La pièce Zahra bila Awrak (Une rose sans feuilles), du Théâtre régional de Laghouat, mise en scène par Tounès Aït Ali et écrite par Ibtissem Boudris, est bien plus qu’un simple spectacle théâtral : elle incarne un voyage émotionnel et artistique audacieux qui va représenter l’Algérie à la 7ème édition du Festival international du monodrame de Carthage, du 6 au 9 mai en Tunisie. Cette participation, véritable moment de prestige, met en lumière la scène théâtrale algérienne sur le plan international et invite les spectateurs à une expérience immersive inédite. Dès les premières minutes, la pièce captive l'attention du public avec une approche novatrice. Elle brise le 4ème mur avant même que le rideau ne se lève, transformant le hall du théâtre en un espace vivant et interactif. Là, le personnage de Zahra, interprété par Fatima Zahra Mesna, est assise sur une chaise, tirant un fil qui s’étire vers l’intérieur de la salle. Ce moment intime crée une connexion directe avec le public, plongeant les spectateurs dans l’univers de Zahra, où fiction et réalité se mêlent harmonieusement. Cette immersion est renforcée par l’interprétation de Fatima Zahra Mesna, dont la maîtrise vocale, la diction claire et la forte présence scénique ont déjà fait sensation lors de festivals précédents, comme le Festival national de la production théâtrale féminine de Annaba. Sa performance poignante donne vie au personnage de Zahra, rendant son histoire d’autant plus émotive et engageante. D’un point de vue artistique, Zahra bila Awrak se distingue par sa scénographie soignée et symbolique, où les fils prennent une place centrale. Ces éléments visuels ne sont pas de simples accessoires ; ils incarnent les tensions psychologiques de Zahra. Parfois, ils s’élèvent vers le ciel, symbolisant l’espoir et la quête de liberté ; à d’autres moments, ils semblent l’étouffer, illustrant son conflit intérieur et sa souffrance face à une société patriarcale. Cette dimension visuelle vient enrichir l’ensemble du spectacle, tout en renforçant ses thèmes de libération et de lutte intérieure. L’histoire de Zahra bila Awrak aborde la question féminine sous un angle profondément humain et psychologique. Zahra, le personnage principal, découvre le jour de son mariage qu’elle est une jeune femme sans origine connue, un secret qui amène son mari à la rejeter. À travers ce récit, la pièce explore les blessures sociales et familiales, tout en mettant en lumière les traumatismes liés à l'absence de reconnaissance et à l’abandon. La langue utilisée dans la pièce, un mélange d’arabe dialectal et d’arabe standard (fousha), joue un rôle-clé en accentuant la richesse émotionnelle du texte. Cette fusion linguistique, à la fois poétique et émotive, fait résonner de manière poignante les thématiques abordées tout au long du spectacle. Le Festival international du monodrame de Carthage, l’un des événements théâtraux les plus prestigieux de la région, offre aux artistes une occasion unique de démontrer leur talent en solo devant un public international. En plus des performances, le festival propose des ateliers et des conférences sur l’évolution du théâtre en solo, favorisant les échanges culturels et l’enrichissement mutuel des artistes.
M. K.