Le continent entrepreneur : Elaborer un climat favorable

Ph. Nesrine T.
Ph. Nesrine T.

Au programme, des assises thématiques animées par des experts internationaux autour des questions relatives aux problèmes rencontrés par les jeunes Africains innovateurs et les moyens du continent dans le domaine numérique et l'avenir des affaires en Afrique. «Nous sommes loin des discours sur le lancement des start-up comme alternatif à la dépendance aux recettes des hydrocarbures, une source de devises fortes et l’exportation du génie algérien» nous explique M. Yazid Aguedal, spécialiste des nouvelles technologies et manager de l’entreprise «IT-Synergy» pour qui, l’Algérie est «au début de la route». Il affirme que ce qui s’est passé au cours des deux dernières années n’était que la création de l’environnement général dans lequel ces institutions opèrent et considèrent ce qui a été «relativement bien réalisé» dans un pays comme le nôtre, avec «toutes les complexités de la situation», porte sur la mise en place du cadre juridique à travers le concept de label, qui permet à ceux qui les obtiennent de bénéficier des avantages fiscaux et la possibilité de financement. Il soulignera par ailleurs l’implication de l’État dans l’accélération des mécanismes de financement et le démarrage dans le cadre de l’ASF, le Fonds algérien de financement (Algeria Start-up Fund) qui a commencé à fonctionner en attendant l’entrée d’autres clients sur le terrain.
Pour l’expert, plusieurs incubateurs ont émergé sur le marché afin d’accompagner et accélérer leur croissance, rappelant que «Algeria Venture» a été établi comme un accélérateur de croissance gouvernemental avec de nombreux services, y compris le financement et la mise en relation avec des investisseurs en capital risque.
Alimenté par six banques publiques, l’AFS a décaissé, depuis son lancement au début de l’année 2021, la bagatelle de 510 millions de DA au profit de 390 porteurs de projets. Un bilan prometteur qui conforte l’ambition des autorités de faire de l’Algérie un pôle d’innovation en Afrique. «La création d’un Fonds national pour le financement des start-up avec un mode de financement par capital-risque et l’intégration de la COSOB, la Commission d'organisation et de surveillance des opérations de bourse, et la Bourse d’Alger dans l’écosystème algérien des start-up, permettra de mettre en place des facteurs clés de réussite pour les start-up», estime de son côté M. Fethi Gasmi, consultant en management et co-fondateur de «Innoest Company Start-up Incubator».
Ce dernier considère l’ASF comme un partenaire principal des start-up avec plusieurs avantages tels que le conseil en gestion, l’expertise dans plusieurs secteurs d’activités. «Les démarches entreprises par les autorités publiques, poursuit-il, viennent matérialiser les engagements du président de la République pour le développement de l’économie nationale sous le signe du rajeunissement et de l'innovation». Le spécialiste ne manquera pas de vanter, à cette occasion, l’encouragement par les pouvoirs publics des compétences et l’accompagnement des gestionnaires et l'encadrement des jeunes porteurs de projets innovants, notamment les créateurs des startups, pour une vraie relance économique afin, dit-il, d’exploiter la matière grise algérienne vers un développement technologique local. «L’écosystème entrepreneurial est en train de se consolider», se félicite M. Gasmi en évoquant dans ce sillage les avantages, administratifs et fiscaux, ainsi que le cadre juridique légal facilitant aux jeunes et aux diplômés la création de ces start-up. S’agissant de la promotion de l’entrepreneuriat et les start-up au niveau continental, M. Amadou Diawara préfère pour sa part évoquer l’impératif de la formation. «Il faut systématiser la formation de qualité pour disposer d’une main-d’œuvre compétente. L’absence de véritable vivier de main-d’œuvre qualifiée est un frein à l’accélération l’industrialisation dans la plupart des pays africains», affirme le président du «Cluster Digital Africa», jugeant nécessaire et important la formation des futurs entrepreneurs dans l’optique de parvenir à «réduire» le déficit de qualifications dont souffrent de plus en plus les pays africains mais aussi de combler les lacunes et de préserver la compétitivité et la productivité des start-up africaines.

Tahar Kaidi

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Ils ont dit

Oswald Osaretin Guobadia (*) : «Transformez vos idées en projets»

«La particularité des start-up réside dans leur forte potentialité de développement, ce qui permet en un temps record de contribuer à créer de la richesse et à offrir des emplois. C’est la première fois que je viens en Algérie. Notre participation à cet événement vise à bâtir des ponts entre des pays africains. Nous sommes venus, également, pour contribuer au débat et dégager de nouvelles orientations pour assurer un meilleur accompagnement des start-up africaines via un cadre légal approprié et encourageant. Si je peux me permettre de m’adresser à la jeunesse du continent : foncez, transformer vos idées en projets et n’ayez surtout pas peur de réussir !»

(*) Conseiller en transformation digitale du président de la République du Nigeria

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Patricia Nzolantima (*) : «L’entrepreneuriat au féminin»

«Cela fait plus de vingt ans que je suis dans l’entreprenariat et j’ai décidé de me focaliser sur l’entreprenariat féminin en fondant Ubizcabs. Les femmes ont d’importantes potentialités pour impacter positivement le développement du continent. Par ce projet, je voulais mettre en avant les femmes qui se battent au quotidien pour changer l’image de l’Afrique.
Ma société lancée il y a plus de 5 ans en République démocratique du Congo est une entreprise de transport conduite par des femmes. Ces dernières par le biais d’un financement que nous leur proposons deviennent, à long terme, propriétaires du véhicule. Cela leur permet de devenir autonomes sur le plan financier car ces dernières peuvent par la suite louer ces véhicules. Ainsi, elles deviennent créatrices d’emplois. A présent, j’entame une nouvelle étape qui est la digitalisation de notre plateforme. L’objectif pour 2025 étant de financer plus d’un millions de femmes ce qui veut dire potentiellement 2 millions d’emplois crées. Ubizcabs est aussi une structure financière qui propose des financements en levant des fonds et en les réinjectant. Lors des travaux de cette conférence je vais proposer des mécanismes visant à renforcer l’accompagnement par les gouvernements africains des start-up via la création de banques africaines de financement.»

(*) Fondatrice de la société Ubizcabs Kinshasa, République démocratique du Congo

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Lamine Sarr (*) : «Arrêter de dépendre des autres»

«Notre start-up est une entreprise sociale et panafricaine dont la mission principale est de rassembler, numériser et rendre accessible le patrimoine littéraire et scientifique africain. L’idée centrale est de participer à l’accès et à la qualité de l’éducation sur notre continent. Nous mettons, par conséquent, à la disposition des étudiants, des chercheurs et autres, des bibliothèques numériques à travers une plateforme qui regorge de plus de 4.000 ouvrages. Et ce, en langues locales, en anglais et en français. L’objectif est de proposer un contenu africain pour les Africains et arrêter de dépendre de la production des autres.»

(*) Cofondateur et directeur des nouvelles éditions numériques africaines, Dakar, Sénégal

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