
Le 20 novembre marque le jour de l'adoption par l'Assemblée des Nations unies de la Déclaration des droits de l'enfant. Il s’agit de mettre en avant l’enfant à travers son quotidien, ses centres d’intérêt, ses droits, son éducation, sa santé et son bien-être. Il y a plus de 26 ans, le monde inscrivait les enfants dans le texte d’une convention pour les défendre, les promouvoir et surtout reconnaître leur spécificité, le besoin pour les mineurs d’être protégés et d’avoir une assistance adaptée à leur réalité, le droit de survivre et de se développer. Le droit d’apprendre et de s’épanouir. Le droit de faire entendre leur voix et d’atteindre leur plein potentiel. Plus d’un quart de siècle plus tard, quel bilan fait-on de la situation des enfants dans le monde ? Comment se porte l’enfant algérien ? Il est incontestable que de nombreux progrès ont été enregistrés en matière de droits des enfants dans notre pays, notamment en matière d’éducation avec près de 100% des enfants de 6 ans inscrits à l’école et 90% des enfants inscrits au cycle primaire. En matière de santé, la baisse du taux de mortalité pour les moins de 5 ans, et de plus en plus pour les moins de un an, est considérée comme un important acquis. L’Algérie occupe la 69e place au classement par pays pour ce qui est du taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans. La malnutrition diminue. Ces avancées, des plus importantes, traduisent les efforts considérables déployés par l’Etat. Concernant le secteur de l’éducation, 15% des enfants quittent l’école avant la fin du cycle primaire et l’Unicef estime même que 27,2% des enfants de moins de 15 ans sont analphabètes. Au plan de la santé, l’on enregistre des ruptures de vaccins et autres médicaments. Au plan nutritionnel, une politique d’éducation sanitaire s’avère nécessaire pour favoriser l’allaitement maternel où moins de 13% des enfants de moins de 6 mois sont allaités au sein. La couverture sanitaire doit être développée afin de réduire les décès des femmes en couche dans les zones excentrées, des Hauts-Plateaux et au Sud. En dépit d’un bon arsenal juridique, la protection de l’enfance reste à parfaire. En matière de législation, l'accent a été mis en particulier sur la protection des enfants et adolescents contre toutes formes de violence. Force est d’admettre, en effet, que le législateur algérien a élaboré quasiment tous les garde-fous nécessaires à l’effet de prémunir l’enfance contre toute atteinte à leur intégrité physique et morale. A cet égard, la minorité tentée par les enlèvements d’enfants a tôt fait de déchanter face à la rigueur de la loi et de facto à la détermination des pouvoirs publics à mener une lutte implacable contre tous les pervers et autres bourreaux patentés d’enfants. Un constat amer d’ailleurs quand on voit les chiffres d’actes de violence commis à l'encontre des enfants présentés par les services de sécurité. Sur les cas de violence liés à des maltraitances physiques, des agressions sexuelles et des enlèvements, les intervenants de la protection des droits des enfants appellent à la mise en conformité de la Convention internationale des droits de l’enfant avec nos lois nationales, accompagné de la promulgation d’un code de l’enfance. Violences et agressions, des cicatrices indélébiles De toutes les maltraitances, celles commises sur les enfants sont certainement les plus dramatiques, les moins visibles et paradoxalement les plus condamnées. Maltraitance, agressions sexuelles, violence physique, enlèvement, assassinat, un constat qui nous bouleverse parce que ce sont ceux chargés de les protéger et de les aimer qui sont le plus souvent à l'origine de cette violence. Les chiffres présentés sont effarants et dénotent de la situation alarmante des conditions de protection de nos enfants et le degré de décomposition de notre société. Des enfants malmenés et maltraités, d’autres ayant vécu des malheurs trop tôt, trop crûment dans leur chair et âme, victimes d'une main baladeuse vilaine, d'un attouchement vicieux ou d'un viol. Malgré le refoulement, le mal est ancré et palpable, les cicatrices ne se tarissent pas et se manifestent différemment. Au-delà des statistiques, c’est l’indignation face à l'inconcevable qu’exprime la société face à un phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur. Les professionnels de l'enfance, les médecins, les travailleurs sociaux, les professionnels de l'animation et les magistrats doivent être mieux sensibilisés et formés pour ne plus passer à côté de ces drames. Nous, citoyens, avons aussi un devoir de vigilance qui nous oblige à ne plus fermer les yeux sur les dangers qui guettent nos enfants. Du harcèlement au viol, de lourdes peines sont prévues par la législation algérienne, passibles même dans certains cas de peine de mort. Pourtant, certains spécialistes estiment que la législation est «inadaptée». «D'abord, la législation ne mentionne pas le viol à l'égard des garçons, qui est répertorié dans la case de l'atteinte à la pudeur. C'est abjecte quand on connaît le nombre élevé d'agressions sexuelles commis sur des garçons», déplore maître Bouchakou, avocat, avant d'ajouter que «l'inceste non plus n'est pas mentionné dans le code pénal. La loi relative à la protection de l'enfant englobe les différents principes des droits de l'enfant et comporte plusieurs mécanismes devant protéger l'enfant des dangers, à l'instar de la création de l'Organe national de la protection et de la promotion de l'Enfance (ONPPE) chargé de la coordination entre les différents secteurs, établissements et organes concernés par la protection de l'enfance, afin de mettre en place un programme sur la promotion des droits de l'enfant, assurer leur suivie et les évaluer en vue d'intervenir sur le terrain pour remédier à certaines situations. Toutefois, et face à un phénomène plus qu’inquiétant, les décideurs ne doivent plus se contenter de mettre en place les textes de loi adoptés, mais plutôt veiller à leur application sur le terrain et surtout leur impact sur la vie des enfants algériens.
Farida Larbi