites B et C. La baisse du nombre de cas d’infection confirmée est due, selon lui, à la prise de conscience des citoyens. «Les gens ont compris la dangerosité de la situation et prennent leurs précautions en termes de port du masque ou de distanciation sociale. Aussi, la baisse du nombre de cas confirmés n'a rien à voir avec la faiblesse ou la force du virus, ni avec la saison d'hiver ou d'été, en Algérie le virus est toujours le même, il n’a pas muté. Je pense que l'augmentation des cas en automne est due au relâchement des citoyens, notamment lors des rassemblements familiaux».

Conscience des citoyens et vaccination

Le biologiste souhaite que cette prise de conscience se poursuive afin de maintenir la stabilité de la situation épidémiologique actuelle qui peut être maîtrisée. «La réduction du nombre de cas n'est possible qu'à travers la vaccination, même s'il est difficile de faire vacciner tout le monde». Concernant les rumeurs qui circulent sur le vaccin anti- Covid-19, il estime qu'il s’agit d'informations erronées car aucune personne n'est décédée et aucune preuve n’existe des complications de cette vaccination. Quant aux préférences par rapport aux différents vaccins disponibles, le Dr. Hamane affirme qu'il opte plutôt pour le vaccin chinois dans la mesure où il est similaire aux vaccins précédents avec lesquels il a déjà travaillé. «C'est un virus inactivé qui est injecté dans le corps. Dès qu’il est identifié, ce dernier produit des anticorps et développe une réaction immunitaire. Ce vaccin ne présente aucun danger et son effet est positif comme si le patient avait déjà été infecté par la maladie». Pour ce qui est de la nouvelle souche du coronavirus découverte en Grande-Bretagne, le spécialiste précise qu'il s'agit du même virus qui a subi des dizaines de mutations, la différence réside dans les protéines de ce dernier qui changent. «La dangerosité de la souche présente en Grande-Bretagne réside uniquement dans sa vitesse de propagation et de transmission d'une personne à une autre, tandis que les symptômes et la virulence sont les mêmes». Il a également précisé que le virus qui circule en Europe diffère de celui qui circule en Afrique, en Asie ou en Amérique et cette différence se manifeste dans les protéines de surface qu'il produit. Ainsi la capacité du virus à accéder aux cellules humaines à travers ces protéines diffère, car il existe des virus pauvres en protéines, donc la possibilité d'accéder aux cellules du corps reste faible. Salima Ettouahria

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Ouargla
Création de 48 centres  de vaccination

Quarante-huit (48) centres sont retenus par la direction de la Santé et de la Population (DSP) de la wilaya d’Ouargla pour l’opération de vaccination contre le coronavirus (Covid-19), a-t-on appris dimanche auprès de cette institution.
Il s’agit de 43 espaces ou points fixes au niveau des établissements hospitaliers et des structures de santé de proximité et de prévention, et cinq unités itinérantes destinées aux zones rurales et enclavées, a-t-on précisé.
Des moyens logistiques sont mobilisés, pour effectuer cette opération dans de bonnes conditions, dont l’encadrement est assuré par un staff médical, ajoute la même source, en signalant que le vaccin anti-Covid-19, qui est gratuit et se fera volontairement, est fortement recommandé pour diminuer le nombre d'infections et contribuer à freiner la propagation de la pandémie.
Composées de médecins et de paramédicaux, les équipes chargées de l’opération ont bénéficié d’une formation spécialisée pour mener à bien la vaccination contre la Covid-19 qui se poursuivra tout au long de l'année, a-t-on fait savoir à la DSP.
Parallèlement, les services de la santé ont lancé une campagne pour sensibiliser les citoyens aux avantages du vaccin anti-Covid-19.
«La situation épidémiologique dans la wilaya d’Ouargla est stable et maîtrisée, mais cela ne veut pas dire que le risque est complètement éliminé», estiment des cadres de la DSP.
Pour cela, les citoyens doivent faire montre d'un «sens de responsabilité» et du respect des gestes barrières et des protocoles sanitaires préconisés, notamment la distanciation physique, le port du masque et l’évitement des rassemblements, afin de poursuivre la lutte contre le virus, ont-ils souligné.

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Sétif
12.000 cadres et agents mobilisés

Dans la wilaya de Sétif, toutes les dispositions humaines et matérielles sont prises pour entamer la campagne de vaccination anti-Covid-19 dans 141 centres équipés et encadrés par des médecins, des agents vaccinateurs et agents administratif.
Deux chambres froides d’une capacité de 8.000 m3 sont disponibles. Le transport du vaccin sera assuré par 11 camions frigorifiques.
Près de 12.000 cadres et agents relevant du secteur public et privé sont mobilisables pour la prise en charge de cette campagne de vaccination qui suscite un réel espoir dans les rangs de la population.
«Nous avons vécu plusieurs mois dans le stress et l’angoisse. Nous avons perdu bien des proches et amis. Je pense que c’est là une chance pour préserver notre santé et celle des autres, et surtout ne pas écouter, ceux qui ne savent faire que dans l’intox», relève Touffik, qui appelle les citoyens à se faire vacciner.

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