
Les hauts plateaux désolés du Ladakh occupent à nouveau les unes de la presse mondiale et suscitent par la même les inquiétudes de la communauté internationale. Les tensions sont devenues très vives entre les deux puissances nucléaires, la Chine et l'Inde, qui se disputent ces hautes terres du Ladakh depuis la nuit des temps, ce qui a donné lieu à une guerre sino-indienne d'un mois et un jour en 1962, jusqu'à ce qu'en 1980, une ligne de démarcation négociée soit mise en place. Depuis maintenant 17 mois, marqués parfois par des affrontements meurtriers, les deux pays se renvoient la balle et échangent des accusations de violation des limites définies par la ligne de démarcation. En ces temps où la Chine est montrée du doigt par les Etats-Unis et leurs alliés, l'Inde de Narendra Modi a affirmé que «les troupes chinoises ont pris position dans le Ladakh dans des proportions préoccupantes». La presse de New Delhi va plus loin, affirmant que ces mêmes troupes chinoises, depuis début mai, ont patiemment mais sûrement grappillé quelques dizaines de kilomètres carrés de terres censées être sous contrôle indien.
Signes que ces tensions sont bien réelles, les pourparlers entre les commandants de l'armée indienne et chinoise entamées dimanche pour désengager les troupes des principales zones de friction se sont soldés par un échec et n'ont pas permis de lever la méfiance qui règne entre Delhi et Pékin. Le ministère indien de la Défense, dans un communiqué, a déclaré avoir fait des «suggestions constructives», mais que la partie chinoise n'était «pas d'accord». Un porte-parole militaire chinois a déclaré que «la partie indienne s'en tient à des demandes déraisonnables et irréalistes, ajoutant des difficultés aux négociations». Depuis février, l'Inde et la Chine ont retiré des troupes de certains sites de confrontation sur les rives nord et sud de Pangong Tso, Gogra et Galwan Valley, mais elles continuent de maintenir des troupes supplémentaires dans le cadre d'un déploiement à plusieurs niveaux. Les pourparlers de dimanche ont eu lieu au milieu de la frustration exprimée par le chef de l'armée indienne face à ce qu'il a appelé le déploiement massif de troupes et d'armes par la partie chinoise. Pour Pékin, «la détermination de la Chine à sauvegarder sa souveraineté est inébranlable, et la Chine espère que l'Inde ne jugera pas mal la situation». Les deux pays ont posté des dizaines de milliers de soldats soutenus par de l'artillerie, des chars et des avions de chasse le long de la frontière, de facto appelée la ligne de contrôle réel. L'année dernière, 20 soldats indiens ont été tués dans un affrontement avec des soldats chinois. La ligne de contrôle réel sépare les territoires chinois et indien du Ladakh à l'ouest à l'État indien d'Arunachal Pradesh, que la Chine revendique dans son intégralité. L'hiver rigoureux qui pointe déjà dans la région et où les températures atteignent souvent les -25° suffira-t-il à refroidir le chaudron déjà en pleine ébullition ?...
M. T.