«C’est le Président Abdelmadjid Tebboune qui est à l’origine de l’initiative d’organiser cette rencontre internationale, initiative que nos frères africains ont approuvée et unanimement soutenue.»
Alger, capitale historique des luttes de libération, haut lieu de mémoire et de justice, se distingue, depuis hier, en tant qu’épicentre d’une réflexion africaine et internationale à la fois audacieuse et inédite, en accueillant la Conférence internationale de l’Algérie sur les crimes du colonialisme en Afrique, placée sous le haut patronage du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, de concert avec l’Union africaine. L’objectif de ce sommet de haut niveau, abrité, deux jours durant, par le Centre international des conférences d’Alger, est inscrit dans l’intitulé même du thème choisi, à savoir : «Vers la réparation des injustices historiques par la criminalisation du colonialisme».
Grandiose et solennelle, la cérémonie d’ouverture des travaux a été supervisée par le ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, Ahmed Attaf, qui a plaidé, dans un discours puissant appuyé d’un argumentaire implacable, pour la criminalisation du colonialisme en Afrique. S’exprimant devant un aréopage de hauts responsables d’Algérie, notamment les deux présidents du Conseil de la nation et de l’Assemblée nationale et des membres du gouvernement, aux côtés de plusieurs ministres de pays d’Afrique, de hauts responsables de l’UA et du Parlement panafricain, de représentants du cercle diplomatique accrédités, d’experts et d’universitaires, Ahmed Attaf, après ses mots de bienvenue, a tenu à préciser d’entrée que «c’est le Président Abdelmadjid Tebboune qui est à l’origine de l’initiative d’organiser cette rencontre internationale lors du dernier sommet ordinaire de l’Union africaine au début de cette année, initiative que ses frères africains ont approuvée et unanimement soutenue».
Ahmed Attaf a souligné, dans son discours, que l’heure de solder les comptes de l’histoire a sonné. Il ne s’agit-là, poursuit-il, «ni de ruminer le passé ni d’attiser les haines, mais de faire prévaloir les droits, nommer les choses par leur nom, et obliger le monde à assumer ses responsabilités».
Tissé de la mémoire des martyrs et des héros de la libération africaine, le discours d’Ahmed Attaf a magistralement articulé le passé et le présent. «Nous nous réunissons pour marcher sur les traces de nos ancêtres qui ont tenu bon, résisté, lutté et vaincu, ces ancêtres qui ont transformé les résistances en révolutions, les révolutions en épopées, et les épopées en miracles, ces ancêtres qui ont libéré les terres et les patries et levé le joug de l’esclavage et de l’oppression des peuples», a-t-il dit.
Ahmed Attaf persiste et signe en affirmant que le traitement des séquelles du colonialisme «est une impérieuse nécessité pour poursuivre résolument et fermement la construction de l’avenir auquel aspirent les filles et les fils d’Afrique, dans la dignité, la fierté, la justice et l’équité». Il a ainsi soutenu que l’Afrique est engagée résolument dans une démarche de justice historique afin de rétablir la vérité sur le colonialisme.
Cette lutte reste nécessaire tant que persistent la falsification de l’histoire, le déni des crimes coloniaux et l’absence de reconnaissance officielle de leur gravité, a-t-il plaidé. «Le colonialisme est ce crime imprescriptible, ayant provoqué l’exclusion des nations africaines du cours de l’humanité, freiné la construction de leurs États et empêché l’exercice de leur pleine souveraineté», a aussi rappelé Ahmed Attaf. Il a surtout tenu à préciser que le colonialisme ne constitue en rien une mission de civilisation, mais plutôt un projet de spoliation, de pillage et de crimes les plus graves définis par le droit international.
Ainsi, toute tentative d’effacer la mémoire collective africaine est vouée à l’échec, car l’Afrique continue de défendre la vérité et la reconnaissance de son histoire, a-t-il soutenu. Avec une précision d’historien, il a énuméré les exterminations au Congo, les crimes «qui font rougir le front» au Cameroun contre le peuple bamiléké, le génocide des Héréros et des Namas en Namibie, la répression en Angola, au Mozambique et à Madagascar... Le ministre d’Etat, Ahmed Attaf, a ensuite fait de l’expérience algérienne le paradigme de la violence coloniale dans sa forme la plus absolue.
Décrivant «cent trente-deux ans d’un système qui fut le projet colonial de peuplement le plus long et le plus violent de l’histoire moderne». Il argue son propos en évoquant, entre autres, les massacres de Zaâtcha, Laghouat, la Kabylie), la politique de la terre brûlée, le Code de l’indigénat, sans oublier les séquelles persistantes des essais nucléaires dans le Sahara. Le ministre d’Etat a formulé trois revendications portées par l’Afrique via l’Union africaine, auxquelles l’Algérie adhère pleinement. D’abord, la reconnaissance. «La reconnaissance est le premier pas, le minimum que l’on puisse attendre», a-t-il déclaré.
Une reconnaissance qu’il décrit comme la clé pour soigner les plaies et panser les séquelles qui entravent encore le développement du continent. Ensuite, la criminalisation. Ahmed Attaf a exigé que le phénomène soit inscrit dans le droit international comme un crime en soi, imprescriptible, et non plus seulement à travers certaines de ses pratiques. Enfin, la réparation. Rejetant toute idée de charité, il a affirmé le droit de l’Afrique à une «compensation juste» et à la «restitution des biens pillés», un «droit légitime garanti par toutes les lois et coutumes internationales».
Ahmed Attaf a relié, en outre, le combat mémoriel aux luttes présentes, affirmant la solidarité de l’Afrique avec le peuple sahraoui, «dernière colonie en Afrique», et avec la Palestine. Reprenant la célèbre formule de Nelson Mandela, il a martelé : «Notre liberté en tant qu’Africains reste incomplète sans la liberté de la Palestine.»
Le ministre d’Etat a formulé trois revendications portées par l’Afrique via l’Union Africaine : criminalisation du colonialisme, réparation et reconnaissance.
K. A.
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Bankole Adeoye, représentant le Président de la Commission de l’UA : « que la vérité sur les dénis des valeurs africaines soit révélée »
La Conférence internationale de l’Algérie sur les crimes du colonialisme en Afrique «est d’une importance capitale et représente une pierre angulaire dans la déclaration des chefs d’État et de gouvernement africains», a déclaré Bankole Adeoye, commissaire chargé des Affaires politiques, de la Paix et de la Sécurité dans une allocution lue au nom du président de la Commission de l’Union africaine. Il s’agit «d’un appel à l’unité africaine pour dénoncer les crimes coloniaux et exiger des réparations», a-t-il appuyé. Il a estimé que la tenue de cette Conférence a pour principal objectif de révéler la vérité historique face au déni des valeurs africaines. «Elle constitue de ce fait un hommage à la libération du continent du colonialisme», a t-il appuyé, ajoutant que ces travaux sont à la fois politiques et juridiques en ce qui concerne les actes de génocide perpétrés contre les peuples africains.
Ceci dans le but, ajoute-t-il, de consolider la lutte contre le colonialisme et obtenir la reconnaissance de ses crimes par les Nations unies et la Cour internationale de Justice. Bankole Adeoye a ainsi plaidé pour la reconnaissance de la grandeur de l’histoire africaine, marquée par des violations et des répressions. «Nous ne sommes pas seulement des victimes de l’oubli, nous faisons face à la discrimination», a-t-il conclu.
K. A.
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Robert Dussey, ministre togolais des Affaires Étrangères : « je salue le courage du président Tebboune »
«Cette conférence est une opportunité pour échanger des formules nécessaires qui nous permettront de procéder ensemble à la réparation des crimes coloniaux, dont les divers pays africains ont été victimes», a indiqué, Robert Dussey, le ministre togolais des Affaires étrangères, dans une déclaration à El Moudjahid. «Après la décision de l’Union africaine concernant la qualification des crimes de l’esclavage comme un génocide, il faut maintenant retrouver conjointement les types de réparation exacts que nous souhaitons», a-t-il précisé. Et de poursuivre : «Dans ce contexte, le courage du président Abdelmadjid Tebboune, qui a organisé cette conférence internationale, mérite vraiment d’être salué. Oui, l’Algérie veille, comme à l’accoutumée, à partager toutes ses expériences avec les pays du continent.» Le chef de la diplomatie togolaise a enfin ajouté :«Le nombre de ministres africains qui participent à cette rencontre, constitue un indice palpable quant à sa réussite.»
Z. D.