Dr Amel Hachichi, médecin anesthésiste : «Sauver des vies prime»

Résidente en troisième année, médecin spécialiste en anesthésie-réanimation, le Dr Amel Hachichi a fait le tour de plusieurs structures hospitalières du pays, avec pour seul souci de sauver le maximum de vies.
Depuis le début de la pandémie, le Dr Amel Hachichi s’est engagée corps et âme dans une lutte acharnée, toujours en première ligne, contre la COVID 19. «Cela fait plus d’une année que l’on réanime des patients atteints de ce dangereux virus». Que ce soit à l’EPH de Kouba où elle a montré ses grandes qualités de praticienne de santé publique ou à l’hôpital d’Ain Naâdja où elle travaille actuellement, elle a toujours répondu présent, de jour comme de nuit, à l’appel des malades. Lorsque nous l’avons sollicitée pour une rencontre, elle a accepté, entre deux gardes, de nous livrer son témoignage car il est impératif, dit-elle, de sensibiliser le maximum de gens sur l’importance des mesures barrières.
Elle dira d’emblée que les sujets pris en charge au niveau des services de réanimation, généralement pour détresse respiratoire, sont pour la majorité, des personnes âgées de plus de 60 ans. «Cela étant, d’autres personnes beaucoup plus jeunes ont été admises dans un état critique, nécessitant impérativement une ventilation mécanique». Parmi les personnes raccordées aux machines, seule une sur dix s’en sort saine et sauve. Cependant, le quotidien de ce médecin n’est pas fait que de mauvaises nouvelles. Il existe des moments de pur bonheur, comme se plaît-elle à le dire, quand par exemple, un malade intubé se réveille et prend conscience de son état.
Les services de réanimation étant dépourvus de cloisons, les lits sont tous alignés les uns près des autres comme en médecine de guerre et les malades, une dizaine par salle, placés en coma artificiel, sont entre la vie et la mort. A leur chevet une petite armada de médecins, anesthésistes et infirmiers s’activent pour relever le défi de la vie.

«Nous avons perdu beaucoup de confrères»

Mais avant tout cela, il faut intuber le malade qui présente un état critique. C’est à ce moment que le risque de contagion est très élevé, explique le Dr Hachichi. Elle rappelle que les anesthésistes et réanimateurs sont les plus exposés car pour intuber un malade, «on est très prêt de sa bouche et de la sphère ORL». Le geste lié aux premiers secours peut, de par la ventilation, aérosoliser les gouttelettes et les mettre en suspension dans l’environnement. Le risque zéro n’existe pas et encore moins pour ce qui concerne cette maladie, c’est pourquoi chaque geste demande davantage de précautions.
Cela étant et pour se prémunir, il faut effectuer systématiquement, à chaque entrée de salle, des gestes barrières optimisant la protection du personnel soignant. Enfiler la casaque en prenant soin de porter notamment sa charlotte et des gants jetables sont des préalables à tout contact avec le malade admis en réanimation. Les médecins bénéficient aujourd’hui des meilleurs équipements, tant pour sauver le plus grand nombre possible de malades que pour éviter la contagion.

«J’avais peur de contaminer mes parents et mes proches»

Pour autant, «les praticiens de la santé restent particulièrement vulnérables, eu égard au contact direct qu’ils ont avec les malades atteints de maladies contagieuses mais aussi, au fait que le risque zéro est tout simplement inexistant. Tout cela ne nous impacte nullement durant notre travail car pour nous, «sauver des vies humaines prime sur tout le reste. Il faut aller vite et bien car le patient qui manque d’oxygène peut décéder à n’importe quel moment, d’où l’importance d’une parfaite maitrise de tous les gestes à effectuer et en urgence».
«Avez-vous contracté le virus ?», le Dr Hachichi répond par l’affirmative. Cette dynamique praticienne, épouse d’un médecin, nous confie que parmi le personnel soignant, «ils sont nombreux à avoir été testés positifs au virus. Si beaucoup d’entre nous étaient asymptomatiques, d’autres ont présenté des complications assez sévères, entraînant parfois le décès», se remémore-t-elle, sur un ton très triste. «Cette période est passée mais j’ai longtemps vécu avec la peur au ventre. J’avais très peur de contaminer mes parents et mes proches et aujourd’hui encore, même si les choses évoluent dans le bon sens, il est nécessaire de faire face à l’incertitude, car on ne sait pas s’il y aura, à l’avenir, une nouvelle vague.
On ne sait pas quand elle pourrait arriver et dans quelles proportions. En fait, on appréhende le pire, il faut donc rester sur le qui-vive».
Soraya Guemmouri

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